La Tunisie célèbre les 50 ans, jour pour jour, de la promulgation le 13 août 1956, du Code du statut personnel de la femme, le premier projet de réforme après l'indépendance. Une nouvelle législation considérée par la plupart des penseurs de l'époque comme étant une traduction pratique des idées réformistes de Tahar Haddad. Dans son discours prononcé, samedi dernier, à cette occasion, le président Zine El-Aidine Ben Ali a tenu à préciser que les acquis juridiques de la femme tunisienne ne seront pas seulement défendus par l'Etat, mais consolidés à travers de nouveau amendements. «L'esprit révolutionnaire qui l' a imprégné face aux mentalités rétrogrades et aux comportements sociaux injustes à l'égard de la femme et de la famille, sera toujours à l'ordre du jour», affirme le chef de l'Etat tunisien. Pour lui, en promulguant le code de la famille, la Tunisie a prouvé que l'émancipation politique et indissociable de l'émancipation sociale. Et que l'attachement aux constantes nationales, qu'elles soient religieuses, culturelles ou sociales, n'est pas compatible avec l'esprit d'innovation et de modernisation, comme l'œuvre civilisationnelle globale ne peut être parachevé sans un partenariat actif et équilibré entre l'homme et la femme dans tout ce qui se rapporte aux choses de la vie. Acquis solides Ben Ali a tenu à rappeler à ceux qui essayent de contaminer ses réalités sociales qu'il ne peut y avoir, en aucun cas, de remise en question des réformes et initiatives réalisées. D'où l'opposition franche à tous les nostalgiques des temps du conservatisme. L'introduction dans le code le 12 juillet 1993, d'un ensemble de dispositions nouvelles portant sur les fiançailles, la dot, la tutelle, le mariage, le divorce, la pension alimentaire, la garde des enfants et le partenariat financier est un pas à consolider. Dans le cadre de cette même logique, le président tunisien a révélé qu'une proposition au pouvoir législatif d'un projet de loi unifiant l'âge minimum au mariage sera présenté très prochainement en la fixant à 18 ans pour les jeunes des deux sexes. La possibilité de mariage entre 18 et 20 ans restant soumise au consentement des parents. Par ailleurs, Ben Ali précisa que tous les indicateurs statistiques montrent que la Tunisie à gagné son pari. Nombreux sont les experts juridiques de par le monde qui estiment que le statut privilégié dont bénéficie la femme tunisienne, résulte d'un choix de société et non d'une quelconque pression de l'étranger. Ce qui a donné plus de valeur à ce Code de la famille le plus avancé dans le monde arabe. Le texte adopté dans ce sens abolissait la polygamie, la répudiation, et instituait le divorce judiciaire. En outre, la femme tunisienne jouit du droit de vote, du droit à l'éducation, au travail, à la santé et à la sécurité sociale. Aucune discrimination Ces acquis ont été défendus par le père de la nation, feu Président Habib Bourguiba. Ils ont, par la suite, été consolidés et accrus par le Président Zine El Abidine Ben Ali qui a fait de la promotion de la femme un des enjeux de son projet de société basée sur l'inclusion et la non-discrimination. De nombreuses mesures ont été prises pour garantir l'égalité en droit des citoyens des deux sexes et assurer l'équilibre de la famille, cellule de base de la société. Les analystes contemporains se rappellent bien que le jour même de son accession à la magistrature suprême, le 7 novembre 1987, Ben Ali a affirmé solennellement son attachement au principe d'égalité entre les sexes. Depuis, il a toujours eu comme première préoccupation le renforcement des acquis juridiques de la situation de la femme ainsi que l'adéquation entre les lois et les besoins de la société, et cela dans tous les domaines du quotidien. Dans la même lignée, sous son impulsion, la Tunisie a ratifié toutes les conventions internationales relatives aux droits des femmes et des enfants. Ce, en prenant soin de publier au Journal officiel de la République Tunisienne toutes les conventions nouvellement ratifiées. Ainsi, la Tunisie s'est toujours distinguée par l'orientation moderniste de sa législation dans toutes les rencontres internationales où elle a joué un rôle de choix dans la préparation des résolutions. Tel a été notamment le cas pour la plate-forme d'action de Beijing approuvée à l'issue de la 4ème conférence mondiale sur les femmes en septembre 1995. A cet égard, le Professeur Fausta Pocar, Président du Tribunal international pour l'ex-Yougoslavie et Rosalyn Higgins de la Cour internationale de justice ainsi que Steven Van Hoogstraten, directeur de l'Académie de droit international de La Haye se sont accordés à continuer dans une conférence tenue le 13 juillet dernier sous le