Pour le directeur général de la Fédération marocaine des sociétés d'assurances et de réassurance (FMSAR) : «S'adapter à l'évolution des besoins des clients est un challenge». Comment l'assurance automobile bascule-t-elle aujourd'hui vers une mobilité intelligente et durable ? Des tendances très fortes se dessinent sur les marchés matures de l'assurance et elles finiront par gagner notre pays. On constate dans les grandes villes occidentales de nouveaux modes de mobilité qui changent la donne pour les responsables de la gestion publique mais aussi pour les assureurs. Ces évolutions arrivent progressivement chez nous et sont bien visibles dans nos villes. De nouvelles catégories de véhicules circulent et aggravent l'exposition au risque. Elles sont souvent très vulnérables mais aussi, dans bien des cas, responsables d'accidents. Aussi, l'un des enjeux majeurs pour les assureurs est l'introduction par UBER d'un nouveau mode de transport qui a fait des émules. Ces véhicules qui ont révolutionné notre mobilité circulent avec des assurances auto classiques, alors que l'exposition au risque est la même que celle des taxis. Au Maroc, quatre sociétés de ce type se partagent le marché. Face à ce double défi technologique et économique, comment les compagnies peuvent-elles anticiper ces évolutions ? Le rôle du RDV de Casablanca de l'assurance est de permettre l'échange entre les acteurs marocains de l'assurance et leurs homologues étrangers pour un partage d'expériences et des meilleures pratiques. C'est pour nous l'occasion d'explorer ce qui se passe ailleurs et qui pourrait arriver chez nous dans un futur proche. Ensuite, on a le volet réglementaire. A titre d'exemple, plusieurs pays occidentaux ont introduit une obligation d'assurance pour les Engins de déplacement personnels motorisés (EDPM). Il s'agit essentiellement des trottinettes électriques, mais aussi des gyropodes (sorte de skate à deux roues, ndlr) et des gyroroues (engins constitués d'une seule roue, ndlr). Il faut également réfléchir aux vélos électriques qui peuvent dépasser les 45 km/h. Ils bénéficient par exemple en France d'une couverture non obligatoire généralement incluse dans la multirisque habitation. Nous devons nous adapter rapidement, notamment en matière de tarification et de définition de la responsabilité en cas d'accident, surtout avec l'arrivée de la location en libre-service de vélos et de trottinettes. Les nouveaux modes de mobilité sont un véritable challenge. N'est-ce pas un exercice difficile ? L'un des défis majeurs auxquels les assureurs auront à répondre à l'avenir est l'évolution des besoins des clients. En se déplaçant autrement et en utilisant de moins en moins leurs voitures personnelles, certains assurés chercheront des couvertures plus adaptées. La réglementation évoluera probablement progressivement pour permettre d'offrir des assurances différenciées en fonction du kilométrage parcouru ou encore du temps d'exposition. Ce sont des choses qui existent déjà sur d'autres marchés. Ceci-dit, il est entendu que toutes ces évolutions sont liées à la qualité des infrastructures. Il ne fait pas bon de circuler à vélo ou en trottinette dans nos villes. C'est même dangereux de le faire au regard de la délinquance au volant que combat la NARSA pour rendre nos routes plus sûres. L'accès à la data est bien entendu fondamental pour accompagner toutes ces évolutions. Jusque-là, elle était l'apanage des compagnies d'assurances mais devient de plus en plus celle des constructeurs auto avec les systèmes embarqués. Ce tournant peut être dommageable aux assureurs qui, avec une data insuffisante, ne pourront pas faire face aux innovations que peuvent introduire des sociétés adossées à des constructeurs. Tesla est déjà entrée dans la course de manière agressive sur le marché américain. Il est entendu que nous en sommes encore bien loin sur notre marché local. En quoi le réseau de distribution pourrait-il être impacté par ces nouvelles tendances ? Je pense qu'il s'agit de nouvelles opportunités de développement pour le réseau de distribution. Leur business model va être de plus en plus chahuté par le développement du digital et de la vente en ligne plutôt que par les nouveaux modes de mobilité. Les assureurs marocains ont développé une très grande expertise dans la gestion des sinistres matériels. Par ailleurs, beaucoup d'innovations ont été introduites ces dernières années dans ce domaine au bénéfice de la qualité et de la rapidité du service à la clientèle. Je n'ai personnellement pas d'inquiétudes quant à la capacité de nos entreprises d'assurances à s'adapter très rapidement à ces nouveaux enjeux.