BIO EXPRESS D'un verbe facile et d'un style entreprenant, Ahmed Chawki Benyoub est un militant passionné. Né le 20 juillet 1957 à Marrakech, il obtient une licence en droit public de la Faculté des sciences juridiques, économiques et sociales de Rabat en 1984. Avocat, chargé de mission au sein de l'Observatoire National des Droits de l'Enfant) et membre du Conseil Consultatif des Droits de l'Homme, M. Benyoub a, entre autres, occupé la fonction de vice-président de l'Organisation Marocaine des Droits de l'Homme. Militant de longue date, ancien détenu et en bon citoyen, Chawki Benyoub n'a pas cessé de lutter pour la réhabilitation des victimes et militer pour un Maroc démocratique et moderne. Ahmed Chawki Benyoub est également l'auteur de plusieurs publications, dont “Les droits de l'Homme et les questions de la transition démocratique au Maroc” (ouvrage collectif en arabe) et "Les institutions nationales de défense et de protection des droits de l'Homme". Il est aussi l'auteur d'un ouvrage sur "Les disparitions et la jurisprudence marocaine". Historique ! C'est in-contestablement le mot ad hoc pour qualifier le discours prononcé ven-dredi dernier par SM le Roi Mohammed VI. Ce discours, à l'occasion de la présentation du rapport sur “50 années de développement humain” et le rapport de l'IER, est la ligne de démarcation, aussi claire que définitive entre deux moments de notre histoire contemporaine. D'une part, un demi-siècle d'espoirs tronqués et de douleurs, de ratages et d'hésitations et de moments de fulgurance ou d'enchantement. Et, d'autre part, un instant de cheminement vers un nouvel Etat démocratique afin de relever les défis de la réforme et donc asseoir les bases d'un Etat d'institutions et de primauté de droit ; le tout dans le cadre d'une monarchie citoyenne. Les 50 ans de militantisme pour l'intégrité territoriale, la démocratie et le développement ont, sans aucun doute, trouvé dans les termes du discours leurs manifestations les plus nuancées et les plus résolues. La haute volonté ainsi exprimée réhabilite également l'Histoire en tant que science. Tout esprit attentif et objectif relèvera indéniablement que la responsabilité de l'Etat est clairement établie, sous trois formes au moins. D'abord, l'Etat reconnaît, explicitement d'ailleurs, les violations qui ont eu lieu tout au long de notre histoire contemporaine. Il va sans dire que ce processus enclenché depuis le début des années 90 n'aurait jamais vu le jour en dehors d'une volonté politique déterminée. D'un autre côté, la demande officielle et solennelle du pardon de par l'Etat fait l'objet d'une recommandation que le Premier ministre mettra à exécution très prochainement devant les représentants de la Nation. Le dernier aspect de la responsabilité de l'Etat réside dans la réhabilitation des victimes et des ayants droit. Aussi, est-il important de mettre l'accent sur l'insistance royale à donner un sens urgent et immédiat à la prévention contre le retour du passé. " Plus jamais ça " est, justement inscrit dans une logique de réforme politique et institutionnelle que Sa Majesté veut profonde. L'un des moments forts du discours est incontestablement le rapport établi entre, d'une part, l'émancipation du joug du passé et de ses boulets et, d'autre part, le cheminement vers l'avenir en s'attaquant aux déficits socio-économiques. Ce n'est donc pas par hasard que ce discours survient à la veille de la célébration du 11 janvier, l'anniversaire du Manifeste pour l'Indépendance. Osons le dire, avec tout l'orgueil qu'on a : nous sommes aussi à la veille d'entamer le deuxième volet dudit manifeste, longuement reporté, à savoir le volet du développement économique, social et culturel. Pour la petite histoire, un de mes camarades de la gauche m'a soufflé ce commentaire qui ne manque pas de panache et d'humour " En fait ne, sommes- nous pas en train de vivre la concrétisation des objectifs de la révolution nationale démocratique ? ", ce concept si cher à la gauche radicale ! L'accent a été également mis sur la nécessité du changement dans la continuité, autant le développement s'impose en tant que priorité, autant le devoir de mémoire reste vivace et, lui aussi, incontournable. C'est dire l'exemplarité du modèle marocain en matière de la justice transitionnelle. D'ailleurs, je me souviens que j'étais présent dans un séminaire mondial organisé justement par le Centre international de la justice transitionnelle et que le représentant du Pérou a tenu ces propos : " Les violations graves des droits de l'Homme sont aussi une part entière de la richesse d'un peuple que du degré de son endurance ". J'avoue, qu'à l'époque, je n'avais pas saisi toute la portée de cette phrase. En écoutant le discours, l'idée est devenue très claire dans mon esprit. Il suffit, effectivement, de regarder le parterre des invités et des personnes présentes pour mesurer le sens du discours : de la famille Douraydi à la famille Manouzi, en passant par les détenus d'Agdaz, de Kallat M'gouna ou encore tout le gotha politique et les composantes de la société civile et des FAR pour se rendre compte de la grandeur et de la solennité du moment. Le mot historique prendra alors son vrai sens.