Entre 1990 et 2015, des progrès sans précédent ont été réalisés pour réduire la pauvreté dans le monde. Le nombre de personnes vivant dans l'extrême pauvreté a été réduit de plus d'un milliard, rapporte le dernier rapport de la Banque Mondiale (BM) sur «la pauvreté et la prospérité partagée». Le rapport de la BM souligne que l'extrême pauvreté est de plus en plus concentrée en Afrique Subsaharienne en raison du ralentissement de la croissance, des problèmes liés aux conflits et à la faiblesse des institutions, et de l'incapacité à tirer parti de la croissance pour réduire la pauvreté. Il poursuit que l'Afrique subsaharienne compte aujourd'hui la majorité des pauvres de la planète et, contrairement à la plupart des autres régions du monde, leur nombre total augmente. Le nombre de personnes vivant dans la pauvreté y est passé d'environ 278 millions en 1990 à 413 millions en 2015. Alors que le taux moyen de pauvreté y était d'environ 41 % en 2015, il était inférieur à 13 % dans les autres régions. Sur les 28 pays les plus pauvres du monde, 27 se trouvent en Afrique subsaharienne, et les taux de pauvreté y sont supérieurs à 30 %. En somme, précise le rapport de la BM, l'extrême pauvreté est de plus en plus un problème sub-saharien. Les difficultés rencontrées par les pays africains sont en partie liées à leur forte dépendance à l'égard des industries extractives, qui ont de faibles retombées sur les revenus des pauvres, à la prévalence des conflits et à leur vulnérabilité aux catastrophes naturelles comme la sécheresse. Malgré une croissance plus rapide dans certaines économies africaines, comme le Burkina Faso et le Rwanda, la région a également eu du mal à améliorer la prospérité partagée. Les 40 % les plus pauvres dans la douzaine de pays d'Afrique subsaharienne couverts par l'indicateur ont vu leurs revenus augmenter en moyenne de 1,8 % par an en 2010-15 (soit légèrement moins que la moyenne mondiale de 1,9 % par an). Le fait que les revenus des 40 % les plus pauvres aient reculé dans un tiers de ces 12 pays est toutefois plus inquiétant. Objectif de BM à l'horizon 2030: réduire la pauvreté à 3% Toujours selon la rapport, les prévisions à l'horizon 2030 indiquent que l'objectif de 3 % ne sera atteint que si la croissance mondiale progresse à un rythme exceptionnellement élevé, par exemple, si tous les pays affichent un taux de croissance annuel moyen de 6 % et si le revenu des 40 % les plus pauvres augmente de 2 % de plus que la moyenne. Il pourra également être atteint si tous les pays enregistrent une croissance moyenne de 8 % par an. Mais, dans un cas comme dans l'autre, l'extrême pauvreté restera supérieure à 10 % en Afrique subsaharienne à l'horizon 2030. Par contre, si tous les pays continuent de croître au même rythme que la moyenne de leur région au cours des 10 dernières années, le taux de pauvreté dans le monde devrait rester supérieur à 5 % en 2030. Dans ce monde dichotomique, plus d'un quart de la population de l'Afrique subsaharienne vivrait dans l'extrême pauvreté alors que la pauvreté serait inférieure à 2 % dans la plupart des autres régions du monde. Ces évolutions régionales contrastées ont deux importantes conséquences. Premièrement, les efforts déployés par la communauté internationale pour éliminer les pires formes de privation doivent rester fermement concentrés en Afrique et dans les quelques autres pays où les taux de pauvreté sont très élevés. Parallèlement, le rapport de la BM indique que le sort de milliards de personnes vivant au-dessus du seuil de 1,90 dollar par jour, qui restent très pauvres dans le contexte de leur société. À l'heure où l'extrême pauvreté continue d'être élevée dans certaines régions alors qu'elle passe sous la barre des 10 % dans la plupart des autres, il est important de mieux comprendre ce que l'on entend par un monde sans pauvreté. Il ne fait aucun doute que le monde ne peut être qualifié de « sans pauvreté » si la plupart des pays atteignent le taux visé de 3 % alors que de vastes poches d'extrême pauvreté subsistent. Pour mieux comprendre la signification de l'expression « mettre fin à la pauvreté », la BM indique que nous devons disposer de nouveaux moyens de mesurer et de conceptualiser le problème. « Autrement dit, nous devons compléter le puzzle pour mieux comprendre ce qu'est un monde sans pauvreté. L'objectif de la Banque mondiale reste la lutte contre l'extrême pauvreté, et le seuil de pauvreté international continuera d'être un outil essentiel pour suivre les progrès dans ce domaine« . Pour mettre fin à l'extrême pauvreté, la BM propose que l'Afrique subsaharienne et les Etats pénalisés par la faiblesse de leurs institutions ou touchés par un conflit devront bénéficier d'une attention renouvelée. Selon les estimations de la BM, l'Inde comptait en 2015 le plus grand nombre de pauvres (176 millions) et abritait près d'un quart des pauvres de la planète. Son taux d'extrême pauvreté est nettement inférieur au taux moyen observé en Afrique, mais le nombre total de pauvres y reste élevé en raison de sa forte population. Mais les prévisions pour 2018 suggèrent que l'Inde est sur le point de perdre son statut de pays le plus pauvre au profit du Nigéria. « Le taux d'extrême pauvreté et le nombre de pauvres en Asie du Sud n'ont cessé de diminuer et cette tendance devrait se poursuivre. On assiste ainsi à un déplacement de la pauvreté de l'Asie du Sud vers l'Afrique subsaharienne« . Compte tenu de ses taux de croissance historiques, la proportion de pauvres pourrait ainsi y atteindre 87 % à l'horizon 2030. Dans ce sens, la BM suppose que si tous les autres pays du monde aient éliminé l'extrême pauvreté d'ici là, la moyenne mondiale n'atteindra 3 % que si le taux moyens en Afrique subsaharienne passe de 41 % en 2015 à environ 17 % en 2030. Une telle évolution nécessiterait un taux de croissance annuel sans précédent pour la région, conclut le rapport de la Banque Mondiale.