Le troisième métier de la banque est le recouvrement. Une réalité qui s'est précisée avec la publication, par les banques, des résultats de l'exercice 2001. En effet, l'effort de provisionnement augure des performances en matière de recouvrement qui seront réalisées. A ceux qui pensent que le métier de la banque consiste à collecter les ressources et à les transformer en emplois, détrompez-vous ! Dans un secteur où le financement constitue un produit fini et où le défaut du débiteur est un risque très fréquent, la mise en place d'un dispositif de recouvrement est une nécessité de première importance. Ce qui rejoint la déclaration d'un chef du département crédits d'une banque de la place “Le métier de la banque comporte énormément de risques, puisqu'il s'agit de financer des investissements avec de l'argent qui n'appartient pas à la banque. Ainsi, elle doit prendre beaucoup de précautions quant à l'accord des crédits et, en cas de défaut du créancier, activer un dispositif efficace de recouvrement lui permettant de récupérer ses créances ”. En effet, dans l'état actuel des choses, les banques ne peuvent plus négliger le recouvrement bien que les créances en souffrance ne soient pas importantes. La circulaire de BAM n° 2/G/93 du 14 mai 93 régissant les créances en souffrance (CES), portant sur la classification des créances en souffrance (solde débiteur, impayés sous salaf, impayés à régulariser : effet, CMT…) et leur provisionnement, fait ressortir une classification basée sur la durée de l'immobilisation de la CES. Il s'agit du pré-douteux, du douteux et du contentieux. Par exemple, pour un solde débiteur, si la durée de l'immobilisation de la créance est de 6 à 9 mois, la créance est considérée comme pré-douteuse. Quand la durée de son immobilisation se situe entre 9 et 12 mois, elle sera considérée comme douteuse. Quand la durée de l'immobilisation dépasse 12 mois, la créance est envoyée au contentieux. Pour un crédit sous-salaf (crédit revolving, crédit de consommation ou CMT), le critère de classement de la créance en souffrance se fait sur la base de l'ancienneté de l'échéance. Si cette dernière est inférieure à 3 mois, la créance est classée dans le pré-douteux. Située entre 3 et 6 mois, la CES est classée dans le douteux. Enfin, si l'ancienneté de l'échéance dépasse 6 mois, la créance est envoyée au contentieux. Et le chef de département d'ajouter : “Dans la pratique, le passage de pré-douteux vers le contentieux ne se fait pas de manière automatique. Au début de chaque année, les banques fixent des objectifs de passation des créances en souffrance vers le contentieux. Au cas où cet objectif est atteint, le reclassement des CES du douteux vers le contentieux est reporté à l'exercice suivant”. A travers ce classement, l'objectif du recouvrement est d'empêcher le glissement des créances en souffrance du pré-douteux vers le douteux, et du douteux vers le compromis ou contentieux. Pour se faire, plusieurs moyens sont utilisés, et entrent dans le cadre du recouvrement appelé “à l'amiable”. Il s'agit de l'envoi de lettres de rappel et ce, dès la constatation du premier impayé ou dès le classement de la CES en pré-douteux. Les agents de recouvrement contactent, par le biais du téléphone et par des visites sur place, le créancier, afin de régulariser sa situation ou pour négocier des modalités de paiements. Certaines banques, choisissant de se concentrer sur leur métier de base, confient cette première phase de recouvrement, pour des montants peu importants (ex : créances inférieures à 100.000 DH), à des sociétés de recouvrement, moyennant une commission. Dans le cas où ces efforts n'aboutissent pas et où la créance en souffrance glisse du douteux vers le contentieux, la procédure de recouvrement extra-judiciaire est déclenchée à travers l'envoi d'une lettre de mise en demeure (LMD) sous pli recommandé. Pour que cette procédure aboutisse, le créancier doit obligatoirement accuser réception de la LMD. Par la suite, un canevas de passation de la CES au contentieux est mis en place. Toutefois, l'espoir de résolution à l'amiable du contentieux n'est pas perdu. En effet, le créancier est contacté pour trouver un arrangement (annulation d'agios, remises gracieuses…) ou, le cas échéant, le versement d'au moins 30 % de la créance en souffrance. Le reliquat est consolidé à travers un crédit de consolidation matérialisé par un protocole d'accord maintenant les garanties détenues précédemment, tout en précisant le principe de la déchéance du terme (au premier impayé de plus de trois mois, le dossier est viré au contentieux et le créancier est poursuivi en justice). Enfin, dans le cas où la résolution à l'amiable échoue, la banque met en jeu les garanties détenues dans le cadre du dossier de crédit. Le responsable conclut : “dans le droit romain, lors de la défaillance du créancier, les procédures de recouvrement débutaient par l'incarcération de l'individu. Ce n'est que par la suite qu'on a opté pour la saisie de biens meubles ou immeubles. Dans le droit actuel, c'est la procédure inverse. On commence par la saisie des biens meubles. Si la valeur est insuffisante, on procède à la saisie des biens immeubles. Et ce n'est qu'en dernier lieu que le créancier court le risque d'être incarcéré”.