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Mesures sécuritaires du côté des pharmaciens...

Pour éviter tout débordement ou débauche, la vente de calmants, sédatifs, thymoanaleptiques (antidépresseurs, anxiolytiques (médicament qui apaise l'anxiété ) ou autres psychotropes dans les pharmacies, est soumise à des mesures restrictives très «sécuritaires».
Ainsi, explique le Dr Mohamed Yassine, docteur en pharmacie, ces types de médicaments ne peuvent être délivrés aux clients que sur ordonnance datée et signée, où doivent être lisiblement mentionnés le nom et l'adresse du psychiatre prescripteur. Une fois le médicament délivré, le pharmacien se doit de l'inscrire sur le livre registre d'ordonnance (connu dans les milieux pharmaceutiques d'ordonnancier) codé par le traité de la place. Cette inscription ne doit, en aucun cas, comporter ni blanc, ni rature ou surcharge. Elle doit, par ailleurs, comprendre le nom du client et son adresse, ainsi que la date de délivrance du médicament. De même qu'il est impératif d'y mentionner la composition du produit ou médicament vendu, sa forme et enfin la quantité exacte délivrée au patient.
Toujours selon le Dr.Yassine, les mesures précitées concernent surtout les médicaments placés sur la liste A (les produits placés sur la table A peuvent être délivrés aux patients sans vérification exagérée), sauf un seul produit, qui semble avoir des effets très importants sur le psychisme, il s'inscrit sur la lise B, sa délivrance est donc encore plus compliquée.
L'ordonnance présentée au pharmacien lors de l'achat du médicament n'est plus valable au bout de six mois. La prescription du médicament doit ainsi être renouvelée tous les six mois par le médecin traitant, qui jugera si oui ou non son patient a encore besoin de consommer des psychotropes. Cela permettra au pharmacien de contrôler ses ventes en la matière, et au médecin psychiatre de suivre de plus près le traitement de son patient.
Malgré toutes ces dispositions prises pour contrôler les ventes de psychotropes dans les pharmacies, ces médicaments font encore l'objet de ventes clandestines et illégales dans beaucoup de quartiers populaires.
Un fqih pour toutes les démences !
Le "psy" des moins nantis guérit tous les maux, de la dépression à la possession. Un bouc noir, une "hadra", ou un isolement à Bouya Omar, les ordonnances varient, et le coût aussi. Nous nous sommes fait passer pour des "dérangés mentaux", auprès d'un fkih. Les consultations se font
sur rendez-vous
Hay Salama à Casablanca. Dans une maison aménagée en cabinet de consultation, des personnes guettent leur tour dans un salon traditionnel. Les habitués se reconnaissent et louent au passage les services de "Si el Haj", avant d'aborder timidement leur voisin. La réputation de "Si El Haj" est dûment entretenue par tout le monde. Muni seulement de ses connaissances coraniques, il a, paraît-il, réponse à tout.
Ses "patients" viennent souvent accompagnés. D'autres, plus rares, viennent volontairement et trouvent remède grâce à ses paroles.
Dans la salle d'à côté, quelques cris stridents fusent. On haletait suppliait, pleurait. Au fur et à mesure que les cris montent crescendo, les "habitués" témoignent leur admiration : "il va certainement la délivrer de sa démence ! Tu as entendu, elle parle une langue que seul le fqih connaît! C'est la preuve qu'elle sera libre prochainement". "Elle change de voix et parle une autre langue. Elle doit être possédée par un esprit, ce qui expliquerait ses comportements étranges. Sa famille a tout essayé… ". Les cris s'arrêtèrent subitement. Un silence presque sacré s'instaure. La mère, appelée à accompagner sa fille à la salle de repos, la tient par la taille. Fatiguée, la fille succombe à un lourd sommeil, échange quelques mots avec sa mère avant de repartir (c'est signe d'une nette évolution , puisque l'on prétend que la jeune femme s'abstenait de parler, elle devenait presque associable, anorexique…).
