La mobilité interne obéit à la stratégie de l'entreprise en matière de gestion des carrières Plus le salarié cumule les mobilités horizontales, plus il pourra bénéficier d'une mobilité verticale, donc d'une promotion. Onparle beaucoup ces dernières années de mobilité interne et de gestion des carrières, ce qui est louable, mais essayons d'y voir un peu plus clair, particulièrement dans notre contexte. Tout d'abord, précisons que la mobilité interne ne se décrète pas, mais obéit à la stratégie de l'entreprise dans le domaine de la gestion des carrières. On ne change pas de position ou de poste au sein de l'entreprise «comme on change de chemise», sauf s'il s'agit d'une restructuration, et là , il n'y a plus de choix : on prend ce qui se présente oà1 l'on démissionne. Un moyen de fidélisation et de mobilisation Le développement de la mobilité interne est dans l'intérêt de l'entreprise comme du salarié. Elle est stratégique pour l'entreprise et constitue un moyen de fidélisation des troupes, mais également de motivation de ces dernières. L'entreprise contribue à l'employabilité de ses salariés et ces derniers saisissent cette occasion pour élargir leur horizon en matière de connaissances techniques et managériales. N'oublions pas que le plus grand danger pour un salarié est de rester dans le même emploi pendant une longue durée. La mobilité peut se produire au niveau d'une entreprise et dans un même pays, ou bien dans une même entreprise dans un autre pays. C'est le cas des multinationales, par exemple. Dans le dernier cas, on parle beaucoup plus d'expatriation ou de mobilité internationale, mais elle se fait toujours en «interne». La mobilité interne peut donc être verticale ou horizontale. Dans le premier cas, c'est généralement une promotion, donc un changement de grade dans le même emploi au sein de l'entreprise mais pour un poste plus important. La seconde concerne le changement d'emploi, à un même niveau de responsabilité, mais dans une famille professionnelle différente. Plus le salarié accumule les mobilités horizontales, plus il pourra bénéficier d'une mobilité verticale, donc d'une promotion. Ceci est logique et on le constate même en dehors du monde de l'entreprise. En matière politique, par exemple, l'ancien Premier ministre Driss Jettou, avant de briguer le poste de Premier ministre, avait à son actif le passage par plusieurs postes ministériels assez importants. Comme stipulé plus haut, la mobilité interne ne se décrète pas, il ne suffit pas de mimer ce que font les entreprises multinationales ou tout simplement faire du copier/coller des pratiques de la maison mère pour dire que l'on a une politique de mobilité interne au sein de son entreprise. Il faut tenir compte des mentalités, d'oà1 mon insistance pour qu'il y ait un véritable sentiment d'appartenance au sein de l'entreprise, donc une solide culture d'entreprise. Prenons le cas précis du Maroc. Dans certaines entreprises qui prétendent pratiquer une mobilité interne, nous assistons, côté pratique, à ce qu'on pourrait qualifier de «cinéma» (je pèse mes mots). La mobilité interne est tellement mal gérée que l'on se retrouve parfois dans des situations assez particulières. Dès qu'une personne est affectée dans un autre service, on va raconter que c'est parce qu'elle est incompétente et que «l'on est en train de la mettre de côté». Malheureusement, nous avons tendance à voir «le verre à moitié vide plutôt qu'à moitié plein». Certains responsables RH, de connivence avec la direction, prennent pour prétexte la politique de mobilité interne pratiquée au sein de l'entreprise pour muter un collaborateur dans un département donné après lui avoir fait miroiter monts et merveilles, en arguant bien sûr que c'est la politique de l'entreprise et que toute personne doit être mobile au bout d'une période qui varie entre 3 et 5 années par exemple. En matière de mobilité interne au sein d'un groupe, mais cette fois-ci à l'international, nous assistons à l'encouragement de l'expatriation d'une personne vers un pays donné, soit pour la garder – dans ce cas l'objectif est louable -, soit pour s'en débarrasser (c'est le mot) parce que cette personne est jugée «encombrante» ou, tout simplement, parce qu'elle «dérange». Je citerai dans ce sens un exemple qu'il m'a été donné de gérer en tant que médiateur. L'un des directeurs d'usine d'une multinationale de la place s'était vu offrir un poste de directeur au sein d'une filiale située dans un pays du Maghreb. Le poste était alléchant, mais ce que ce dernier avait oublié de se poser comme question, c'était tout simplement : «What next», c'est-à -dire, grosso modo, de se demander ce qu'il allait devenir après sa période d'expatriation. Résultat : le jour oà1 il a souhaité rentrer au Maroc, aucun poste n'était vacant. Il fut obligé de démissionner et de rentrer au «bercail» avec toutes les conséquences que cela impliquait aussi bien professionnellement qu'à titre personnel et familial (c'est sur ce dernier plan que ce fut le plus douloureux). Certaines personnes souhaitent rester dans leur domaine de prédilection. Par exemple, elles sont dans les ressources humaines et souhaiteraient y faire carrière. Si la mobilité interne est restreinte au niveau de cette famille professionnelle, il n'y a plus de questions à se poser. Il faut tout simplement opter pour la mobilité externe donc «aller chercher ailleurs…» Le cas le plus fréquent que l'on rencontre dans les entreprises, c'est le refus, par un responsable de département ou d'une direction, de la mutation d'un membre de son équipe au motif qu'il en a besoin. On peut comprendre, mais la question est de savoir si ce responsable a pensé un seul instant à l'avenir de son subordonné ? Ne se dit-il pas que si ce subordonné devait rester à sa place, il risquerait de mourir à petit feu ? Pour assurer la pérennité de l'entreprise, il faut, en partenariat avec la direction générale et les diverses directions, veiller à une saine mobilité interne qui contribuera à apporter du sang neuf «en interne» et au sein de tous les départements . Enfin, en guise de conclusion, il y a lieu pour le salarié de réfléchir de manière très méticuleuse avant même de changer de poste car le changement constitue une prise de risque même si ce changement est encouragé par l'employeur. Il ne faut pas que le salarié oublie que l'on ne retourne pas aussi aisément là d'oà1 l'on vient. La solution serait qu'au niveau de la charte d'entreprise ou du règlement interne, l'on puisse clairement stipuler qu'«on peut postuler en interne après une période donnée dans un poste donné, et que si l'alchimie ne fonctionne pas, eh bien on pourra tout simplement revenir à son ancien poste». Cela permettrait aux salariés de pouvoir prendre des risques, mais des «risques calculés» qui n'engendrent pas de dommages collatéraux aussi bien pour l'entreprise que pour le salarié L'employeur n'est pas en reste. Si le changement se passe mal, il se retrouve avec un poste vacant en amont, vu que le salarié qui l'occupait a été muté à un autre poste, et en aval avec un manque de compétences, puisque le même salarié à qui a été confié le poste ne «faisait pas l'affaire». La responsabilité du DRH est engagée vu qu'il n'a pas su gérer cette mobilité et que si cela venait à se répéter plusieurs fois, il en prendrait pour son grade