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A quoi servent les institutions financières internationales : Banque Mondiale et FMI?
Publié dans Hespress le 10 - 10 - 2023

Nombreux sont ceux qui croient que de la Banque Mondiale et le FMI sont des leviers de développement alors que leur rôle est autre. Leur création répondait plus à des considérations catégorielles et traduisait l'état des rapports de force à la fin de la seconde guerre mondiale.
A l'époque, c'est la reconstitution des pays dévastés par la guerre qui l'emportait sur toute autre chose. Le développement n'était pas à l'ordre du jour. La majorité des pays sous-développés était sous le joug colonial. En plus, la notion de développement, ramenée souvent à la lutte contre la pauvreté, est moins utilisée par ces deux organismes que la notion de croissance.
Pourquoi donc, ces institutions ? Quelle est leur raison d'être ? A quoi servent elles réellement?
Pour répondre à ces questions, nous avons retenu l'hypothèse suivante : les organismes financiers issus des accords de Bretton Woods ont fini par user de l'arme financière pour mettre l'expertise au service de la pensée piégée (c'est-à-dire de la pensée extrémiste qui se sert de la violence dans ses différentes formes, pour s'imposer en tant que pensée unique).
D'où l'intitulé de mon intervention : les institutions financières internationales : l'expertise au service de la pensée piégée d'obédience ultralibérale. Cette thèse s'articule autour de deux axes : 1) le consensus de Washington et la question du développement, 2) l'expertise financière internationale au service de la pensée piégée.
Le consensus de Washington et la question du développement
La notion de développement est perçue tantôt en tant qu'un état, tantôt en tant que processus. Dans les deux cas, elle renvoie à des notions de croissance économique, de progrès, de bien-être, de justice sociale, d'épanouissement personnel et d'équilibre écologique ; supposant ainsi, un changement structurel couvrant différents domaines (social, économique, institutionnel, culturel et spatial).
Cette convergence ne se retrouve pas au niveau de la mise en œuvre du développement. Globalement, deux perceptions s'opposent quant à la démarche à suivre pour qu'un pays réussisse son décollage. La première qui conjugue le volontarisme à l'autoritarisme, consiste à faire de l'État le fer de lance du processus de développement et de la mobilisation des moyens humains et financiers, la condition sine qua non pour le faire aboutir.
Dans ce cadre, les politiques publiques suivies, privilégiant l'économique sur toute autre considération, développent des stratégies industrielles axées soit sur la promotion des exportations manufacturières (modèle asiatique) soit sur la substitution aux importations ou sur l'industrie industrialisante , préconisent la réforme agraire pour opérer une redistribution des terres et usent du protectionnisme pour faire bénéficier le marché intérieur de l'amélioration du pouvoir d'achat des populations.
Cette vision que véhicule notamment la théorie de la dépendance, développée par des auteurs comme Paul Prebisch, Samir Amine et Emmanuel Arghiri, considère le sous-développement non pas comme arriération des pays de la périphérie, mais comme conséquence de l'expansion du centre capitaliste à travers notamment le commerce triangulaire et la colonisation.
Pour la seconde, le développement est une affaire exclusive du marché et de ses forces occultes incarnées par la main invisible. Tout volontarisme qui est de nature à peser sur le marché et à entraver ses forces est à bannir. L'État, dans ce cas, doit s'abstenir à intervenir et à dresser des barrières de nature à priver l'économie locale des avantages comparatifs qu'assure le libre-échange et des bienfaits de la mondialisation. Son rôle doit être réduit à sa simple expression.
A la sortie de la guerre, ces deux perceptions étaient en compétition dans le cadre d'un ordre international bipolaire qui s'est prolongé jusqu'au 1991, date du démantèlement de l'empire soviétique.
Les accords de Bretton Woods (1944) se souciaient moins du développement que de la consécration des États-Unis en tant que chef de file du monde dit libre dans le cadre d'une rivalité idéologique avec le bloc de l'Est représenté par l'URSS.
Dans ce contexte, ces accords se sont assignés comme objectif : 1) d'aider les pays qui ont été dévastés par la seconde guerre mondiale à se reconstruire et 2) d'instaurer un nouveau système monétaire et financier international. Celui-ci a constitué la pomme de discorde entre l'impérialisme montant incarné par les États -Unis, principal vainqueur de la seconde guerre mondiale, et l'impérialisme franco-britannique en déclin.
