À l'échelle mondiale, quatre micronutriments (le fer, l'iode et les vitamines A et D) ont été identifiés comme étant d'intérêt prioritaire par l'Organisation mondiale de la santé. Au Maroc comme ailleurs dans les pays en développement, une proportion alarmante de la population souffre de diverses carences alimentaires, mais est particulièrement affectée par un manque au niveau de ces quatre éléments essentiels. Quels rôles jouent ces quatre inconnues et pourquoi sont-elles si importantes? Le fer Selon une enquête nationale réalisée par le ministère de la Santé en 1994, c'est plus de 40 % des femmes enceintes qui souffrent d'une carence en fer. À ce nombre vient s'ajouter plus d'un tiers des femmes en âge de procréer et des enfants de 6 mois à 5 ans. Bien que moins touchés, les hommes marocains ne sont pas à l'abri, puisque 10 % d'entre eux souffrent, selon l'étude, d'anémie ferriprive (anémie par carence en fer). “Le fer est indispensable pour le fonctionnement des globules rouges [qui véhiculent l'oxygène dans le sang]“, explique le professeur Habiba Hadj Khalifa, chef du service de pédiatrie 3 à l'hôpital d'enfants du C.H.U. Ibn Rochd de Casablanca. “Il y a encore des gens qui disent qu'il ne faut pas donner de viande aux enfants, et ça c'est faux“, ajoute-t-elle. À partir de 6 mois, on devrait graduellement introduire chez l'enfant une alimentation variée. Une carence en fer se traduit par une augmentation de la fatigue et de l'apathie ainsi qu'une diminution de la productivité, des défenses immunitaires et de la capacité d'apprentissage. L'anémie peut aussi engendrer des complications pendant la grossesse, augmenter les risques d'avortement spontané, et causer chez l'enfant un retard du développement psychomoteur. L'allaitement maternel jusqu'à l'âge de 6 mois ainsi que la consommation d'aliments riches en fer - poisson, viande, œufs, farine enrichie, légumes secs et à feuilles vertes- permettent de prévenir une carence en fer. Certains aliments, par exemple le thé et le café, empêchent l'absorption du fer par l'organisme, et ne sont donc pas recommandés pour les enfants. L'iode La prévalence des carences en iode au Maroc varie largement en fonction des régions. En effet, le problème est particulièrement présent dans les régions montagneuses, où le sol - ainsi que l'eau - sont moins riches en iode qu'ils ne le sont en basse altitude. Le ministère de la Santé réalisait en 1993 une enquête nationale qui établissait un taux d'iode inférieur à la normale pour 63 % des enfants de 6 à 12 ans. “L'iode agit sur le fonctionnement de la glande thyroïde et des hormones responsables du développement mental et de la croissance en taille“, explique le Pr. Hadj Khalifa. Une carence en iode peut notamment engendrer des anomalies congénitales, des retards de croissance, des troubles psychomoteurs et la déficience intellectuelle. Les fruits de mer et poissons sont des aliments riches en iode. Il est aussi présent dans les fruits et légumes cultivés sur des sols riches, ainsi que dans les produits laitiers, viandes et œufs des animaux vivant sur ces mêmes sols. Le sel enrichi d'iode est aussi disponible sur le marché, un produit qui a déjà fait ses preuves dans bon nombre de pays. La vitamine A La vitamine A, que l'on retrouve naturellement dans les œufs et le poisson, les produits laitiers et certains fruits (pêches, abricots, etc.) et légumes (persil, coriandre, légumes jaune orangé ou à feuilles vertes), est une substance indispensable à la vie humaine. Elle agit notamment au niveau de la vision, du système immunitaire, de la croissance, du métabolisme des hormones, en plus d'être un antioxydant. Au Maroc, selon une enquête réalisée en 1996, 40,9 % des enfants de 6 à 72 mois souffrent d'une carence en vitamine A. Cette carence peut engendrer des troubles de croissance, une fragilité face aux infections des appareils digestifs et respiratoires, ainsi que divers problèmes de vision - pouvant même conduire à la cécité. La vitamine D Synthétisée à partir des rayons du soleil, la vitamine D est aussi présente dans les poissons, viandes, beurre, lait et dérivés. Il s'agit d'un élément essentiel à la formation des os et des dents, et dont la carence peut engendrer le rachitisme infantile, le ralentissement de la croissance ou une diminution de la tonicité musculaire. “La vitamine D fixe le calcium au niveau de l'os“, explique le Pr. Hadj Khalifa. “Même si vous donnez à l'enfant du calcium par voie orale, il ne pourra pas être fixé s'il n'y a pas suffisamment de vitamine D“. Les populations vivant en milieu urbain, où dans des endroits moins exposés aux rayons du soleil, sont davantage exposées aux carences.