De plus en plus de grandes écoles proposent la filière. La plupart des formations sont organisées en partenariat avec des instituts français. La formation prépare aux métiers de la gouvernance, quel que soit le secteur d'activité. Il existe des filières dont beaucoup d'étudiants doutent des débouchés. La filière sciences-po en fait partie. Et pourtant, «nous avons des débouchés plus variés qu'une école de commerce, à l'image de la diversité des masters que la filière propose», se réjouit Mathilde Bereni, directrice des études de l'Ecole de gouvernance et d'économie de Rabat, ouverte il y a quelques années. «Au départ, lorsque l'école a été lancée en 2008, très peu de bacheliers s'intéressaient à la filière sciences-po, en tout cas ceux issus des milieux de la classe moyenne ou défavorisée. Et pourtant, beaucoup d'entre eux s'intéressaient aux questions locales, le développement social, la question politique…Lorsque nous avons entamé une table ronde sur la réforme constitutionnelle, on a été impressionnés par le nombre de jeunes qui ont voulu assister à cette thématique. Nous avons constaté que les jeunes veulent sortir des sentiers battus comme l'architecture, la médecine…», souligne-t-elle. Pour Imad-Eddine Hatimi, doyen et directeur du pôle affaires académiques de l'Université Mundiapolis, «l'engouement devrait s'installer rapidement chez la population estudiantine marocaine à l'instar de ce qui existe en France, et ce, pour plusieurs raisons. Les questions de décentralisation, régionalisation et autres devraient aboutir à un plan global de formation des élites politiques. Le programme comprend certes des cours en économie politique et en droit constitutionnel, mais prépare aux métiers de la gouvernance quel que soit le secteur d'activité et le type d'organisation (privée, publique ou ONG). Il comporte des cours de management, d'histoire, de culture générale, de relations internationales…», précise t-il. Les deux acteurs mettent l'accent sur le fait que la filière sciences-po présente les mêmes atouts que les parcours des grandes écoles en matière de sélectivité et d'employabilité mais avec un avantage important, celui de mettre l'accent sur le développement personnel qui confère à l'étudiant une polyvalence. Ainsi, la méconnaissance de ces formations est surtout d'ordre communicationnel. «Nous devons absolument multiplier les efforts d'explication et de vulgarisation de ce genre de programmes. Par ailleurs, nous sommes appelés à renforcer l'intérêt de nos jeunes à la chose politique», note M. Hatimi. Actuellement, très peu d'écoles ou d'universités proposent de tels cursus. A l'origine, c'étaient les facultés des sciences juridiques, économiques et sociales qui en faisaient durant les années 70 et 80. Mais avec la prolifération des écoles de commerce et le désintérêt des étudiants pour cette formation, beaucoup de filières sciences-po ont fini par fermer. «Du coup, les administrations publiques, principales pourvoyeuses de postes pour cette filière se sont tournées vers les profils d'ingénieur», note un spécialiste de l'enseignement supérieur. A présent, on ressent un regain d'intérêt. L'Université internationale de Rabat (UIR) vient de lancer un bachelor en sciences politiques et relations internationales, en collaboration avec Sciences-Po Grenoble. L'objectif est d'offrir aux étudiants une formation de haut niveau en sciences politiques. Il en est de même pour Mundiapolis qui s'est associé à Sciences-Po Bordeaux pour lancer un programme sur mesure où les candidats sont amenés à passer une année à Bordeaux pour se familiariser avec le contexte européen. Actuellement, la filière accueille une vingtaine de participants. «L'objectif de la création de ces filières est de s'ouvrir sur les métiers de la gouvernance dans les grandes entreprises, dans l'administration et dans les collectivités locales, à l'heure de la régionalisation au Maroc», explique M. Hatimi. Contrairement aux autres filières de formation, Sciences-po reste ouverte à tous types de bac (Bac ES, L, S, Bac+1, Bac marocain toutes séries). Les élèves doivent toutefois présenter des résultats exceptionnels et passer plusieurs épreuves écrites d'admissibilité, notamment une épreuve de dissertation en français sur un thème d'actualité permettant de déceler les qualités de compréhension, de réflexion, de synthèse et de rédaction. Ils passent également une épreuve d'histoire et géographie comportant une question de cours à traiter au choix parmi deux proposées, dans chacune des deux matières, une épreuve d'anglais comportant des questions de compréhension sur un article tiré de la presse et une rédaction argumentée sur un sujet de société. Par la suite, il y a une épreuve orale d'admission qui consiste en un entretien devant un jury, portant sur la motivation du candidat, son intérêt pour les disciplines de la filière, ses objectifs personnels ainsi que sur les sociétés, la géographie et l'histoire contemporaine. En France, par exemple, 60 à 80% des lauréats de sciences-po travaillent dans le privé Concernant les débouchés, la filière offre de nombreuses opportunités. La formation est orientée aussi bien vers les métiers de gouvernance d'entreprise que ceux de la diplomatie et du management public et gestion territoriale, ce qui permet aux diplômés de travailler aussi bien dans le privé que dans le public. Les lauréats peuvent faire une carrière de haut niveau dans le secteur privé et public, au Maroc et à l'international dans plusieurs secteurs d'activité (humanitaire, finances, commerce, journalisme, diplomatie, ressources humaines, expertise et conseil, éducation, santé, environnement, communication et marketing…). «Nous avons des candidats qui ont fait classes prépa et se sont orientés vers cette filière tout comme nous avons reçu des journalistes qui voulaient poursuivre leurs études dans cette filière» , souligne Mme Bereni. En France, par exemple, 60 à 80% des lauréats de sciences-po travaillent dans le privé et le reste dans les administrations publiques, l'enseignement et la recherche. Cependant, ces statistiques sont à nuancer. En fonction des spécialités, certaines enquêtes d'insertion des différents instituts d'études politiques (IEP) montrent que la fonction publique vient en premier lieu. Comme ces cursus sont encore nouveaux au Maroc, il faut attendre les prochaines années pour connaître une cartographie des insertions professionnelles des lauréats.