Lloyd's regroupe quatre syndicats appelés aussi «petites compagnies», dont chacune dispose d'un propre business-plan. Chaque année, les souscriptions totalisent 40 milliards de dollars dont 30% au titre de la réassurance. Le format CFC est un écosystème idéal pour Lloyd's qui est également un écosystème. Lloyd's of London, compagnie britannique d'assurance et de réassurance, ouvre un bureau au Maroc. La compagnie entend développer une stratégie régionale à partir du Royaume. Le marché marocain dispose d'un fort potentiel pour l'offre pour la couverture de risques spécifiques comme les catastrophes naturelles ou encore le terrorisme. Sa présidente Inga Beale explique les métiers de la compagnie, fait une analyse de la situation du marché mondial et partage les raisons de la présence dans le Royaume. Llyod's of London est une compagnie un peu spéciale dans la mesure où elle s'apparente plus à une bourse qu'à une société commerciale, comment est-elle structurée ? C'est beaucoup plus qu'une bourse dans la mesure où à la bourse le risque est transféré, alors que dans le cas de la réassurance le risque reste dans le marché. Au niveau structurel, nous avons quatre syndicats que l'on peut également appeler petites compagnies dont chacune dispose d'un propre business-plan que nous validons au niveau de Llyod's qui accorde le capital à ces syndicats pour qu'ils puissent réaliser leur business-plan. Mais, Lloyd's ne fait pas que donner des fonds dans la mesure où nous octroyons les licences d'exercice pour l'assurance et la réassurance. Tout comme nous fixons le cadre réglementaire pour que les petites compagnies partenaires exercent leur activité. Nous avons octroyé des licences dans deux cent pays de par le monde. Il est à préciser que ces petites compagnies ou syndicats appartiennent à de grands groupes ou bien de grandes entreprises. Toutefois, leur capital est déposé auprès de Lloyd's. Par ailleurs, nos partenaires sont tenus, pour des raisons d'équilibre financier, de verser une prime annuelle à un fonds central que nous gérons directement. C'est une sorte de fonds de réserves ou bien de garantie qui peut servir en cas de difficultés financières des syndicats. Il faut également souligner que la licence que nous accordons est aussi un label et de la sorte la police d'assurance qui est délivrée est une police Lloyd's, ce qui signifie que nous partageons le risque. Quels types de prestations et couvertures offrez-vous ? Pour quelle demande ? Chaque année, nous réalisons des souscriptions de l'ordre de 40 milliards de dollars dont 30% au titre de la réassurance. Notre portefeuille est constitué de grandes entreprises et de grands groupes. Concernant les prestations et couvertures, nous avons des produits d'assurance pour risques dans les domaines de l'aviation, la marine, l'énergie, le terrorisme, la violence politique, la responsabilité professionnelle des grandes entreprises qui interviennent dans les activités et les métiers à grands risques. Par ailleurs, nous sommes le leader sur le marché de la réassurance des catastrophes naturelles. Alors, justement, comment se présente le marché mondial de la réassurance ? C'est un marché très concurrentiel parce qu'il y a eu, durant ces dernières années, de gros investissements qui ont été injectés dans le secteur. Et même des opérateurs qui n'ont jamais fait de la réassurance se sont introduits sur ce marché. Et ceci s'explique par le fait qu'il y a un rapide retour sur investissement. Soit 9% annuellement. Cet engouement pour la réassurance et la vive concurrence sur le marché ont engendré une forte pression sur les tarifs et ont même tiré les prix vers le bas. Donc tous les opérateurs ont dû faire des efforts sur leurs marges et sur leurs profits. Pour notre part, nous faisons des efforts pour la compression des coûts. D'autre part, pour nous démarquer de la concurrence et bien nous positionner, Llyod's a effectué un investissement de 300 millions de dollars pour la numérisation et la digitalisation. Nous avons mis en place un plan d'action s'étalant sur cinq ans, soit 2015-2020, et, à terme, Lloyd's à Londres sera le premier opérateur et le plus avancé aussi dans le domaine de la technologie de l'assurance. Mais, entre-temps, il y a eu le Brexit en janvier 2019. Quels seraient ses impacts sur l'activité de Lloyd's ? Nous réalisons 50% de notre activité sur les marchés de l'Amérique du Nord, notamment les Etats-Unis et le Canada. Et 10% de notre business se fait dans les pays de l'Union Européenne. Après le Brexit nous n'allons plus délivrer de licences. Mais nous allons créer une entité à Bruxelles, et, de ce fait, tout le volume d'affaires des 27 pays membres de l'Union Européenne se fera par cette succursale de Bruxelles. Les clients vont être réassurés par des petites compagnies à Londres, mais cela passera par Bruxelles. La nouvelle entité a nécessité la création de 40 emplois. Nous comptons réduire l'impact de Brexit auprès de nos courtiers. Pourquoi ouvrir un bureau au Maroc? Quel regard portez-vous sur ce marché et son potentiel ? Pour nous le Maroc est un entonnoir pour l'Afrique de l'Ouest, ainsi que l'Afrique du Nord. Nous sommes confiants pour le marché marocain car nous pensons que le gouvernement va œuvrer pour que le Maroc devienne le hub de l'assurance qui nous permettra de nous positionner en Afrique de l'Ouest. Aujourd'hui, il y a un fort potentiel dans la mesure où une économie en croissance nécessite des investissements de tout ordre et surtout en infrastructures. Pour cela, il faut une offre de produits de couverture spécialisée. En ce qui concerne le cadre, le format CFC est un écosystème idéal pour Lloyd's qui est également un écosystème. Et pour développer cet écosystème, nous pensons que les réformes législatives ainsi que les réglementations en matière d'assurance qui sont menées au Maroc constituent un atout majeur. Avez-vous des clients dans le Royaume ? Qui sont-ils ? Oui, nous avons des partenaires au Maroc notamment la SCR et nous réassurons des compagnies locales. Mais je préfère ne pas donner de noms... Quels sont les risques à réassurer au Maroc ? Pour le Maroc, nous offrons les mêmes prestations et les couvertures que nous garantissons déjà dans le monde. Par ailleurs, on peut souligner qu'au Maroc, on peut réassurer les risques de catastrophes naturelles et aussi ceux liés au terrorisme. Nous pensons que c'est une région qui peut être exposée à ce type de risques. Aussi, il y a les risques énergétiques puisque le pays a développé des investissements dans le secteur des énergies renouvelables. De nouveaux risques émergent pour les opérateurs de l'assurance et de la réassurance. Quelles sont selon vous les natures de risques qu'il faut systématiquement couvrir en priorité ? Nous pensons qu'il y a une recrudescence des risques dans le domaine de cyber sécurité. Nous souscrivons des primes de l'ordre de 1 milliard de dollars dans la cybernétique. Nous avons l'expertise requise et nous pouvons développer des partenariats avec des opérateurs locaux et proposer de nouveaux produits pour le marché marocain. Ce sera notre valeur ajoutée. Le développement de produits adaptés pour la couverture des nouveaux risques est important car globalement on peut dire que l'assurance demeure sous estimée alors qu'en fait elle est une valeur précieuse. Et j'aime dire que chez Lloyd's, il s'agit d'un facteur de progrès humain.