Il y a la pollution de l'air, celle de l'eau, celle des mers, mais on parle très peu d'une autre sorte de nuisance, aux effets insoupçonnés ou volontairement ignorés : le bruit, la pollution sonore. Casablanca est une ville très animée, la première du Maroc. Elle déborde de vie et de mouvements, mais toute cette activité se fait aussi parfois au détriment de la quiétude, de la tranquillité de ses habitants. Il y a un type de pollution dont on parle rarement et qui est pourtant un critère déterminant dans l'élaboration d'une certaine qualité de vie. Il s'agit du bruit, ce que l'on nomme dans le jargon spécialisé : “pollution sonore” . C'est vrai qu'à ce sujet Casablanca est une ville étonnante. Il est très difficile de trouver un lieu ou un moment de silence, même en pleine nuit. Faites en l'expérience…Vous verrez combien ce n'est pas évident…Il y existe toujours un bruit de fond, le ronronnement constant de la ville ; toujours un coup de klaxon, un bruit de moteur, ou de marteau-piqueur. Quand on y réfléchit, c'est une sensation étrange, oppressante même.Le problème c'est que cet élément de la vie citadine peut être ressenti et vécu comme une agression permanente. Bruit de circulation, cris, interpellations, travaux, musique, bref decibels de toutes sortes, ces vrombissementsdivers deviennent pénibles. Tout particulièrement lorsque cela s'étend à votre propre intimité, votre “chez-vous” personnel, là où vous êtes censé vous ressourcer. De par la mauvaise isolation phonique de la plupart des constructions de Casablanca (défaillance de réelles normes techniques) il est difficile de trouver le calme dans des immeubles où la promiscuité est la règle. La relation au bruit est aussi révélatrice d'une certaine mentalité, de l'éducation, et même de certaines coutumes et habitudes culturelles. Les mariages marocains sont réputés dans le monde entier pour leurs côtés chatoyants et festifs. Se marier donne-il pour autant le droit d'empêcher de dormir tout un quartier, sans aucun avertissement parfois, pendant trois nuits ! Une simple question de civisme, d'actualité en ce mois d'août, mois des fêtes et de réjouissances diverses, où l'on vit beaucoup la nuit …Le bruit reste une des composantes, une caractéristique stressante de la vie urbaine. Les effets du bruit sur l'organisme semblent à première vue minimes, mais sont néfastes à la longue. Ils peuvent se révéler des facteurs aggravant d'autres maladies. Il est éreintant pour notre corps de ne jamais pouvoir bénéficier d'un repos total. Le bruit est directement impliqué dans un état de fatigue générale. Cette lassitude a pour conséquences une tension permanente, une forte nervosité voire une certaine déprime et même de la dépression.Le bruit devient même un critère de discrimination sociale et spatiale. Les lieux les plus calmes, ceux où l'on va déambuler pour le plaisir sont comme par hasard les quartiers résidentiels où l'on trouve de riches villas près de la côte, comme Anfa. Et les couches les plus basses de la population s'entassent auprès des axes de circulation, dans des bâtiments mal insonorisés, près de l'aéroport par exemple. Cette “pollution sonore”, le bruit dans ce qu'il a de dégradant, de néfaste, est ainsi un élément de société dont l'étude doit mobiliser l'attention des personnes directement concernées par le cadre de vie et la gestion de la ville.