Taux de chômage élevé, sous-emploi, précarité... une analyse accablante du HCP sur les conditions de travail de la femme. À l'occasion de la célébration de la Journée internationale de la femme, le Haut-commissariat au plan s'est livré à un exercice intéressant: passer au peigne fin la situation des femmes vis-à-vis du marché du travail. Le constat est sans appel : l'analyse révèle une faible participation de la femme à l'activité économique. Pire encore, la situation de la femme dans le marché du travail se dégrade. En effet, la part des actives dans le volume total des femmes en âge de travailler ne représente que 24,7% à fin 2012. Cette part était de 28,1% en 2000, soit une baisse de 3,4 points en l'espace de 12 ans. «Ce recul de l'activité est dû en partie à l'augmentation de la part de la catégorie des «élèves et étudiantes» (+2,2 points)», explique le HCP. Inégalités Selon la cartographie réalisée par les équipes d'Ahmed Lahlimi Alami, le nombre de femmes actives âgées de 15 ans et plus est passé, entre 2000 et 2012, de 2,74 à 3,04 millions, soit un accroissement annuel moyen de 0,9%. La population en âge d'activité a, quant à elle, augmenté au cours de la même période de plus de 2% annuellement. Par conséquent, le taux d'activité des femmes est passé de 28,1% à 24,7%, restant largement en deçà de celui des hommes (pour lesquels ce taux est passé, au cours de la même période, de 78,9% à 73,6%). Ce recul a aussi bien concerné les femmes rurales (37,5% à 35,6%) que les citadines pour lesquelles cette diminution est plus accentuée (-3,7 points, de 21,3% à 17,6%). Par ailleurs, le niveau et l'évolution du taux d'activité des femmes varient largement selon les tranches d'âge. Ainsi, la baisse de l'activité constatée peut être imputée essentiellement à la baisse de l'activité des jeunes femmes âgées de 15 à 24 ans (-8,5 points). À l'inverse, les femmes de 45 ans et plus sont plus actives aujourd'hui qu'elles ne l'ont été douze ans auparavant. La déclinaison de la hausse des taux d'activité par âge permet donc de mieux comprendre les soubassements de cette évolution globalement contre-intuitive. La gente féminine ne fait pas mieux au niveau du taux d'emploi. En 2012, sur une population active occupée de 10,5 millions, le Maroc a comptabilisé 2,74 millions de femmes, soit un taux de féminisation de l'emploi de 26,1%. Le taux d'emploi féminin, quant à lui, ne représente que près du quart de la population féminine âgée de 15 ans et plus. Comme pour le taux d'activité, ce taux est toujours bien en deçà de celui des hommes (environ 45 points d'écart). Ainsi, au terme de l'année 2012, le taux d'emploi des femmes s'est établi à 22,3% contre 67,2% pour les hommes. En 2000, ces deux indicateurs étaient respectivement de 24,5% et 68,2% ! Condamnées au chômage! Le revers de la médaille est que les femmes sont plus exposées au chômage. En 2012, leur nombre s'est établi à 302.000 personnes, soit 29,1% du volume global du chômage. Ces femmes sont caractérisées essentiellement par leur jeune âge et leur qualification. La majorité sont âgées de moins de 35 ans (80,5%) et près de huit femmes sur dix sont diplômées (81,1%). L'analyse du profil des femmes au chômage révèle aussi que les trois quarts de ces dernières (75,1%) chôment depuis plus d'une année et 64% sont des primo-demandeuses d'emploi. Par ailleurs, malgré une moyenne annuelle du taux de chômage féminin relativement peu élevée (9,9% contre 8,7% pour les hommes), le taux de chômage dépasse les 20% pour certaines femmes actives. Il s'agit des citadines avec 20,6% (contre 11,5% pour les citadins), des jeunes citadines âgées de 15 à 24 ans (44,5%) et de celles âgées de 25 à 34 ans (28,2%), des diplômées, notamment celles en qualification professionnelle pour lesquelles le taux s'est établi à 33,9%, suivies par les diplômées des facultés (33,3%) et les diplômées de l'enseignement secondaire (33,5%). Sur un autre registre, les femmes souffrent également du sous-emploi. En 2012, 125.000 femmes actives occupées ont été dans une situation de sous-emploi, soit un taux de sous-emploi de 4,6%. Par milieu de résidence, 88.000 sous-employées ont été enregistrées en zones urbaines contre 37.00 en zones rurales. Le sous-emploi des femmes demeure essentiellement un phénomène urbain. Par secteur d'activité économique, le secteur des BTP, quoiqu'il n'occupe que peu de femmes, reste le plus touché par le phénomène du sous-emploi avec un taux de 13,3% au niveau national. Le secteur des services enregistre un taux de 9,5%, suivi par le secteur de l'industrie (y compris l'artisanat) avec 6,6%. Le secteur de l'agriculture, forêt et pêche est, quant à lui, le secteur le moins touché par le phénomène du sous-emploi avec un taux de sous-emploi de 1,8%. Le profil des femmes en emploi Au niveau national, les femmes seraient plus présentes dans le secteur de «l'agriculture, forêt et pêche» avec une part de 59,9% de l'emploi féminin. Le secteur des «services» constitue le deuxième secteur pourvoyeur d'emplois pour les femmes avec une proportion de 27,9%. Enfin, le secteur de «l'industrie» contribue avec 11,8% des postes d'emploi féminins. Cette structure de l'emploi selon le secteur d'activité économique cache des disparités par milieu de résidence. En effet, en milieu rural, la majorité des postes féminins sont dans «l'agriculture, forêt et pêche » (93,2%) alors qu'en milieu urbain, les femmes travaillent principalement dans le secteur des «services» (68,6%). Les femmes actives occupées travaillent essentiellement dans le secteur privé (90,9%), dont plus de la moitié (59,5%) exercent dans des exploitations agricoles. L'analyse selon les grands groupes de professions révèle que près de la moitié (48,2%) sont des ouvrières ou manœuvres agricoles ou de la pêche, 11,6% sont des exploitantes agricoles, pêcheuses, forestières ou chasseuses, 10,9% sont des manœuvres non agricoles, manutentionnaires des petits métiers et 9,6% sont des artisanes ou ouvrières qualifiées des métiers artisanaux.