Baba Zoumanigui Vice-président IBM Software Group Afrique/Moyen-Orient Les ECO : Tout d'abord, quelle est la place qu'occupe le Maroc dans votre stratégie ? Baba Zoumanigui : Il est incontestable que le Maroc a réalisé des pas importants ces dernières années sur le plan économique et apparait comme l'un des pays les plus dynamiques en Afrique. Mais l'élément moteur est de savoir quelle est la place que le Maroc veut se donner dans le monde et non pas la place qu'IBM veut donner au Maroc. IBM accompagne une dynamique de développement, en fonction des objectifs et des priorités fixés par ses institutions. Si demain, par exemple le Maroc décide de se lancer dans la désalinisation de l'eau de mer, à notre niveau, nous pourrons nous dire que c'est un projet qui nous intéresse et déciderons peut-être de l'accompagner. Quelle est aujourd'hui la stratégie d'IBM en Afrique et au Moyen-Orient ? Dans toute démarche économique, il faut partir des besoins des clients. En Afrique, les vraies questions qui se posent consistent à savoir quels sont ses besoins. Nous pouvons avoir dans ce cadre, une approche par secteur. Sur le continent, nous avons quatre secteurs, à savoir, les banques, les télécoms, l'administration publique et la gestion des ressources naturelles (pétrole, phosphates....). L'autre approche est de se dire quels sont les applicatifs les plus pertinents à l'évolution de ces pays. À ce niveau, la gestion des données constitue un élément très important. En tant qu'acteur majeur dans ce domaine, nous interrogeons les clients, pour voir quels sont les priorités qu'ils se donnent et quels sont les domaines dans lesquels figurent des carences ou des lacunes et sur lesquels nous pouvons apporter une aide.Le problème majeur qui se pose au continent, c' est le manque de compétences en ressources humaines. À ce propos, nous travaillons avec des business-partners, les universités locales et nous avons des programmes de mise en place de laboratoires et de centres d'innovation qui nous permettent de développer des produits dans le domaine de l'informatique. Quelles sont vos parts de marché en Afrique ? Notre approche consiste plutôt à nous dire quelles sont les meilleures applications utilisées dans le domaine public, quelles sont les banques qui utilisent notre technologie pour faire un certain nombre de travaux et quelles sont les sociétés qui font appel à nos produits pour résoudre certains problèmes liés à leur domaine d'intervention. Nous privilégions cette approche, au lieu de nous attarder sur les parts de marché que nous détenons dans tel ou tel pays. ...Et en termes de création d'emplois ? Le département logiciel que je dirige emploie à lui seul environ 500 personnes. Nous faisons aussi venir régulièrement des intervenants depuis d'autres pays dans le cadre de missions ponctuelles. Quels sont les objectifs d'IBM à court et à moyen terme ? Comme je vous l'ai dit plus haut, nous nous focalisons sur quatre domaines principaux (banque, télécoms, administrations publiques, et gestion des ressources naturelles). Nous avons à cœur de donner à chacun de ces domaines les meilleures technologies en termes de matériel, de logiciels et de services. Nous souhaitons être le premier partenaire privilégié de l'ensemble des acteurs de ces secteurs. En Afrique, quels sont les marchés qui vous intéressent le plus actuellement ? IBM existe depuis plus d'un siècle. D'ailleurs, nous allons fêter nos 102 ans au mois de juin prochain. Le marché de l'informatique a énormément évolué, et ne se résume plusà la vente de matériel informatique, comme à l'époque. Après avoir réalisé de très fortes croissances aux Etats-Unis et en Europe, nous avons mis en place une stratégie destinée aux marchés émergents. La question est de savoir comment nous comptons nous imposer sur ces marchés. Est-ce que c'est en y allant directement ou en s'appuyant sur des partenaires commerciaux, en raison de contraintes géopolitiques. Je dirais pour résumer que les stratégies sont pensées de manière globale, mais mises en place de manière locale. Aujourd'hui, IBM est présente dans 180 pays, et directement dans une vingtaine pays africains. Comment réagissez-vous face à la concurrence, notamment celle des opérateurs asiatiques ? IBM opère dans un domaine où la concurrence est de mise. Avec les autres intervenants, il y a de la concurrence, mais aussi de la coopération. Dans notre domaine, vous trouverez toujours un acteur qui fait quelque chose de similaire à vous. La différence fondamentale c'est qu'il y a très peu de sociétés qui prennent le spectre des compétences requises dans le monde de l'IT de le Consulting jusqu'à l'Outsourcing. La plupart des acteurs sont souvent sur des niches. L'autre élément qui a également changé depuis le début des années 90, c'est qu'IBM a fait le choix des systèmes ouverts, alors que d'autres acteurs ont des systèmes fermés, qui ne fonctionnent que dans leur environnement. Quelle est la stratégie d'IBM pour contribuer à former des compétences africaines ? Tout d'abord, il s'agit de recruter des collaborateurs sur les marchés locaux, de leur assurer la formation adéquate, afin de leur permettre les technologies dans le domaine de l'informatique. Le deuxième niveau consiste à s'appuyer sur des partenaires commerciaux, qui n'auront de valeur que lorsqu'ils maîtriseront la technologie. Dans ce domaine, nous avons tout un programme de formation de ces partenaires. Le troisième niveau s'articule autour d'un programme destiné aux développeurs d'applications. Il s'agit de leur fournir les outils, l'environnement et le cadre pour développer des applications autour d'IBM. Quatrième élément, nous nous intéressons au monde académique, notamment les universités et instituts, pour insuffler une connaissance des technologies de l'information, en particulier celles d'IBM. Tous ces différents volets recouvrent un programme et nous assistons à une accélération de cette tendance.