Ainsi, le scenario à la syrienne a été exécuté de main de maître par les honorables députés des deux chambres. Les amendements apportés à la constitution ont balisé la voix au président de la république qui s'offre un 3eme mandat pour «permettre au peuple d'exercer sa souveraineté». Sur les 523 députés et sénateurs, 500 voix se sont prononcées par un «oui massif» comme au bon vieux temps du parti unique, la nouvelle mouture constitutionnelle permettra à Bouteflika de briguer un mandat à vie. Et le premier à savourer cette victoire c'est le nouveau «premier vizir»: Ahmed Ouyahya qui n'hésite pas à déclarer outrageusement que «l'opposition ne prendra jamais le pouvoir ». Voilà ce qui nous renseigne un peu plus sur les véritables intentions du pouvoir en place. Devant ce fait accompli,les principaux acteurs de l'opposition, des personnalités politiques ont réagi de manière ferme et usé de tous les qualificatifs pour dénoncer «le viol de la constitution». Le premier à hausser le ton, c'est le parti du Dr Saïd Sadi, le R C D dont les élus se sont retirés après le vote pour ne pas cautionner le message du président qui félicitait les députés, juste après la clôture des travaux. Ceci est considéré comme une insulte à tout un peuple « il est clair que les dés étaient pipés d'avance » déclare rageusement un député du RCD. Saïd Sadi n'a pas peur des mots et va plus loin en qualifiant cette révision « de 3eme coup d'Etat ‘». Il ajoute plus loin « Bouteflika a déjà participé au coup d'Etat contre le G P R A en 1962 et celui qui a renversé Ben Bella en 1965. C'est une catastrophe ! Mais le plus grave, est que ce coup a eu lieu dans l'enceinte parlementaire ». Le parti de Saïd Sadi reste donc fidèle à sa ligne de conduite et milite pour une véritable ouverture démocratique en rejetant tout compromis avec le pouvoir, et si la position de ce parti politique n'étonne personne, il y a cette intervention du général à la retraite, Rachid Benyelles, qui, dans un véritable réquisitoire, dresse un état des lieux des plus pessimistes et un bilan désastreux de la dernière décennie. Dans une contribution publiée par la presse indépendante, l'ex-chef de l'Etat major de la marine nationale ne prend pas de raccourcis et s'attarde longuement sur les différentes étapes des deux mandats de Bouteflika. D'emblée, il s'exclame : «Après avoir passé un premier quinquennat à sillonner la planète, et une grande partie du second, le voilà, maintenant qu'il se prépare a un 3ème quinquennat. Bouteflika a toujours voulu être un président à vie, la seule question pour lui était celle de choisir le moment opportun pour annoncer le changement de la constitution qui limite le nombre de mandats à deux. Hélas ! la démocratie et l'alternance ne font pas partie du lexique de l'Algérie de Bouteflika». Casser les tabous Sur le plan socioéconomique, Rachid Benyelles n'hésite pas à casser des tabous et étale au grand jour la différence entre l'Algérie et les monarchies pétrolières, qui ont réussi admirablement à moderniser leurs pays, tout en se projetant dans l'après-pétrole. En Algérie, la manne pétrolière profite uniquement aux rentiers du système, selon l'analyse du Général, qui enfonce le clou cette fois-ci, en citant en exemple la performance des pays voisins qui ne disposent pas d'autant de richesses. Il dira en substance, qu'on cesse de faire preuve de chauvinisme pour constater que le Maroc et la Tunisie plus proches de nous, sont parvenus à de meilleurs résultats et ,ce, sans la manne du pétrole et en donnant une précision de taille sur la dépendance alimentaire, une véritable menace pour le pays qui importe les 95% de ses besoins alimentaires. Le Maroc est particulièrement cité en exemple pour son auto- suffisance alimentaire, sa production de produits pharmaceutiques, le développement de son industrie touristique et l'activité de ses ports. C'est là un constat effarant, mais vérité oblige. D'autant plus qu' on ne peut pas reprocher à Rachid Benyelles d'être à la solde du clan B.T S. ( l'Est du pays). Le Général appartient à une grande famille Tlemcenienne. De son coté, Moussa Touati du F N A, s'en prend directement aux députés. Lors d' une rencontre à Oran avec les élus de l'Ouest, il déclare « que les parlementaires ne sont pas représentatifs et si le vote avait eu lieu à bulletins secrets, les résultats auraient été tout autres » aussi, faut-il rappeler que l'actuelle assemblée a été élue avec seulement un taux de participation de 30%. Le CCDR (comité des citoyens pour la défense de la république dénonce le nouveau hold-up et le piétinement sans état d'âme de la souveraineté populaire, le comité appelle les militants de la cause démocratique à s'organiser en collectif d'initiative démocratique(C.I.D). Le troisième mandat de Bouteflika sera peut-être le mandat de trop. En Mai 2009, il n'y aura pas de muguets pour les électeurs.