Deux visions, donc, se sont opposées, celle du britannique J.M. Keynes qui voulait un système monétaire international basé sur une unité de réserve non nationale, le bancor, et celle de l'américain Harry Dexter Whiel qui proposait la création de deux institutions : Une banque de reconstruction et un fonds destiné à stabiliser le nouveau système monétaire qui devrait faire du dollar son axe pivot. C'est justement la vision américaine qui s'est imposée.
Ainsi, il y a eu création, du Fonds Monétaire International (FMI) et de la BIRD. Celle-ci s'est érigée par la suite en groupe en créant 4 institutions à savoir IDA (Association Internationale de développement) dont la mission est de lutter contre la pauvreté, IFC (Société Financière Internationale), MIGA (l'Agence multilatérale de garantie des investissements) et CIRDI (Centre International pour le règlement des différends relatifs aux investissements).
En fait, les accords de Bretton Woods ont constitué un tournant historique dans la reconfiguration de l'ordre international issu de la seconde guerre mondiale et l'instauration d'un système monétaire international consacrant la suprématie des États-Unis à travers le dollar notamment.
L'expertise financière internationale au service de la pensée piégée
Dans ce cadre, l'aspect international des deux institutions financières internationales, en l'occurrence le FMI et la Banque Mondiale, est trompeur dans la mesure où il donne l'illusion que ces organismes sont totalement indépendants et qu'ils n'agissent qu'en tant qu'experts en faveur des pays membres.
En fait, leur dimension internationale et leur caractère technique qui leur donnent une certaine légitimité, profitent principalement à l'impérialisme américain dont ils se sont révélés des instruments de domination. En effet, leur rôle s'est adapté au fil du temps pour consacrer le leadership américain. En fait, leur expertise n'est qu'un leurre pour détourner les regards de ce qu'ils sont réellement. Il suffit de voir comment le champ d'intervention du FMI a évolué pour s'en rendre compte.
Initialement, le FMI avait comme mission de :
– Promouvoir la coopération monétaire internationale ;
-Faciliter l'expansion et l'accroissement harmonieux du commerce international ;
-Promouvoir la stabilité des changes par le maintien entre les États membres des régimes de change ordonnés, et ce, pour éviter les dépréciations concurrentielles des changes ;
– Donner confiance aux États membres en mettant les ressources générales du Fonds temporairement à leur disposition moyennant des garanties adéquates, leur fournissant ainsi la possibilité de corriger les déséquilibres de leurs balances des paiements sans recourir à des mesures préjudiciables à la prospérité nationale ou internationale (cf. les statuts du FMI).
Par la suite, le FMI a été appelé à réajuster son rôle pour prendre en considération le décrochage du dollar suite à la décision des États-Unis, le 15 août 1971, de suspendre sa convertibilité en or.
Ce réajustement s'est traduit par la surveillance des équilibres macroéconomiques, mission qui a évolué pour mettre les pays qui demandent assistance, sous « protectorat » du FMI et leur faire avaler des couleuvres.
En effet, avec la crise de la dette souveraine des pays sous-développés, intervenue à la fin des années 1970 début des années 1980, suite d'une part, à un recours massif de ces pays à l'endettement, voulu et encouragé par le capital financier, pour absorber la surliquidité due au recyclage des pétrodollars et d'autre part, à une mauvaise affectation de ces fonds drainés, le FMI s'est trouvé dans une position de force pour s'immiscer dans les affaires internes de sa clientèle en l'obligeant à adhérer à sa perception et à se conformer à ses « recommandations » qui ne sont, en fait, que la déclinaison du « consensus de Washington » sous forme de Programme d'Ajustement Structurel (PAS) .
