Chez un pasteur à Rabat Les portes des églises au Maroc comme ailleurs, sont toujours grandes ouvertes. Que vous soyez chrétien, musulman, juif ou agnostique, vous pouvez toujours vous y arrêter. Pour une visite, une prière ou une simple discussion avec le pasteur… Nous l'avons fait. Par curiosité, mais par intérêt surtout. Nous nous sommes rendus à l'une des églises de Rabat, soupçonnée par les autorités marocaines de pratiquer le prosélytisme chrétien. Le pasteur reçoit sur rendez-vous. Il est ponctuel, souriant. Devant une personne qui a des doutes concernant ses choix religieux, le pasteur qui nous a reçu se montre pour le moins serein. Pas de conclusions hâtives, ni de conseils trop précipités. Pas question non plus de brusquer les croyances de son hôte ou de profiter de l'occasion pour vite influencer ses choix. Le pasteur commence par poser des questions. Des petits détails “techniques” concernant la vie de tous les jours. Les études, le travail, la profession des parents, les frères et sœurs, les amis, d'éventuels problèmes liés à l'entourage… tout ce qui pourrait l'aider à comprendre la personne en face de lui et ce qui l'aurait poussée à se réfugier dans une église, dans le bureau d'un pasteur. Peu à peu, les questions du pasteur deviennent plus abstraites. Presque incompréhensibles. “Comment te sens-tu dans ton cœur propre ?”, nous a t-il d'abord demandé. Ce sera la transition pour plonger dans des réflexions spirituelles, mais pas spécialement chrétiennes. “Est-ce que tu pries ? Est-ce que tu parles avec Dieu ?”. Le pasteur nous conseillera donc tout d'abord de parler avec Dieu. De prier beaucoup “comme tu le sens”. C'est-à-dire prier selon les principes de n'importe quelle religion. L'essentiel étant de s'adresser à Dieu. Parler à Jésus Les conseils du pasteur qui ont suivi ces questions vont tous dans le même sens. “Dieu t'aime et il a un projet pour toi. Il faut lui parler beaucoup, il faut prier beaucoup. Il faut aussi parler à Jésus”. Cette dernière phrase aura été la première prononcée avec un référentiel chrétien. Oui mais comment ? “Jésus est parmi nous. Il est avec nous. Tu peux lui parler à tout moment comme tu me parles maintenant”, nous expliquera le pasteur qui nous a tout de même conseillé la discrétion. “Tu es tout à fait libre de choisir ta foi. Tu as le droit de choisir en quoi et en qui croire. Mais il faut rester discret, comme quand tu viens dans une église par exemple..”. C'est que le tout se fait dans la discrétion totale. En effet, les Marocains chrétiens sont tous orthodoxes. “Il n'existe aucun Marocain catholique”, nous a confirmé un homme religieux dans une église casablancaise. D'abord parce que l'église catholique est plus stricte quant à la conversion au Catholicisme, ensuite parce que les missionnaires évangéliques au Maroc appartiennent pour la plupart au courant orthodoxe. Ainsi, il est plus facile pour les Orthodoxes, qui ne croient pas en l'autorité des hommes religieux, de se contenter de pratiquer leur religion en toute discrétion à la maison.