Le continent est le deuxième bénéficiaire de l'Aide pour le commerce après l'Asie. Sur la période 2009-2011, l'Afrique a bénéficié de 16,33 milliards de dollars d'engagements et de 12 milliards de dollars de décaissements opérés. Le Maroc, l'Ethiopie, l'Egypte, la Tanzanie, et le Ghana sont les cinq premiers bénéficiaires de l'Aide pour le commerce en Afrique avec plus d'un demi-milliard de dollars par an. L' aide au commerce est indispensable à la connexion de l'Afrique aux marchés mondiaux. Dans un contexte marqué par une contraction significative et globale des flux d'aide au développement (APD) – dont l'Aide au commerce représente une part qui ne dépasse pas 25% du total des engagements de l'APD – l'Afrique reste le deuxième bénéficiaire de ce type d'aide après l'Asie dans le monde. C'est ce que vient de révéler un récent rapport de la Commission économique pour l'Afrique des Nations Unies (CEA). Que ce soit pour les engagements ou pour les décaissements réels, l'organisme précise en effet que le continent reçoit plus d'un tiers du total mondial de cette aide. Sur la période 2009-2011, l'Afrique a bénéficié de 16,33 milliards de dollars d'engagements et de prêts et près de 12 milliards de dollars de décaissements opérés, tandis que l'Asie, qui regroupe pourtant aujourd'hui plusieurs géants commerciaux du monde, a perçu respectivement 17,6 milliards de dollars d'engagements et 13 milliards de dollars d'opérations effectives de décaissement. De plus, cinq des dix premiers pays bénéficiaires dans le monde de ce type d'aide sont africains, à savoir le Maroc, le Ghana, l'Ethiopie, l'Egypte et la Tanzanie. «L'Aide pour le commerce occupe une place proportionnelle à la taille des économies bénéficiaires dans le contexte africain que dans d'autres régions du monde», constatent les experts de la CEA. En effet, qu'elle soit exprimée par habitant ou par rapport au PIB de la région bénéficiaire, l'aide pour le commerce en Afrique dépasse sensiblement l'aide fournie à d'autres continents avec en moyenne un ratio de 11,26 dollars par personne, soit 0,65% du PIB africain entre 2009 et 2010. Aide au commerce VS crise Cependant, en dépit de l'importance du continent comme bénéficiaire de l'Aide mondiale pour le commerce, la crise économique a un effet de ralentissement sur la croissance des chiffres. Après 7 à 8 années de pleine croissance, les engagements en la matière ont été fortement réduits en 2011 sous l'effet de la crise économique prolongée qui a ébranlé les principaux donateurs partenaires internationaux. En effet, le rapport de la CEA montre qu'après avoir culminé à 18,5 milliards de dollars en 2010, les engagements ont été réduits en termes réels de 29,2%, chutant à 13,1 milliards de dollars en 2012. Pour les experts de l'organisme panafricain, cette contraction constitue «la chute la plus importante de toutes les régions du monde». Malgré les différences d'un pays à l'autre, les engagements ont ainsi baissé dans 32 pays sur les 54 que compte le continent. «Ce repli est de 21% dans les pays africains à revenu moyen», note-t-on auprès de la CEA. Il est par ailleurs intéressant, selon la même source, de relever que jusqu'en 2011, les décaissements opérés au titre de l'Aide pour le commerce en faveur de la région ont mieux résisté que les engagements. «En 2011, le continent a reçu 12,3 milliards de dollars en termes de décaissements, soit un changement positif, bien que marginal, par rapport à 2010», argumente la CEA. Toutefois, la crise qui s'est poursuivie dans les principaux pays donateurs a entraîné un ralentissement des décaissements de l'Aide pour le commerce en faveur du continent. Là aussi, dans 32 pays sur 54, le taux de croissance réel des décaissements, entre 2009 et 2011, a été plus faible que le taux enregistré pour la période 2006-2008. Cependant, contrairement à d'autres régions, ce taux est demeuré généralement positif dans la majorité des cas. «Même en 2011, alors que le continent subissait la récession la plus grave au monde en matière d'engagements de l'Aide pour le commerce, l'Afrique était le seul continent qui connaissait une croissance réelle, quoique lente, de 3 % en décaissements correspondants», expliquent les économistes de l'institution panafricaine. Leur rapport révèle aussi que, pour la période 2006-2011, l'Afrique est le continent où le ratio décaissements-engagements est le plus faible, soit 71 % en moyenne, contre 73 % en Océanie, 74 % en Asie, 82 % en Amérique, et jusqu'à 87% en Europe. Par ailleurs, l'amélioration récente de ce ratio est presque entièrement due à la chute brutale des engagements de l'aide en faveur de la région plutôt qu'à une convergence ascendante des décaissements. «Il est plausible que cette évolution soit due à la manière avec laquelle la durée de la récession économique dans les pays donateurs a affecté les variables de l'Aide pour le commerce, y compris les retards pris par les grands projets d'infrastructure», justifie-t-on. Répartitions