La contrefaçon touche tous les produits alimentaires et non alimentaires, de la nourriture pour bébé aux détergents, en passant par le lait, l'huile, le café, le thé, les boissons alcoolisées... Ces imitations importées ou fabriquées localement représentent 10% des produits non alimentaires et 5% des produits alimentaires vendus sur le marché. Les produits sont introduits légalement par des importateurs et commercialisés dans le circuit formel. De plus en plus de produits alimentaires et non alimentaires contrefaits se retrouvent sur le marché. De la nourriture pour bébé aux détergents, en passant par le lait, l'huile, le café, le thé, les fromages, les biscuits, le thon, les jus et les boissons alcoolisées, presque toutes les familles de produits, fabriqués localement ou importés, sont touchées. «Tout ce qui se vend bien intéresse les fraudeurs», déclare Moncef Belkhayat, président de l'Association Tijara 2020 et PDG du Groupe Dislog spécialisé dans la distribution de produits de consommation courante. Les quantités écoulées sur le marché national sont estimées à 10% du volume global des produits non alimentaires (produits d'entretien, outils...) et 5% des produits alimentaires. Naturellement, les saisies effectuées par l'Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA) «augmente significativement», selon un directeur au sein de l'office. Cependant, ces quantités ne représentent qu'une faible part de ce qui est écoulé sur le marché. Et pour cause, le service de communication de l'office explique en substance que la saisie des produits contrefaits ne relève pas de ses prérogatives puisque le contrôle concerne principalement la date de péremption et l'adéquation du contenant avec ce qui est mentionné sur l'emballage. Cependant, «dans le cadre de ces contrôles que nous menons, nous trouvons des produits contrefaits qui ne répondent pas aux normes sanitaires», informe notre source. En réalité, la mission de lutte contre la contrefaçon est dévolue à la Douane et à l'Office marocain de la propriété industrielle et commerciale (OMPIC). Ces organismes doivent effectuer «un contrôle aux frontières, sur les lieux de production et dans les points de vente, mais surtout mettre en place des dispositifs légaux à mème de réduire ce fléau», est-il expliqué. Une menace pour la santé Les produits contrefaits proviennent de trois sources principales. D'abord, des pays asiatiques, principalement la Chine, l'Indonésie et les Emirats Arabes Unis (Jebel Ali). «Les fraudeurs utilisent le même code couleur, la typographie, la forme de l'étiquette du produit authentique. Pire, ils mentionnent les mêmes informations figurant sur les vrais produits, en l'occurrence les composants ainsi que le nom de la société productrice et importatrice», déclare Lucien Leuwenkroon, directeur général de Top Classe. Pour réaliser des bénéfices importants, les fraudeurs se passent des matières onéreuses utilisées pour le produit authentique. D'où le risque pour la santé du consommateur. Deuxième source, la fabrication locale. «Il s'agit des petits ateliers de contrefaçon, souvent installés dans l'Oriental, la région de Fès-Meknès mais aussi à Casablanca», explique M. Leuwenkroon. Ces faussaires imitent des produits locaux très prisés. En guise d'exemple, les marques de thon Mario et Joly sont très touchées, de même que le thé Sultan. «Le thé de contrebande provient du Sud, principalement de Mauritanie. Ces produits importés en vrac sont ensuite conditionnés dans des emballages de marques connues et demandées», souligne Moncef Belkhayat. La troisième catégorie est la plus nocive pour la santé. «Ce sont des produits dont la date de péremption est dépassée et qui sont remis dans de nouveaux emballages avec une nouvelle date», déclare-t-on à l'ONSSA. On les retrouve beaucoup en milieu rural et dans les petites villes, mais aussi dans des marchés tels que Derb Ghalef, à Casablanca, et même dans les épiceries du coin, voire la grande distribution. Des fournisseurs parfois indélicats La différence de prix est relativement importante sur le marché parallèle et dans les petites villes. Par contre, les étiquettes sont identiques dans le circuit officiel. La raison est que ces produits sont introduits légalement -c'est-à-dire selon la procédure requise- sur le marché par des grossistes et des importateurs qui exploitent une faille procédurale. «Les producteurs locaux n'ont pas un système de traçabilité permettant de suivre leur produit puisqu'il n'est pas imposé par les autorités. Ils diversifient aussi les circuits de commercialisation», explique un expert. On comprend par là qu'un même fournisseur peut mélanger des produits d'origines diverses sans susciter de soupçon. «Tant qu'ils nous livrent des factures nous ne pouvons pas douter de l'origine du produit», confirme un opérateur de la grande distribution. Le problème est plus complexe pour les produits importants. En effet, les contrats d'exclusivité de distribution de marques internationales au Maroc sont presque sans objet. «La Direction des douanes ne reconnaît pas les contrats d'exclusivité commerciale. Par conséquent, il est permis qu'un autre importateur introduise et commercialise la même marque sur le marché national», regrette M. Belkhayat. Aujourd'hui, les dossiers de la traçabilité et de l'exclusivité commerciale sont des priorités pour l'Association Tijara 2020 qui regroupe les plus gros producteurs et importateurs du marché. Objectif : juguler la fraude qui gangrène le secteur commercial. [tabs][tab title ="La contrefaçon pèse entre 0,7% et 1,3% du PIB"]Selon une étude réalisée en 2012 par le Comité national pour la propriété industrielle et anti-corruption (CONPIAC), la contrefaçon sur le marché marocain pèse entre 6 et 12 milliards de DH, soit 0,7% à 1,3% du PIB. Elle génère une perte fiscale annuelle de près d'un milliard de DH et détruit près de 30 000 emplois. Les produits les plus exposés sont le textile, les pièces de voitures, l'appareillage électrique et les produits d'hygiène et cosmétiques. Pour se prémunir de la contrefaçon, les entreprises peuvent s'appuyer sur la loi 23-13 modifiant et complétant la loi 17-97 relative à la protection de la propriété industrielle. Elles peuvent protéger leurs créations et innovations auprès de l'OMPIC à travers l'enregistrement des marques et brevets d'invention. Une deuxième mesure préventive est la demande d'intervention aux frontières adressée à la Douane. Durant la période 2006-2015, 3 828 demandes ont été traitées et 1 116 décisions de suspension de marchandises contrefaites prononcées. Les faussaires peuvent aussi être poursuivis auprès des tribunaux.[/tab][/tabs]