Le carnaval annuel du préside occupé Sebta, organisé au tout début de la semaine dernière, a failli déborder vers des dérapages aux conséquences imprévisibles. Une chanson outrageusement raciste et haineuse envers les musulmans a été entonnée par un contingent de policiers locaux au vu et au su de tous les Sebtaouis de cette localité. Un racisme sans détour qui se produit de surcroît dans nos murs et sur notre territoire que l'Espagne occupe toujours et encore. Depuis le début de l'année, l'ambiance est à l'escalade dans les deux présides occupés Sebta et Melilia. Et pour cause, l'Espagne de José Luis Rodriguez Zapatero a plus de griefs à l'encontre du Maroc que de propositions de coopération pour un voisinage apaisé, intelligent et fructueux. Il se trouve que depuis ces deux dernier mois, la limite du diplomatiquement supportable a été largement dépassée. De la dernière visite provocante du Premier ministre espagnol à Sebta et à Melilia en fin du mois de janvier 2006, les officiels espagnols de Sebta reviennent à la charge pour pousser l'insolence, inadmissible, jusqu'à son extrême. La haine à l'état pur. Le racisme dans toutes ses manifestations les plus abjectes, dans ses débordements les plus hideux. Une violence raciale ouverte particulièrement contre les musulmans de cette localité lors de la tenue du carnaval annuel de la chanson au tout début de la semaine dernière. Une goutte de plus après un fleuve d'intimidations, de provocations et d'humiliations des Espagnols envers les Marocains musulmans des deux villes colonisées. Tout est parti d'une chanson raciste et haineuse entonnée par un contingent de policiers qui ont parcouru les rues de l'enclave. La chanson blasphématoire, composée par un policier local, rappelle, si besoin est, les premières exactions commises par les milices nazies contre les juifs de l'Allemagne hitlérienne. Extraits : « Hitler a mal fait en tentant d'exterminer les juifs au lieu des musulmans » . Par sa faute, dit encore le texte d'un acharnement sans précédent : « Je me retrouve ici désarmé et en train de rendre la joue aux Arabes, mais je préfère mourir debout que de vivre à genoux… », dit la chanson en paraphrasant le célèbre slogan du révolutionnaire Che Guevara. Ou encore : « J'ai ouvert le livre des animaux, pour voir si les musulmans sont des animaux rationnels, j'ai vu que ces gens et les bovins sont pareils, et je n'ai plus eu de doute : ce sont bien des animaux ». Jouant sur la phobie entretenue à Sebta et Melilia sur le risque d'être dépassés en nombre par la population musulmane, appel est lancé à la population "chrétienne" pour renoncer à l'usage des "préservatifs" dans leur vie conjugale car, cri d'alerte, : "les deux populations sont déjà à égalité". Dérapages imprévisibles Si la provocation est généralement vendeuse, le blasphème s'avère l'être encore plus en ces temps-ci. Car il n'en fallait pas plus pour qu'un carnaval qui pouvait bien se dérouler dans la joie et de la bonne humeur, risquait bel et bien de s'enflammer pour prendre d'autres proportions et des dérapages aux conséquences imprévisibles. L'indignation a été à son comble, d'autant plus que le pot-pourri ouvertement raciste et fasciste a obtenu le premier prix des meilleures paroles et meilleur déguisement au cours de cette manifestation. Après l'histoire des caricatures infamantes des journaux danois, nous revoilà une fois encore replongés dans ce fameux choc des civilisations d'incommunicabilité totale des cultures, sur fond de racisme et d'offense préméditée aux croyances les plus ancrées, sous prétexte de liberté. Une liberté fondamentalement liberticide, comme pour faire écho au fondamentalisme totalitaire. Un racisme sans détour qui se produit de surcroît dans nos murs et sur notre territoire que l'Espagne occupe toujours et encore. Une sorte de volcan en ébullition qui s'est explosé à la figure des Sebtaouis musulmans insultés dans leur propre ethnie et leur appartenance religieuse. La traînée de poudre qui avait pris une telle dimension a suscité immédiatement des réactions. Son unique manifestation en surface, bien qu'elle soit trop timide, est purement associative. Vendredi 10 mars dernier, un collectif d'associations musulmanes, qui regroupe près de 15 ONG, a organisé une grande marche à Sebta sous le thème « pour la cohabitation et contre le racisme ». «Un grand nombre de partis, d'associations culturelles et d'organisations sociales ont adhéré à cet appel parce qu'ils considèrent que la cohabitation et la cohésion sont indispensables », a déclaré Mohamed Ali Lemague, président de l'Union Démocratique Sebtie (UDCE), principal parti d'opposition dans l'enclave de Sebta qui compte trois députés musulmans à l'assemblée locale. La parade de containment par la société civile ne porterait pas certainement ces fruits, le même collectif, agissant légalement à Sebta, a décidé, selon Mohamed Ali Lemague, de porter plainte contre le compositeur de la chanson ainsi que les organisateurs du festival. Le parti de l'Union des Musulmans de Sebta a lui aussi adhéré à cette action et il a prévu d'organiser une autre marche pour dénoncer, dit-il, « toutes les parties qui ont soutenu cette attaque raciste » contre les musulmans du préside occupé. L'insulte était trop flagrante pour qu'elle passe inaperçue. Affaire à suivre.