La sainteté fait peur. Il n'y a pas d'accord visible entre la société et le saint » a dit Jean Genet un soir de janvier en 1964. C'est ce que reprend l'écrivain Michel Bulteau dans sa préface à la traduction arabe du Funambule publié par les Infréquentables en 2002. C'est là une saillie qui met l'accent sur l'intérêt d'écrire, de se faire publier et surtout d'être lu. Dans cette logique, Abdelghaffar Souiriji, journaliste et écrivain décide de relever le pari de publier une certaine littérature. C'est un choix de publier Mohamed Khaïr Eddine, Jean Genet, pour ne citer que ceux-là dans un fatras livresque où tout le monde s'auto-proclame auteur et en va de sa verve créatrice qui gagnerait peut-être à rester dans les limbes de l'intimité. «Il s'agit pour nous d'ouvrir une autre brèche dans le monde du livre en publiant des auteurs maudits, inconnus, porteurs d'autres flammes, créateurs d'univers à part. C'est dans ce sens aussi que la poésie revêt pour nous une importance capitale quelle que soit son origine et la langue de son expression. La poésie, aujourd'hui marginalisée, a une place de choix pour nos éditions. Il s'agit de lui offrir d'autres horizons en publiant des œuvres que nous jugeons fortes, profondes, novatrices et surtout audacieuses. Oui, dans un sens, il s'agit d'être infréquentable pour beaucoup d'autres, mais très fréquentable pour nous. » Abdelghaffar Souiriji résume son propos en disant que le but est de faire en sorte que ceux qui n'ont aucune chance de toucher leurs publics trouvent une courroie de transmission. En quelques années, les Infréquentables ont publié des dizaines d'ouvrages allant de la poésie, à la philosophie, en passant par la critique littéraire et artistique, l'essai et la réflexion et dans plusieurs langues : arabe, français, anglais… Et parfois dans le même livre, nous pouvons toucher du doigt ces différentes approches de l'édition : jongler avec les moyens d'expression et faire fructifier le multilinguisme.