Le PJD oublie les réunions de ses ex-ministres avec leurs homologues israéliens    S.M. Le Roi préside une séance de travail consacrée à la révision du Code de la Famille    Abdellatif Ouahbi s'entretient à Rabat avec le Conseiller irakien à la Sécurité nationale    Riyad: le Maroc participe au 1er Conseil des ministres arabes de cybersécurité    Internet : Lancement de la 5G au Maroc en perspective de la CAN-2025 et la Coupe du Monde 2030    A Tripoli, l'armée algérienne se fait l'avocate du Polisario    La France a un nouveau gouvernement    Botola D1. J15 / FUS - CODM : Moulouâ auteur d'un quadruplé !    Casablanca : Un homme interpellé après avoir escaladé un véhicule de police    Bourses d'études: 93% des demandes acceptées en 2024    Malgré l'espoir d'un cessez-le-feu, l'armée sioniste poursuit son génocide à Gaza    Vers une fusion historique dans l'industrie automobile japonaise    Dessalement : Le PPS accuse le gouvernement de «conflit d'intérêts»    Le tirage au sort le 27 janvier à Rabat    Khaliji 26 : Hervé Renard battu d'entrée !    Basket. DEX masculine: Le Fath remporte le derby de Rabat    Reprendre le modèle espagnol    Plus de 90% des Marocains pour une gestion efficace des déchets plastiques    Des émissaires américains rencontrent le nouveau maître de Damas    Rougeole : Le Maroc reste en-dessous de la couverture vaccinale optimale    Education nationale : Régularisation de la situation des fonctionnaires ayant réussi les examens d'aptitude professionnelle    La Russie expose un petit mammouth quasi intact de 50.000 ans    Démographie : La crise silencieuse du "baby crash"    2è SILEJ: 340 exposants et plus de 101.000 visiteurs    Cinéma : « Nosferatu » s'invite dans les salles marocaines le 25 décembre    Film: «404.01», une tentative ambitieuse    Karting : le Maroc deuxième de la MENA Nations Cup au Qatar    Coupe de France : Face à Ayoub El Aynaoui, le PSG d'Achraf Hakimi qualifié aux tirs au but    Aquaculture. 300 MDH pour booster le secteur en 2025    Allemagne : Arrestation d'un homme qui menaçait d'attaquer un marché de Noël    Le Grand Mufti d'Al-Qods salue le soutien du Maroc, sous le leadership de SM le Roi, au peuple palestinien    Etats-Unis : 88 M$ de missiles air-air pour le Maroc approuvés    La sportech marocaine se démarque à Munich    Après le retour de Donald Trump, l'ancien ambassadeur américain David Fischer espère retrouver son poste à Rabat    Casablanca: interpellation d'un suspect ayant volontairement percuté avec sa voiture plusieurs personnes    Justice. Clôture de la 10ème Session ordinaire du Comité technique spécialisé de l'UA    Le Maroc annonce un partenariat stratégique pour renforcer le secteur de l'eau avec un investissement de 11 milliards de dirhams    Soumission aux marchés de Bank Al-Maghrib : le format électronique obligatoire à compter du 1er janvier 2025    Entrepreneuriat féminin : 15% des entreprises sont dirigées par des femmes    Oscars 2025. L'Afrique en lice    L'axe Rabat-Paris en 2024 : une dynamique nouvelle et un avenir porteur de grands desseins    Maroc-UE, une étape charnière d'un partenariat stratégique de référence    Recettes fiscales : croissance à deux chiffre en novembre    Funérailles à Casablanca de l'acteur feu Mohamed El Khalfi    Botola : L'AS FAR bat le Hassania d'Agadir    Funérailles à Casablanca de l'acteur feu Mohamed El Khalfi    MAGAZINE : Nour-Eddine Saïl, un hommage en contreplongée    Musique : Les notes jazz de l'arganier    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Le boss et sa caricature, le téléphone portable entre archaïsme et modernité
Publié dans La Gazette du Maroc le 24 - 04 - 2009

Vous avez le numéro de portable d'un haut responsable, vous êtes alors un sacré veinard qui pouvez lui toucher un mot à tout moment et en tout lieu sans passer par le standard réservé au commun des mortels. La réalité en fait n'est pas si simple, l'appel n'ayant de chance d'aboutir qu'exceptionnellement. Pourquoi ? C'est qu'au-delà des contraintes liées à l'emploi du temps, il y a d'autres raisons plus profondes. Aux mains du prince et de la bergère, le téléphone portable a quasiment conquis tous les niveaux de l'échelle sociale. Mais le rapport à ce joujou n'est pas le même selon la position sociale. Comment le chef vit la modernité -des rapports sociaux et particulièrement d'autorité- avec l'intrusion d'un tel appareil ? L'intérêt d'un tel propos est intéressant à plus d'un titre. Vecteur de modernité, le téléphone portable entame le mystère entourant le chef en le rendant théoriquement accessible sans le détour obligé par les intermédiaires. Il est, dans ce sens, porteur d'un changement virtuel considérable dans les rapports de pouvoir. De fait, l'appareil est une des expressions fortes de l'individualisme. Produit et agent, du même coup, de la désagrégation des structures de sociabilité, il laisse l'individu à nu, livré à lui-même, en proie à l'interpellation par quiconque. Le chef, dans une telle situation, se voit retirer son voile. Ce qui fondait sa force, la distance de mise entre lui et les administrés grâce à la nuée de serviteurs qui en faisaient un être à part, difficilement accessible, a été battue en brèche par la magie de ce minuscule appareil. Le prince, le maître suprême quant à lui, s'en accommode du fait de sa puissance et de son statut de chef indiscuté, source de tout commandement.