nuancées Dans le détail des chiffres et des répartitions des flux d'Aide pour le commerce par pays, le continent affiche des contrastes relativement marqués. «Les moyennes régionales masquent des variations considérables d'un pays à l'autre en ce qui concerne le volume du flux de l'aide, les engagements et décaissements par habitant, sans oublier l'hétérogénéité entre pays en matière de taux de croissance ou d'allocation sectorielle de l'Aide pour le commerce», constate la CEA. Entre 2009 et 2011, des économies comme le Maroc, l'Ethiopie, l'Egypte, la Tanzanie, et le Ghana - les cinq premiers bénéficiaires de l'Aide pour le commerce en Afrique par ordre d'importance- ont reçu au total des décaissements équivalents à plus d'un demi-milliard de dollars par an. À l'inverse, dans la même période, les cinq derniers bénéficiaires, la Libye, Sao Tomé-et-Principe, les Seychelles, les Comores et la Guinée équatoriale (par ordre décroissant) – ont reçu un décaissement qui ne dépasse pas la barre des 15 millions de dollars. «Cependant, si on tient compte de la taille relative des différents pays, il s'avère que l'Aide pour le commerce joue un rôle important non seulement dans les grands pays, mais également dans des économies relativement réduites», remarquent les experts de la CEA. En effet, «parmi les dix premiers bénéficiaires en matière de décaissement par habitant figurent trois pays insulaires, le Cap-Vert, les Seychelles et Sao Tomé-et-Principe, ainsi que d'autres petits pays comme Djibouti et la Gambie», selon le rapport de la CEA. La caractéristique «Dons» Le même document révèle également «qu'environ 55 % des décaissements de l'Aide pour le commerce en Afrique étaient constitués de dons et d'instruments assimilés à des dons, et ce chiffre est demeuré relativement constant au fil du temps malgré la crise économique». Les prêts consentis à des conditions de faveur représentaient 40% des décaissements de l'aide destinés à la région, alors que le reliquat était comptabilisé au titre des investissements de capitaux. Si ces chiffres sont désavantageux par rapport à ceux de l'Océanie et de l'Amérique qui reçoivent des fonds d'Aide pour le commerce relativement faibles, l'importance des dons est plus forte qu'en Asie où les prêts constituent en moyenne 55% du total des décaissements. Quant aux donateurs, l'appui apporté au continent au titre de l'Aide pour le commerce se répartit presque également entre donateurs bilatéraux et multilatéraux. Qui aide le commerce africain? L'Association internationale de développement (AID) de la Banque mondiale est de loin le plus gros pourvoyeur de l'aide. Elle a décaissé 20% du total de l'aide en 2011, suivie des institutions de l'Union européenne et des Etats-Unis qui ont décaissé respectivement 13% et 11%. Parmi les institutions continentales, la Banque africaine de développement joue également un rôle important dans le financement des projets et programmes d'Aide pour le commerce et a décaissé quasiment 1,2 milliard de dollars en 2011. «Fait intéressant, les données confirment également la tendance plus générale de la participation plus accrue des donateurs non membres du CAD aux activités de coopération dans le contexte africain. En ce qui concerne l'aide au développement, c'est le cas aussi des fonds arabes, du Koweït, du Fonds de l'OPEP pour le développement international et des Emirats arabes unis. Besoins Pour la CEA, le fait que les décaissements en faveur de l'Afrique aient doublé entre 2006 et 2011 est assurément un signe encourageant. Cependant, l'organisme pense que pour placer les chiffres dans une perspective plus adéquate, il suffit de rappeler que le Programme pour le développement des infrastructures en Afrique (PIDA) devrait coûter 68 milliards de dollars d'ici à 2020 (CUA, BAD et CEA, 2011). Dans ce contexte, les difficultés économiques des pays donateurs traditionnels remettent en cause la faisabilité même de l'augmentation à grande échelle du financement de l'Aide pour le commerce, pourtant si indispensable. Par ailleurs, «ces changements en cours dans le paysage du financement du développement ouvrent la voie à des modalités novatrices de financement et à l'apparition de nouveaux partenaires, tandis que l'accélération de la croissance de l'Afrique lui permet de renforcer sa mobilisation des ressources intérieures», explique-t-on auprès de l'organisme. À cet égard, il est évident que l'amélioration des capacités d'échanges commerciaux de l'Afrique entraînera nécessairement une nouvelle approche du financement du développement qui permettra de dépasser la dichotomie traditionnelle donateur-bénéficiaire, d'engager de manière plus dynamique les acteurs du privé et les partenaires non traditionnels, de renforcer la mobilisation des ressources intérieures (en particulier des pays riches en ressources naturelles), de lutter contre les flux financiers illicites et d'accroître l'efficacité des mécanismes de partenariat public-privé.