Ce « Consensus » est un accord tacite entre le Fonds Monétaire International (FMI) et la Banque mondiale (BM), sous l'égide du Trésor américain et avec la bénédiction du Capital financier , pour n'assister financièrement les pays sous-développés en difficulté (surendettement, hyperinflation, déficits budgétaires, etc.) qu'à condition qu'ils adoptent le « consensus de Washington », expression qui tire son nom d'un article de l'économiste John Williamson (1989) consacré aux dix commandements à connotation ultralibérale déclinés en tant que consensus et formulés comme suit :
– Discipline budgétaire stricte qui consiste à équilibrer les dépenses et les recettes,
– Redéfinition des priorités en matière de dépenses publiques en faveur de la croissance et de l'aide directe aux pauvres en procédant notamment à la décompensation,
– Réforme fiscale pour établir un régime combinant une large assiette fiscale et des taux d'imposition marginaux modérés,
– Stabilité monétaire,
– Adoption d'un taux de change unique et compétitif,
– Libéralisation du commerce extérieur,
– Elimination des barrières à l'investissement direct étranger,
– Privatisation des entreprises publiques,
– Déréglementation des marchés en levant les barrières à l'entrée comme à la sortie,
– Prise en compte des droits de propriété y compris les droits de propriété intellectuelle.
En fait, ce consensus a profité des limites de la théorie de dépendance, dans ses diverses variantes, pour se repositionner en tant qu'unique alternative.
Les politiques qui avaient pour fondements théoriques le « développement autocentré » et que des pays du tiers-monde (en Amérique latine, mais aussi en Afrique et au Moyen-Orient) avaient adoptées entre 1960 et 1980, ont toutes conduit à des performances économiques et sociales, le moins qu'on puisse dire, décevantes.
Il va de soi que ces deux approches sont deux extrêmes diamétralement opposées. Le commerce international, pour ne prendre que cet exemple, est vivement encouragé par le consensus de Washington en raison des avantages comparatifs qu'il procure alors que les tenants du développement autocentré le considèrent comme structurellement biaisé en faveur des pays riches et au détriment des pays sous-développés, aboutissant à des transferts de ressources du Sud vers le Nord à travers la dégradation des termes de l'échange.
Cependant, ces deux approches relèvent de l'extrémisme et partagent, en conséquence, ses méfaits. De ce fait, elles sont exclusives et plus disposées à faire usage de la violence dans ses différentes formes pour s'imposer en tant que pensée unique. Aussi, sont-elles des pensées piégées potentielles. Le consensus de Washington, en est l'illustration.
Le FMI a progressivement évolué pour remplir deux fonctions :
– La première consiste à user de l'arme financière pour promouvoir la pensée piégée d'obédience ultralibérale. Ainsi, le FMI conditionne son assistance financière pour redresser les équilibres macroéconomiques par l'adhésion des pays qui sollicitent son aide au « consensus de Washington », érigée en pensée piégée, et la mise en œuvre de sa version pratique, le PAS. Dans ce cadre, ces pays sont obligés à renoncer à leurs acquis, notamment sociaux, et à se conformer aux « recommandations » de cette institution en procédant à la déconstruction de l'existant et à la construction d'un système répondant à ses exigences.
Cette fonction est fortement critiquée surtout par des anciens du FMI (Stiglitz) en raison de sa brutalité et de ses effets néfastes. Elle provoque l'avortement des sociétés des pays qui acceptent à renoncer à leur souveraineté, bloque leur imaginaire collectif et les prive de la capitalisation de l'expérience. En plus, les dégâts collatéraux du Programme d'Ajustement Structurel (PAS) les handicapent et hypothèquent même leur avenir. L'état piteux où s'est trouvé des secteurs d'une importance capitale, tels l'enseignement et la santé, après le passage du tsunami ultralibéral, en dit long sur la violence subie par ces sociétés.
Le Maroc, pour ne prendre que cet exemple, continue à souffrir de ces dégâts trente ans après avoir appliqué ce programme. Enfin, le FMI a montré son incapacité à anticiper les crises et à les résoudre.
– Moins apparente que la première, la deuxième fonction que partage le FMI avec le dollar en tant que monnaie internationale de réserve et des organismes internationaux comme la Banque Mondiale et l'OMC, consiste à :
1- Éviter à l'impérialisme américain d'être à découvert. Dès le début, cet impérialisme a tenu à être moins visible que l'impérialisme franco-britannique. Il s'est efforcé à ne pas s'exposer en disposant de paravents et en mettant à contribution certains atouts.