thème « Femmes en Liberté » au Palais de la Paix à La Haye que le texte juridique du Statut de la femme en Tunisie a « indéniablement constitué une avancée cruciale dans la protection de la femme dans ce pays.» Et ces spécialistes de poursuivre que ce code «relève une interprétation progressiste et dynamique de l'Islam et de ses traditions fondées sur le principe fondamental de l'égalité entre les sexes ». D'autre part, les congressistes ont reconnu que certaines règles contenues dans le Code du Statut Personnel de la femme tunisienne ont été discutées à plusieurs reprises devant le Comité des droits de l'homme, établi en vertu du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ce qui lui donne plus de crédibilité et de poids, souligne le professeur Pocar. Les congressistes ont indiqué que leurs préoccupations, jadis exprimées à l'égard de quelques articles du statut sont désormais écartées. Plus particulièrement après que le Code de la nationalité a été amendé afin de permettre l'acquisition de la nationalité tunisienne par la mère lorsque le père est ressortissant d'un autre Etat. Cependant, ces juristes notent que le consentement du mari est encore requis avant qu'une femme tunisienne ne puisse transmettre la nationalité tunisienne à son enfant. Ce qui ne semble pas être tout à fait conforme aux termes précis de l'article 9 de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discriminations à l'égard des femmes. Cette dernière difficulté relative ne devra, selon ces juristes, constituer aucun obstacle majeur à l'avancée en cours en la matière. Les chiffres parlent d'eux-mêmes La femme est aujourd'hui présente dans les secteurs d'activité ainsi qu'au sein du gouvernement et dans toutes les instances élues. Cette participation significative et publique s'explique par le haut pourcentage de la scolarisation des filles, atteignant 99 % en 2006 alors qu'il n'était que de 33 % en 1956. Actuellement, elles représentent 27 % des juges, 31 % des avocates, 42 % des professions médicale et paramédicale, les femmes tunisiennes dirigent 10.000 entreprises privées. Elles constituent également 62 % du corps des pharmaciens, 34 % des journalistes et 40 % des professeurs d'université. D'autre part, force est de souligner que dans la vie également les femmes s'illustrent par leur présence accrue dans tous les secteurs de la vie économique. Elles constituent aujourd'hui plus du quart de la population active du pays. Co-partenaire dans la gestion de sa famille partenaire de poids dans vie économique, la femme tunisienne et aussi un interlocuteur de choix dans la sphère politique… Sept femmes siègent au gouvernement. Parallèlement, on compte aujourd'hui, à la nouvelle chambre des députés élue lors des élections du 24 octobre 2004, 43 femmes députées sur un total de 189 députés, soit un taux de 22,7 %. Au RCD (Rassemblement Constitutionnel Démocratique), parti au pouvoir, les femmes représentent 26,5 % des membres du Comité central. Dans les conseils municipaux, on dénombre plus de 20 % de femmes, depuis le dernier scrutin de 2000, grâce à la loi électorale amendée qui leur garantissait un minimum de 20 % des sièges. Ainsi, et pour la première fois, deux magistrats ont été nommées : la première, comme avocate générale et la seconde pour occuper les fonctions de directeur général de l'Institut supérieur de la magistrature. Les effets de cette politique de la promotion de la femme ont été particulièrement bénéfiques pour l'ensemble de la société. La femme est beaucoup dans la maîtrise par la Tunisie de sa croissance démographique, nettement inférieure à sa croissance économique. La femme joue un rôle vital dans l'équilibre budgétaire des familles et dans la modernisation de celles-ci. Ce qui se traduit par un meilleur prise en charge des enfants. La famille tunisienne est ainsi devenue, au fil des ans un lieu privilégié d'expérimentation du dialogue social et un moteur de la cohésion de la société. En 2003, il a été procédé à la création d'un conseil national de la femme et de la famille dont l'objectif est de donner son avis au sujet des projets inscrits dans les plans nationaux de promotion de la femme, et de la famille, de présenter des suggestions à propos de la politique générale dans ce domaine et de participer à l'identification des mesures que nécessite la mise en œuvre de cette politique. Autre réalité qui doit être prise en compte, c'est que la femme tunisienne représente une partie prenante de la classe moyenne tunisienne, la plus forte du monde arabe, qui a endigué fin des années 8 et début des années 90 les tentatives entreprises par les mouvements islamiques extrémistes qui voulaient s'emparer par la force du pouvoir en Tunisie.