Farid Essabar, le hacker marocain inculpé pour piratage informatique La jeunesse marocaine fait encore parler d'elle en matière de piratage informatique. Le 25 août dernier, un jeune hacker, du nom de Farid Essabar, a été neutralisé à Rabat par la police marocaine, aidée par le FBI, pour intrusion informatique dans plusieurs sites américains. Agé d'à peine 18 ans, il aurait déjoué les codes d'accès des systèmes de protection de la célèbre firme américaine Microsoft. Il a à peine 18 ans et il a fait l'objet d'une chasse à l'homme toute particulière, dirigée par le FBI, la police marocaine et Microsoft, pour avoir "craké" plusieurs sites et serveurs de sociétés américaines et piraté leurs contenus. Le 25 août dernier, au quartier Yakoub Al Mansour de Rabat, le jeune homme, est tombé tout bêtement dans les filets de la police marocaine qui a mobilisé contre lui tout ce qu'il y a de meilleur dans la toute nouvelle brigade de lutte contre la cybercriminalité relevant de la DGSN. Depuis le temps, le jeune homme fait la une des journaux marocains, communiqué du FBI et de la MAP à l'appui, et relance le débat sur le piratage informatique et la communication cybernétique au Maroc. Et parallèlement, une campagne de soutien et de dénonciation des hackers et des internautes est organisée, à l'échelle planétaire, sur plusieurs sites Internet en faveur de leur compagnon derrière les barreaux à la prison civile de Salé. Qui est ce jeune hacker marocain ? Pourquoi a-t-il déclenché contre lui toute cette machine sécuritaire et judiciaire ? En quoi était-il une menace jugée extrêmement périlleuse pour le Maroc et les autres pays victimes de ses agissements criminels ? Le prix pour défier Windows Il a deux patronymes, l'un pour l'identité nationale, l'autre, comme tous les hackers et les internautes, en guise de nom de guerre. Au Maroc, il porte le nom de Farid Essabar, un jeune lycéen sans histoire, né en Russie de père marocain et de mère russe divorcés il y a quelques années. Dans le monde virtuel, il navigue sous le pseudonyme de Diablo. Selon les premiers éléments de l'enquête policière, Farid Essabar s'est révélé avoir une capacité extraordinaire à déjouer les noms de code à travers les frontières cybernétiques les plus hermétiques. Les années passées en Russie Farid Essabar les a consacrées pour peaufiner ses connaissances en informatique et pour assimiler les enseignements fondamentaux de cette activité illicite. Il prend goût à la souris, au chat et au piratage informatique. Il devient vite accro. Il passait des journées entières scotché devant son ordinateur. En quelques années, il deviendra un virtuose de la communication cybernétique. Et se découvre parallèlement une vocation de hacker. En plus clair, un technicien de haut vol du piratage informatique. Un phénomène qui s'est internationalisé avec ses coutumes, ses défis, ses lois, et bien évidemment, ses hommes. Farid Essabar s'est pris finalement au jeu. Une solide amitié avec un hacker chevronné qui a décelé chez lui une aptitude et une prédisposition exceptionnelle dans le domaine du piratage. Avec son complice turque, Attila Ekici, qui a été interpellé la même journée en Turquie grâce à une opération supervisée par la police fédérale américaine, il fera un duo de choc pour faire tomber les sites et les serveurs les plus sécurisés dans le monde. De retour au Maroc, Farid Essabar, gardera toujours, grâce à l'Internet, un contact permanent avec son compagnon avec qui il décidera de passer à la vitesse supérieure : la conception et la fabrication de plusieurs virus capables de forcer les systèmes de protection des sites les plus infranchissables des Etats-Unis. Leur cible n'est que la firme Microsoft de l'américain Bill Gates et son système de protection le Windows 2000 et le XP. Un jeu qui devient une passion Farid Essabar accepte volontiers le contrat et se réfugie chez sa tante qui dispose d'une ligne Internet, donc d'une adresse IP, pour la confection et la fabrication. Pour