La gestion des affaires concernant la spoliation foncière a été au centre d'une réunion d'une commission chargée du suivi de ces litiges, tenue récemment, sous la présidence du ministre de la Justice, Mohamed Aujjar. Celui-ci a mis en avant les différentes mesures et réformes que va connaitre la gestion des dossiers de spoliation immobilière, des propos répétés des années durant, mais qu'en sera-t-il vraiment sur le terrain ? Mohamed Aujjar a bien annoncé la couleur en indiquant que de nouvelles mesures seront entreprises, afin de faire face aux affaires concernant la spoliation foncière, peu importe la nature des biens. Le ministre de la Justice a précisé que différentes révisions concerneront le Code des droits réels, le Code de procédure pénale et le Code pénal. Ces mesures interviennent suite à l'élaboration de projets de loi pour la résolution des litiges dans ce domaine, qui ont été adoptées au Parlement. Cela dit, Aujjar a indiqué qu'aucun nouveau cas de spoliation n'a été enregistré depuis l'adoption de ces mesures, chose qui est assez « bizarre » en soi, à en juger par les différentes plaintes partagées sur les réseaux sociaux. Toutefois, la commission de suivi a fait savoir que le traitement des litiges présents se fait dans des délais et des conditions, qui sont en accord avec les dispositions juridiques en place, et que les seules défaillances remarquées se trouvent à un niveau administratif. Concrètement, la commission indique que ces dépassements concernent surtout des cas de falsification, qui sont d'ailleurs « rapidement » réglés en la présence des documents justificatifs de la part des propriétaires légitimes. Cela dit, la réunion en question, si elle a été bien informative, n'a toutefois pas connu la présence de représentants de la société civile, selon ce qui nous a été communiqué. Spoliation, quand tu nous tiens Les acteurs de la société civile étaient absents de la réunion du ministère concernant les affaires de spoliation. Cela est bien « dérangeant » dans la mesure où le citoyen est le premier concerné, mais aussi le premier à être « écarté » de décisions qui le concernent. Contacté par Hespress FR, Maître Omar Daoudi, avocat au barreau de Rabat, nous a confié que la problématique, en plus d'écarter les associations de lutte contre la spoliation foncière pour différents motifs administratifs « injustifiés », réside dans le fait qu'il ne suffit pas de dire qu'il y'a des dépassements. « On est bien conscients des affaires de spoliation immobilière. Qu'il s'agisse d'appartements ou de terrains appartenant à des Marocains résidant au sein du royaume tout aussi bien que des MRE, ce phénomène peut toucher n'importe qui de la même ampleur », nous a indiqué Me Daoudi, tout en expliquant que l'objectif serait d'entreprendre de « réelles » actions vis-à-vis des fraudeurs. Les associations des victimes de spoliation devraient être présentes lors de ces réunions, car elles sont les premières à disposer de chiffres et de documents à ne pas négliger, puisque de nombreuses affaires restent en suspens, jusqu'à ce que certains ayants droit laissent tomber leurs biens. Ce constat est d'ailleurs partagé par Moussa Elkhal, conseiller juridique de l'Association pour le droit et la justice au Maroc (ADJM). Elkhal explique à Hespress Fr que « malheureusement, nous avons été écartés de cette réunion, malgré le fait que nous ayons été présents auparavant dans des actions similaires. Nous sommes les premiers concernés, car nous représentons les citoyens ». L'un des autres points discutés avec nos interlocuteurs a été celui du temps nécessaire au traitement de certains dossiers, qui ne devrait pas dépasser une année pour les MRE par exemple. En effet, nos interlocuteurs nous ont indiqué que certains dossiers tournent en rond depuis plus de 10 ans, malgré la présence de documents légaux et de preuves indiquant la présence de fraude. « Ce n'est pas facile pour un MRE de se déplacer, afin de plaider sa cause pour son bien au Maroc. Cela coûte au minimum 15.000 dirhams, entre le voyage, l'hébergement, etc., pour qu'on lui dise que l'affaire sera reportée à une autre date », nous précise ElKhal. Et d'ajouter « nous ne sommes en aucun cas en train de dénigrer le travail réalisé par le ministère et les autorités dans ce sens, mais nous avons besoin d'être vraiment impliqués dans ces décisions, et de voir de réelles actions pour la résolution des litiges ». Pour rappel, quelque 4.037 titres fonciers sans propriétaire ont été recensés à ce jour, qui pourraient très bien tomber entre les griffes de la mafia de l'immobilier en quête de « bonnes affaires ». Cela dit, Aujjar a indiqué pour sa part que le ministère, en concertation avec le ministère de l'Intérieur et de l'Agence Nationale de la Conservation Foncière, du Cadastre et de la Cartographie (ANCFCC) ont entrepris différentes actions pour faciliter l'accès et le suivi de la gestion des dossiers de spoliation par les intéressés. Cela se traduit notamment par le lancement de nombreuses plateformes digitales, qui permettent le suivi à distance du traitement des dossiers, mais aussi de consulter l'état de ses biens enregistrés au sein du royaume. Reste à savoir si ces mesures seront « vraiment » bénéfiques, ou cela n'est rien d'autre que des propos dont le but est de « rassurer » les propriétaires de biens immobiliers.