Le président français Emmanuel Macron est en train de vivre une horrible séquence politique. La guerre israëlienne contre la bande de Gaza a jeté une lumière crue sur les limites de sa vision politique. Le concept du « en même temps » qui lui avait porté bonheur au début de sa carrière et l'a installé comme une séduisante et triomphante étoile de la politique française, est en train de pâlir, voire carrément de se démagnétiser. Depuis le 7 octobre et les attentats du Hamas contre les israéliens, suivie d'une encore plus horrible riposte de l'armée israélienne contre les civils palestiniens, Emmanuel Macron ne sait plus où donner de la conviction ou de la proposition. Sous le choc de l'émotion et même sans prévenir son appareil diplomatique, Emmanuel Macron dégoupille l'idée de lancer le projet d'une alliance internationale contre le Hamas, sur le modèle de celle qui avait démantelé Daesh. Cette proposition avait énervé, fait sourire jaune, provoqué une indifférence et des haussements d'épaules et n'avait même pas le temps de faire Pshitt pour reprendre l'expression d'un illustre prédécesseur. Pour tenter de rééquilibrer cette position jugée excessivement pro-israélienne, Emmanuel Macron secoue l'idée d'organiser un sommet humanitaire pour venir en aide aux civils palestiniens. L'intention fut louable mais la démarche anachronique. Parler humanitaire pour les palestiniens sous une intense, permanente et meurtrière activité de bombes israéliennes, relève de l'autisme diplomatique et de l'impuissance politique. Emmanuel Macron surprend son propre monde en étant l'un des rares chefs d'Etat occidentaux à appeler à un cessez le feu, s'attirant les foudres du gouvernement israélien dont certains porte-paroles officieux sont allés jusqu'à l'accuser de friser avec l'antisémitisme. Emmanuel Macron répondait sans doute à une levée de bouclier au sein de son appareil diplomatique qui lui reproche un alignement aussi dangereux qu'inédit sur la politique guerrière israélienne, sacrifiant au passage un legs diplomatique de neutralité. L'illustration immédiate de cette confusion fut donnée à Emmanuel Macron à Dubai lors de la COP 28. Il avait pour ambition d'organiser en marge de cette prestigieuse rencontre internationale une réunion des pays arabes directement concernés par la guerre entre Israël et le Hamas. L'idée étant de montrer que la France est toujours audible et influente dans cette région. Retentissant échec. Les chefs d'état arabes concernés se sont mis aux abonnés absents. A l'exception des rencontres bilatérales, l'idée d'un sommet régional sous la présidence française, hautement médiatisé, vitrine de l'impact français, fut enterrée avec pertes et sans fracas. Le second terrain où Emmanuel Macron avait fait preuve d'une incompréhensible volte face fut sur la gestion domestique des conséquences de cette crise en France. Face à la montée de d'actes antisémites en France, les deux chefs du parlement français, Yaël Bruan-Pivet pour l'Assemblée nationale et Gérard Larcher pour le Sénat avaient appelé à l'organisation d'une marche pour la république et contre l'antisémitisme. Après une longue hésitation, Emmanuel Macron s'est abstenu d'y participer. Ce qui lui avait coûté un torrent de critiques. Or, sans doute pour rattraper ce qui peut s'apparenter à une défaillance politique, Emmanuel Macron s'est livré à un autre acte qui continue de provoquer un tourbillon de réactions, toutes plus incrédules les unes que les autres. Ce fut lorsqu'Emmanuel Macron avait autorisé une cérémonie religieuse juive. Un allumage de bougie pour la fête Hanouka, la fête des lumières juive, par le grand rabbin de France Haïm Korsia, suivi de chants religieux juifs au sein du Palais de l'Elysée. Cette démarche d'Emmanuel Macron dont il est aisé de deviner la volonté de rattraper une erreur précédente fut massivement attaquée, y compris par les hauts représentants de la communauté juive de France. Emmanuel Macron fut accusé de provoquer une entorse au principe de laïcité, lui dont le gouvernement s'est acharné à faire la chasse des signes religieux dans l'espace publique, comme les crèches dans les mairies ou le Hijab dans les écoles et les administrations. Lors d'une récente intervention médiatique, le président de la république avait tenté d'expliquer son geste et de nier qu'il y ait là une atteinte à la laïcité française, mais sans grand succès ni conviction. Le mal est fait et, sa gouvernance sur ces questions extrêmement sensibles est remise en cause. Ces voltes-face d'Emmanuel Macron ont fini par produire une image à la fois contradictoire et illisible aussi bien sur le plan international qu'interne, avec toutes les douloureuses remises en cause que cela implique.