Le monde entier célébrait, mercredi 19 juin, la Journée internationale pour l'élimination de la violence sexuelle, qui se perpétue dans tous les conflits du vingt-et-unième siècle. Il est impossible de connaître le chiffre exact des victimes de violences sexuelles. Les experts estiment que des actes de violence sexuelle sont encore largement commis dans plusieurs régions du monde. Ils supposent que pour un cas rapporté, 20 restent sous silence. Des études ont démontré que toutes sortes d'acteurs des conflits armés ont commis des violences sexuelles. Ces actes sont le viol, l'esclavage sexuel, la prostitution forcée, la grossesse forcée, la stérilisation forcée, le mariage forcé et toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable perpétrée contre les femmes, les hommes, les filles ou les garçons, liée directement ou indirectement à un conflit. 2019 marque le dixième anniversaire de l'établissement du mandat du Bureau du Représentant spécial du Secrétaire général chargé de la question des violences sexuelles commises en période de conflit. Au cours de la dernière décennie, il y a eu une évolution de la compréhension du fléau de la violence sexuelle liée aux conflits et de son impact sur la paix et la sécurité internationales, ainsi que de la nécessité de prévenir de tels crimes et des services multidimensionnels nécessaires aux personnes survivantes. Malgré ce changement de paradigme, il reste essentiel de reconnaître et de combattre l'inégalité des sexes en tant que cause fondamentale et moteur de la violence sexuelle, y compris en temps de guerre et de paix. A cette occasion, António Guterres, Secrétaire général de l'ONU, a déclaré: «En cette Journée internationale pour l'élimination de la violence sexuelle en temps de conflit, nous devons être à l'écoute des victimes et prendre acte de leurs besoins et de leurs revendications. Ces victimes, qui sont pour la plupart des femmes et des filles, mais comptent aussi des hommes et des garçons, nous demandent de les aider à accéder aux services de santé nécessaires à leur survie, et à obtenir justice et réparation». L'appel du chirurgien gynécologue qui « répare les femmes violées » En effet, les effets de cette violence sexuelle liée aux conflits se répercutent sur des générations à travers les traumatismes, la stigmatisation, la pauvreté, la santé précaire et les grossesses non désirées. « Ces effets sont subis par les victimes et leurs enfants », constate le Congolais Denis Mukwege, Prix Nobel de la paix 2018. Il est le «chirurgien gynécologue qui répare les femmes violées». A l'hôpital de Panzi, qu'il a créé en 1999 en République démocratique du Congo (RDC), son pays, il a soigné avec son équipe cinquante-quatre mille survivantes de violences sexuelles. Se battant depuis des années contre le viol comme arme de guerre, Mukwege a souvent appelé la communauté internationale à reconnaître les souffrances des survivantes, à mettre fin à l'impunité des agresseurs et à soutenir la création d'un Fonds global de réparations. Répondant à son appel, le Conseil de sécurité des Nations Unies a adopté, le 23 avril 2019, la résolution 2467, par 13 voix pour et deux abstentions (Chine et Russie), dans laquelle il exige «de toutes les parties à des conflits armés qu'elles mettent immédiatement et totalement fin à tous actes de violence sexuelle» et leur demande «de prendre et de tenir des engagements précis et assortis de délais pour lutter contre la violence sexuelle». En recul sur l'avortement et opposés à la Cour pénale internationale, les Etats-Unis ont voté pour la résolution mais après en avoir fait retirer lors des négociations les mentions liées aux droits sexuels et reproductifs. La création d'un «mécanisme» facilitant la poursuite en justice des auteurs de violences sexuelles a aussi été rejetée par Washington, Moscou et Pékin. Dans sa résolution, le Conseil de sécurité encourage également les autorités nationales à renforcer la législation visant à amener les auteurs de violences sexuelles à répondre de leurs actes. Il engage les Etats membres à renforcer l'accès à la justice pour les victimes de violences sexuelles commises en temps de conflit et d'après conflit, «dont les femmes et les filles qui sont particulièrement visées par ces crimes», et à faire en sorte que les rescapés de violence sexuelle et fondée sur le genre reçoivent, dans leur pays respectif, les soins appropriés à leurs besoins particuliers et sans discrimination aucune. Le Maroc propose de suivre une approche plus holistique et complète Lors des débats, le représentant du Maroc à cette réunion, le représentant du Maroc, le diplomate chevronné Omar Kadiri a proposé de suivre une approche plus complète et holistique, qui s'attaque aux causes profondes des conflits et conforte l'inclusion des femmes aux processus de prise de décisions, en favorisant le développement humain et durable, et en encourageant les initiatives nationales visant à mettre fin à la discrimination fondée sur le genre. Il a noté que la prévention des conflits constitue un pilier central de l'agenda «femmes, paix et sécurité», de même que le Programme 2030 dont les objectifs 5 et 16 accordent une place privilégiée à la prévention des conflits. Par ricochet, il importe de soutenir la participation des femmes aux débats sur la prévention et le règlement des conflits, le maintien de la paix et de la sécurité et la consolidation de la paix au lendemain des conflits. En outre, le Maroc a appelé à lutter contre l'impunité et à renforcer l'accès à la justice pour les victimes des violences sexuelles par l'application de la politique de tolérance zéro là où les violences se produisent. Il a aussi invité à mettre fin à la stigmatisation qui entoure les victimes de violences sexuelles, et les enfants nés de telles violences, proposant aussi que les victimes soient accompagnées médicalement et ré-insérées socialement et économiquement. Adoptée le 19 juin 2015 par l'Assemblée générale des Nations unies, la Journée internationale pour l'élimination de la violence sexuelle en temps de conflit entend sensibiliser sur la nécessité de mettre un terme à la violence sexuelle en temps de conflit, rendre hommage aux victimes et aux survivantes des violences sexuelles dans le monde, ainsi qu'à toutes celles qui se sont battues pour l'élimination de ces crimes, rappelle-t-on. Cette journée s'inscrit dans la continuité de la résolution 1820 adoptée le 19 juin 2008 par le Conseil de Sécurité de l'ONU, qui rappelle que la violence sexuelle dans les conflits est un crime de guerre et qui exige des parties à un conflit armé qu'elles prennent des mesures appropriées pour protéger les civils contre cette violence.