cela, il lui a suffi de quelques jours, grâce à des connexions avec des hackers britanniques, d'accoucher d'un virus auquel il donne le nom de code de "Mytob". Celui-ci, révèlent quelques sources, est un procédé qui obéit uniquement aux ordres de son concepteur et qui consiste en une multitude de systèmes qui agissent de concert pour attaquer des cibles bien précises. Envoyé à son complice turc, grâce toujours à Internet, celui-ci le développe davantage et lui trouve un autre nom de code "Zotob" avant de l'expédier dans la nature à plusieurs entreprises, médias, grandes multinationales américaines. Une cybercriminalité somme toute banale si les serveurs attaqués n'appartenaient à des firmes des plus puissantes aux Etats-Unis : CNN, ABC, l'aéroport international de San Francisco, Daimler Chrysler…, qui ont été endommagés et paralysés pendant plusieurs heures occasionnant au passage des pertes inestimables aux sociétés attaquées. Pour paralyser un site, Farid Essabar et son complice turc ont conçu ce type de virus qui bombarde farouchement les sociétés ciblées de requêtes en vue de faire tomber leurs sites. Une fois l'opération est effectuée, les deux hackers n'ont plus qu'à se servir des données ( on n'est jamais mieux servi que par soi même ) soit pour les vendre aux concurrents, en utilisant le chantage et le racket, soit tout simplement pour mettre les sites visés hors d'état de marche. Le jeu devient ainsi passion et le chat débouche sur le crime. " Ces attaques auraient coûté plusieurs millions de dollars américains, de dommages et de manque à gagner aux entreprises piratées", note une source proche de l'enquête à Rabat. Un crime très dangereux qui va provoquer à la fois l'ire des services de la police fédérale et de la firme américaine Microsoft. Plaintes des sociétés agressées, alerte au niveau de Microsoft, et s'en suit immédiatement une chasse à l'homme à l'échelle planétaire. Il n'a fallu aux spécialistes de Microsoft que quelques jours pour identifier la source, l'adresse et le lieu d'où provenait le virus Zotob qui a osé défier les systèmes de protection Windows de la firme américaine. Deux adresses sont vite identifiées : le Maroc ainsi que la Turquie. Le FBI se mobilise et déploie les moyens qu'il faut pour arrêter les coupables. Leur antenne à Rabat, qui siège à l'ambassade américaine, servira de relais efficace, dans le cadre de la coopération bilatérale en matière d'anti-criminalité, pour interpeller le ou les hackers marocains suspectés. Microsoft a été également de la partie, par le biais de sa filiale nord-Afrique, qui a déclenché les poursuites au Maroc. Peines de prison Une cellule relevant de la brigade de lutte contre la cybercriminalité de la DGSN est mobilisée pour la circonstance ainsi que les éléments de la sûreté de la wilaya de police de Rabat. Le suspect est identifié, grâce à l'adresse IP communiquée par Maroc Telecom, sans pour autant ordonner l'assaut. Selon les informations précieuses obtenues des Etats-Unis, le pirate marocain bénéfice d'une aide logistique en Turquie, et il faudra neutraliser en même temps les deux suspects par crainte que Farid Essabar avertisse son compagnon de route. Le coup de filet a été ainsi opéré et réussi simultanément dans les deux pays, preuves et pièces à conviction à l'appui, et les deux présumés pirates ont été ainsi neutralisés. Le Marocain Farid Essabar comme le Turc Attila Ekici ont été reconnus coupables de faits avérés et encourent des peines de prison ferme selon les dispositions et les lois en vigueur dans les deux pays. Farid Essabar, explique une source judiciaire, risque gros si sa culpabilité est démontrée dans cette affaire. Selon le code de procédure pénale, il est passible d'une peine allant de cinq à dix ans de prison ferme ( article 294 du CPP ) si les juges retiennent l'association de malfaiteurs ( l'un de ses complices marocains vient juste d'être arrêté à Rabat et le délit d'intrusion informatique. L'audience aura lieu le 13 septembre prochain.