Dans un article publié par le journal britannique The Independent, l'écrivain britannique, Robert Fisk, spécialiste du Moyen-Orient, se demande comment des révolutionnaires épris de liberté, qui se sont soulevés le 25 Janvier contre le régime de Moubarak, approuvent aujourd'hui le coup d'Etat militaire mené par l'armée égyptienne contre le président élu, Mohamed Morsi.Pour Fisk, l'aspect le plus triste et le plus tragique réside dans la perception que se font les masses en liesses de la place Tahrir vis à vis des autres masses pro-Morsi qui se sont rassemblées à la place Rabiaa Al Aadaouiya et dont l'afflux ressemble à des supporters se rendant à un match de football. Les premiers assimilent les seconds à des terroristes et ne les considèrent pas comme des manifestants pacifistes venant soutenir leur président élu démocratiquement. Un président déchu par l'armée depuis près de quatre semaines. Fisk souligne que le ministre de la défense, le général Abdel Fattah al-Sissi est perçu aujourd'hui comme le sauveur de l'Egypte, capable de rétablir le pays sur la bonne voie, ce qui est en parfaite contradiction avec la détention arbitraire du premier président égyptien élu démocratiquement dans l'histoire de l'Egypte contemporaine. Il a ajouté que les scènes montrant des portraits de Sissi hissés par ceux-là même qui ont renversé le régime de Moubarak en 2011 sont tristes et frustrantes. Fisk a remarqué lors des manifestations du vendredi qu'un grand nombre de pauvres et de gens modestes soutenaient le Président Morsi, tandis que les nantis se sont rangés du côté des putchistes. Fisk a ajouté que des centaines de milliers ont campé Place Rabiaa Al Aadaouiya pour dénoncer le coup d'Etat militaire qui n'est pas qualifié comme tel en Egypte! Il a relevé l'«étrange» contradiction entre des avions militaires qui saluent les foules de la place Tahrir, tandis que la police anti-émeute se dressent face aux manifestants demandant la restitution du président légitime du pays. Fisk a également apprécié le moral élevé des manifestants pro-Morsi qui, malgré la politique des deux poids deux mesures conduites à leur encontre par l'armée, continuent de croire à leur combat et refusent d'admettre le fait accompli. Fisk a noté que les manifestants de la place Rabiaa Al Aadaouiya continuent de protester assis à même le sol en lisant le Coran même s'ils sont menacés par une probable intervention des forces de sécurité pour démanteler leur campement. L'intellectuel britannique prévoit un avenir troubles pour l'Egypte à cause de la profonde scission qui caractérise aujourd'hui la rue égyptienne entre partisans du putch et défenseurs de la légitimité du président déchu.