Le téléphone portable pose un sérieux problème, par contre, pour le chef subalterne de quelque niveau qu'il soit. Le portable accentue l'empire de son supérieur sur lui en le privant des motifs de se soustraire à ses injonctions. Et surtout il le met à portée de tiers qu'il tenait à l'écart jusque-là. La horde de chaouchs et de secrétaires qui lui servait de paravent, n'est plus d'un grand secours. Il est sans cesse mis à l'épreuve, tiré de sa retraite et dépouillé du halo d'autorité qui constituait l'essentiel de son statut. Il doit désormais faire face en personne à ses adversaires, comme au commun des mortels. Accessible, il se doit de faire la preuve à chaque appel renouvelé, de son mérite, de son entregent et de sa capacité à mériter une place de leader.
Il opte alors, la plupart du temps, pour la solution la plus simple, ne pas répondre sans y être contraint par la force des choses. Autrement dit, il remet en place le voile dont le portable est censé le déposséder. La proximité tant vantée au citoyen grâce à l'accessibilité supposée du responsable est remise dès lors en question. L'exemple du chef invisible symbole accompli de l'autorité, celui dont il désire amoureusement la proximité, celui dont la numérotation téléphonique relève de chiffres magiques, le fascine. Il rêve de ce téléphone personnel et intime qui ne le mettrait en contact exclusivement qu'avec le supérieur. Vis-à-vis des subalternes et des autres, il cherche à préserver son prestige en signifiant par son silence que son temps est précieux pour être mis, sans autre forme de procès, à la disposition du premier venu. Autrement dit, il se décrète chef supérieur relevant des hautes sphères et boude dès lors légitimement ses interlocuteurs qui se retrouvent déclassés par son refus de voir leur sollicitation écoutée.
Il mime le chef, le grand, celui dont la caractéristique est d'être livré à lui-même et de n'avoir personne au-dessus de lui auquel rendre compte. Celui qui appelle et n'attend pas qu'on l'appelle, celui que n'effraie pas la sonnerie, qui démet et qu'on ne démet pas, qui sermonne et qu'on ne sermonne pas. Sa réponse à lui n'est pas un signe de faiblesse mais de bénédiction. C'est le requérant qui frémit de joie à l'écoute de sa voix, qui se retrouve liquéfié et féminisé par cette distinction. Distinction d'autant plus extraordinaire qu'elle est imprévisible, car le maître répond, appelle ou rappelle quand ça lui plaît. Il n'a pas à remplir de bulletin d'absence, à raconter pitoyablement, pour n'avoir pas répondu, qu'il était en réunion ou submergé par l'ouvrage. Il ne recourt pas à la mise en scène grotesque d'une puissance imaginaire. La puissance, il l'a entre les mains. C'est son humeur qui dicte sa réponse ou son silence, et l'humeur en question est constitutive de sa vocation. Le chef suprême est ainsi, il est à proprement parler imprévisible, c'est sa définition. On prend dès lors conscience combien le rapport à ce joujou minuscule, loin d'être un pur rapport à la technique, est un rapport de pouvoir, combien la technologie en progrès constant nous laisse confrontés à des dilemmes que nous nous devons de gérer. Derrière l'apparente liberté que le mobile octroie, il nous ramène à des postures archaïques. Par son silence et sa propension à ne pas donner suite aux appels, le chef reconstitue le voile dont la modernité a tendance à le priver. Il se mure dans le silence qui lui procure une sensation de hauteur et de pouvoir. La tendance de l'autorité à se voiler et à puiser sa force dans le mystère tient bon malgré les assauts de la démocratie et de sa technologie. ■


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.