Des cas similaires se succédèrent. Notre tour approche et l'assistance nous souhaite " bonne délivrance ". La salle de consultation ou plutôt la chambre du fkih est tapissée de peaux de mouton et de couvertures. Divisée en deux par un rideau blanc aux contours verts, la chambre est ornée d'une épée et d'un chapelet. Le fkih nous accueille et se présente humblement comme le futur guérisseur. "Je contribuerai Inchallah à votre guérison" Ghankoune Essbab ". Assis en face de lui, le fkih nous demande de nous relaxer. Il nous met en confiance. "Etendez vos bras vers les miens" (les bras tendus à la façon des somnambules, comme si on allait se connecter). Bien que l'idée nous paraît drôle, on s'exécute. Il commence alors à trembler de tout son corps, devient presque "épileptique". C'est, paraît-il, l'un des procédés pour identifier le mal et mesurer son intensité. La source de notre déprime: bourdonnements, voix qui nous interpellent, manque d'appétit, réactions hystériques, tout ça c'est le djinn. Après s'être allongé, le fkih pose sa main sur le front et récite. Il tapote par la suite les épaules, la poitrine, la tête, les pieds, maudit les mauvais esprits et accepte la somme glissée entre les mains. Bien sûr, il est convenu dès l'entrée de poser la question aux habitués qui rétorqueront : "c'est un homme de bien. 30 ou 50 DH suffisent, mais il mérite plus ". La facture risque d'être salée s'il exige une offrande ou une hadra, rituel organisé à Chaâbana.
Le silence où baigne la chambre nous renvoie à une mise en scène minutieusement étudiée, qui explique, plus ou moins, l'intérêt porté au fkih. Les gens présents dans la salle d'attente sont dans leur élément : un décor marocain, des personnes compatissantes, un guérisseur "professionnel" qui taira leurs secrets et un coût a priori à la portée de toutes les bourses. Le fkih âgé, fidèle aux traditions, puisant son savoir du Coran, semble être une personne de bien, sécurisante, qui offre l'illusion d'un remède provisoire par de simples billets écrits à l'encre naturelle et diluée dans une "eau bénite", ou en exigeant une offrande aux bons esprits…
Lexique
Dépression (nerveuse) : état de souffrance marqué par un abaissement du sentiment de valeur personnelle et de pessimisme. La dépression peut se manifester de manière évidente par la tristesse, l'anorexie, l'insomnie, la perte de la notion du plaisir et un ralentissement psychomoteur (troubles de concentration) et parfois des crises de colère. De même qu'elle peut se manifester de manière masquée par la fatigue, l'isolement ou quelques symptômes organiques (mal à l'estomac, migraines ou autres).
Démence : Trouble mental grave, qui affecte presque toutes les personnes âgées, caractérisé par un affaiblissement ou une détérioration progressifs et irréversibles des fonctions intellectuelles et mentales.
Hystérie : manifestations névrotiques qui expriment un conflit inconscient, souvent liées à des événements d'enfance, à une certaine dépendance ou manipulation de l'entourage.
L'hystérie s'exprime à l'âge adulte soit par des crises nerveuses, de violentes agitations, pleurs, théâtralisation... soit par de la fatigue, nervosité excessive, troubles de sensibilité ou de langage.
Mélancolie : c'est un stade très avancé et grave de la dépression. La personne mélancolique s'isole, ne mange plus, ne dort plus, se désintéresse complètement de son apparence. Elle devient très pessimiste.
La mélancolie, tout comme la dépression, présente de grands risques suicidaires.
Psychopathie : elle n'est pas très fréquente au Maroc. C'est le trouble de la personnalité se manifestant essentiellement par des comportements antisociaux (passage à l'acte) sans culpabilité apparente. Les personnes psychopathes peuvent donc être violentes et très agressives.
Paranoïa : c'est le comportement de quelqu'un ou d'un groupe qui a tendance à se croire persécuté ou agressé. Souvent en conflit avec tout le monde, la personne paranoïaque se caractérise par la surestimation de soi, l'orgueil, la méfiance, l'incapacité à l'autocritique, le faux raisonnement et la rigidité mentale. La paranoïa ne s'accompagne pas forcément de délires.
Schizophrénie : c'est une forme de psychose délirante chronique caractérisée par une discordance de la pensée, de la vie émotionnelle et du rapport avec le monde extérieur. C'est une affection qui touche les sujets jeunes (18 à 25 ans).
Elle se manifeste d'abord par une rupture entre une vie intellectuelle brillante et une désorganisation des relations affectives, l'humeur étant le plus souvent dépressive ou paradoxale. Ensuite apparaissent des troubles du comportement qui devient étrange, accompagné d'hallucinations diverses, notamment auditives ou visuelles.
Troubles bipolaires : ils touchent un très grand nombre de Marocains. C'est une affection où s'alterne, d'une manière cyclique et chez une même personne, des périodes euphoriques avec exaltation de l'humeur, hyperactivité désordonnée... et des périodes dépressives.
Toxicomanie : Habitude de consommer une ou plusieurs substances psychoactives susceptibles d'engendrer un état de dépendance psychique ou physique. On l'appelle aussi la pharmacodépendance.


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