A cet effet, les États-Unis, la seule puissance occidentale qui n'a pas un passé colonial, ont été, à la sortie de la seconde guerre mondiale, favorables à la décolonisation et au respect du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Leur rôle pendant cette guerre a été déterminant, faisant d'eux les libérateurs de l'Europe. Par la suite, ils se sont érigés en rempart contre le soviétisme avant de déclarer la guerre au terrorisme.
Il est, dans ce cas, difficile de les assimiler à des colonisateurs comme la Grande-Bretagne ou la France et de les taxer d'impérialistes alors qu'ils revendiquent le statut de défenseurs de la liberté et des droits de l'homme et ne cessent de faire valoir leur lutte en faveur de la démocratie. On peut donc dire, quitte à forcer le trait, que si l'impérialisme britannique était subi, l'impérialisme américain est, dans une certaine mesure, voulu. C'est justement ce qui l'a rendu moins visible, état que le FMI et d'autres instruments et mécanismes ont cherché à consacrer.
2- Entretenir l'hégémonisme culturel. « Toute conquête du pouvoir doit d'abord passer par un long travail idéologique, une lente préparation du terrain au sein de la société civile. Il faut, peu à peu, subvertir les esprits, installer les valeurs que l'on défend dans le domaine public afin de s'assurer d'une hégémonie culturelle avant et dans le but de prendre le pouvoir » (cf. Gramsci).
C'est justement ce travail en profondeur que l'ultralibéralisme a accompli avant de gagner la bataille culturelle et se propulser sur le devant de la scène pour accéder au pouvoir et asseoir sa domination politique.
Thatcher et Reagan, deux figures de proue qui ont incarné ce tournant néolibéral mondial, ont, dès leur accession au pouvoir respectivement en Grande-Bretagne (1979- 1990) et aux États-Unis ((1981-1989), fixé le cap et donné le ton. Pour la dame de fer, « la société n'existe pas ». Quant à Reagan, il a déclaré dans son discours d'investiture : « Le gouvernement n'est pas la solution à nos problèmes, le gouvernement est le problème ».
L'ultralibéralisme a profité d'un concours de circonstances favorables pour consacrer son hégémonie. Les chocs pétroliers de 1973 et 1979 et la stagflation qui en est suivie, les crises de dette souveraine des pays sous-développés ; l'échec des politiques volontaristes menées par ces derniers, les nouvelles techniques d'information et de communication qui sont à l'origine de la nouvelle forme de mondialisation, la montée en puissance du capital financier et le démantèlement du bloc soviétique, sont autant de facteurs qui ont été mis à contribution par l'extrémisme dans ses différentes formes pour s'ériger en norme et s'imposer, ainsi, en tant que pensée piégée.
Le monde qui croyait, à la fin de la seconde guerre mondiale, qu'il s'est définitivement débarrassé de la pensée piégée notamment dans sa version étatique (nazisme et fascisme), a été pris de court à partir de 1979 avec le retour en force de cette pensée en particulier et de l'extrémisme de droite en général, sous de nouveaux visages : l'islamisme radical, chiite (en Iran) et sunnite (Al-Qaeda, Daesh), l'ultralibéralisme qui a élu domicile au 10 downing street avec le Thatchérisme avant que le reaganisme occupe le bureau ovale de la maison blanche pour le céder par la suite au néo-évangélistes.
Il va sans dire que l'hégémonie culturelle d'obédience ultralibérale a fini par mettre à son service des supports et des courroies de transmission et d'amplification, à l'instar des universités, des think think, des institutions financières, scientifiques, culturelles et artistiques, des masses média, des organisations de la société civile et des corps intermédiaires (partis politiques, syndicats...).
Ces supports ont pris sur eux la diffusion des valeurs ultralibérales et la propagation de ses représentations pour conquérir les esprits, obtenir le consentement et l'adhésion du plus grand nombre.
Le FMI, faisant partie de ces supports, continue à participer activement à la consolidation de cette hégémonie en amenant les élites et l'opinion publique des pays qui se sont mis sous sa tutelle, à s'approprier sa vision et à accepter la pensée ultralibérale comme « allant de soi » et l'admettre en tant que pensée unique.
