L'ANME qualifie les sorties et démarches de briser l'élan de la réforme que le gouvernement vient d'engager comme des tentatives de prise d'otage, isolées, minoritaires et désespérées. Pour elle, ces sorties visant à préserver des intérêts individuels se dressent contre l'intérêt général de la profession. Voilà un autre chantier qui connaît beaucoup de problèmes et auquel le gouvernement décide de s'attaquer : la presse et l'édition. Il vient d'adopter en ce sens, jeudi, un décret-loi. Là encore, il fait face à une résistance farouche de ceux parmi la profession qui tirent profit de la situation actuelle. Ce qui est compréhensible. Ce qui l'est moins, c'est que des acteurs politiques décident de participer à cette levée de boucliers. Heureusement que parmi la profession des voix s'élèvent pour pointer le vrai problème. L'Association nationale des médias et des éditeurs (ANME), l'organisme le plus représentatif du secteur de la presse et de l'édition au Maroc, dit ainsi « avoir suivi avec beaucoup d'étonnement les tentatives de nuisance et de résistance aveuglément hostiles au projet de réforme de l'écosystème des médias, de la presse et de l'édition au Maroc ». L'ANME a ainsi noté des tentatives partisanes et professionnelles isolées, « visant à freiner l'élan du nouveau projet de réforme, au service d'agendas qui ne sont plus un secret pour personne, principalement la volonté de maintenir un statu quo stérile et perpétuer un provisoire dont a pâti le secteur de la presse pendant plus de 12 ans ». Ces tentatives de blocage enragées, poursuit l'ANME, « ont atteint leur paroxysme au moment de la proposition du projet de loi portant création d'une commission provisoire pour la gestion des affaires du secteur offrant une sortie de la situation de crise dans laquelle l'ancienne tutelle gouvernementale a plongé le secteur ». Pour comprendre la situation actuelle, il faut remonter à 2016. Le gouvernement du PJD avait fait adopter une réforme du secteur, avec la création du Conseil national de la presse. Un peu plus de six ans plus tard, celui-ci est dans une situation de blocage. Les mécanismes d'élection du président et des membres du Conseil n'ont pas été prévus dans les statuts. Pour l'ANME, le gouvernement précédent avait entériné « des réglementations non réfléchies, non viables et sans aucune perspective législative, dans le seul objectif d'opérer une mainmise sur le secteur et le verrouiller ». Résultat : arrivé à échéance, le mandat des membres et du staff dirigeant n'a pu être renouvelé à temps, soit en octobre de l'année dernière. Le gouvernement, pour débloquer la situation, avait adopté un décret-loi prorogeant de six mois ce mandat, arrivé de nouveau à terme au début de ce mois d'avril. Là, l'Exécutif tente une démarche différente, il vient d'adopter, jeudi 13 avril, un nouveau projet de décret-loi avec, cette fois, la mise en place d'une commission provisoire à la tête du CNP. La mission de cette commission, dont la durée s'étend sur deux ans, est certes la gestion des affaires courantes du Conseil, mais également la préparation des élections de renouvellement de ses instances et surtout la préparation d'un nouveau cadre légal pour le secteur. Comme l'a d'ailleurs souligné l'ANME, cette initiative du gouvernement a pour objectif de renforcer le rôle de la presse dans la défense des questions stratégiques du pays. Et ce, parallèlement à toutes les démarches ayant ciblé le renforcement des acquis au profit des professionnels, des établissements et des entreprises du secteur. L'Association considère donc la constitution de cette commission provisoire, et précisément dans le contexte actuel, « comme une garantie de la continuité de gestion du secteur dans la perspective de trouver des solutions durables aux dysfonctionnements que connaît actuellement le Conseil national de la presse au niveau du renouvellement de ses instances ». Elle estime d'ailleurs que cette solution « concertée entre le gouvernement et les professionnels » est une mesure d'urgence « à même de sortir le secteur d'un flou volontaire et orchestré et donc le protéger de pratiques vicieuses dépassées et dorénavant inacceptables ».