L'hétérodoxie est combattue. Au mieux, elle ne peut se déployer qu'à la marge. Ainsi, la science économique est réduite à une idéologie et l'expertise à un dogme. Dans ce cadre, nos économistes (universitaires, cadres de l'Administration et de l'entreprise) pèchent, généralement, par excès de zèle et se montrent plus obstinés à défendre les thèses néolibérales. Nos hommes et femmes politiques font preuve d'un conformisme déconcertant. Bref, nos élites ont tourné le dos à l'esprit critique et à l'imaginaire collectif pour se consacrer à l'assimilation des « recommandations » du FMI et à leur mise en application avec dévouement.
3- Prendre en considération le coût que généré la domination du monde. À la différence de l'impérialisme franco-britannique, l'impérialisme américain a, dès son apparition, œuvré pour compresser au maximum le coût de constitution et d'entretien de son empire. Dans ce cadre, le FMI ne s'est jamais préoccupé des équilibres macroéconomiques des États-Unis et ne s'est point inquiété de ses finances publiques (déficits et surendettement) et de la politique monétaire de la FED (quantitative easing), et pour cause.
Le statut international du dollar procure à ce pays une rente qu'on peut qualifier d'impériale, se traduisant par le financement de ses déficits par le reste du monde. En effet, ce statut fait que cette devise est très recherchée en tant monnaie de réserve. Par conséquent, elle fait des Etats-Unis, le pays le plus attractif pour le placement de l'épargne du reste du monde.
En revanche, le FMI a réussi à maintenir les pays sous-développés, notamment ceux qui ont sollicité son aide, dans un état de dépendance, tout en leur faisant supporter le coût de sa reproduction, et les a amenés à se convaincre qu'ils sont incapables d'éviter la faillite sans son assistance. Peu importe qu'ils restent sous-développés, l'essentiel pour eux est de parer à la déroute, quitte à payer le prix. D'ailleurs, aucun de ces pays n'est sorti indemne du PAS. Et pourtant, ils ont continué à faire du consensus de Washington leur feuille de route.
Le Maroc en est un exemple édifiant. À la sortie du PAS, en 1993, il s'est lancé dans des réformes tous azimuts dans l'espoir de promouvoir l'économie de marché. Trente ans après, le Maroc a certes évolué, mais il n'a pas progressé. Il a continué à réformer avec la bénédiction du FMI sans résultats tangibles. À l'exception du marché de travail qui fait actuellement l'objet de tractations entre les partenaires sociaux, la libéralisation des autres marchés (financier et des biens et services) ou en cours de libéralisation (marché de change), la privatisation du secteur public, l'ouverture sur les marchés extérieurs et l'option pour le libre-échange (54 accords), n'ont pas suffi pour instaurer l'économie de marché.
Parallèlement, les efforts de redressement de certains secteurs sociaux qui ont le plus souffert du PAS, à l'instar de l'enseignement et de la santé, continuent à obérer les finances publiques et à hypothéquer l'avenir du pays. La généralisation de la prévoyance sociale qu'il faut mettre à l'actif de l'Etat, bien qu'elle soit intervenue avec beaucoup de retard, nécessite une enveloppe conséquente (54milliards). Quant à l'enseignement, il est toujours dans la salle des soins intensifs depuis qu'il en a été admis en 2002. Opérer dans un premier temps (2002- 2012) puis dans un deuxième (2012-2015) avant de subir une troisième opération (2015-2030) sans qu'aucune garantie que celle-ci sera la bonne.
En guise de conclusion, les vecteurs de la pensée piégée tendent souvent à se confondre avec cette pensée et n'arrivent que difficilement à s'en détacher tant que les conditions initiales qui sont à l'origine de leur engagement sont de mise. C'est le cas du FMI. Tant que les États-Unis ne sont pas contraints de changer leur fusil d'épaule, il lui sera difficile de revisiter le consensus de Washington et d'enterrer la « hache de guerre » que représente l'arme financière.
De même, les pays qui croient que le FMI a prescrit un remède de cheval à leurs économies et que ce n'est qu'une question de temps pour produire ses effets, se trouvent en fait dans une situation similaire à celle des prisonniers de la caverne de Platon avec, cependant, une différence de taille. Ces pays sont plutôt des otages et non des prisonniers, victimes, en quelque sorte, du syndrome de Stockholm qui les empêche voir l'entrée de la grotte et la lumière du jour.
*Economiste et romancier


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