Le nouveau télescope James Webb s'apprête à prendre son envol, prévu le 22 décembre à partir de la Guyane française, avec pour mission de lever le voile sur les conditions susceptibles d'abriter la vie en dehors de notre système solaire. Fruit d'un programme conjoint des agences spatiales américaine (NASA), européenne (ESA) et canadienne (ASC), Webb, le plus puissant des observatoires en orbite, dont l'ultime objectif est d'examiner de plus près les exoplanètes, étudiera également la formation des étoiles et mesurera la composition de l'atmosphère des planètes autour d'autres étoiles. La première exoplanète observée, à savoir la 51 Pegasi b, a été découverte en 1995 et, depuis, quelque 5.000 autres ont été répertoriées, des géantes gazeuses semblables à Jupiter ou Neptune, dans notre système solaire, aux planètes rocheuses comme la Terre. Toutefois, outre le fait qu'elles ne sont ni trop proches ni trop éloignées des étoiles autour desquelles elles gravitent, peu de choses sont connues sur ces planètes et sur leur composition. Equipé d'une nouvelle technologie appelée MIRI (Mid-Infrared Instrument), le nouveau télescope de la NASA utilisera une caméra et un spectrographe pour observer la lumière dans la région du spectre électromagnétique située dans l'infrarouge moyen, invisible pour l'œil humain, dans l'espoir de combler les lacunes des astrophysiciens en la matière. En effet, le télescope Webb est conçu pour voir la lumière qui voyage depuis des centaines de millions d'années, plus longtemps que la lumière des étoiles visibles, y compris les plus faibles. Il remontera des milliards d'années dans le temps afin d'observer la formation précoce de l'hydrogène moléculaire à partir d'un univers vide et sans forme. D'autres instruments à bord du télescope lui permettront de scruter les nuages de poussière intergalactiques et d'analyser la composition des planètes dans les systèmes solaires lointains. Partenaire principal, la NASA a développé le bus spatial du Webb, le bouclier thermique et le télescope lui-même, le plus grand jamais envoyé dans l'espace. Les Américains étaient également responsables d'une partie de l'ensemble des instruments infrarouges de Webb, tandis que l'ESA assure le lancement sur une fusée Ariane 5 et a fourni d'autres éléments des instruments destinés à recueillir des tonnes de données sur le cosmos. Pour sa part, le Canada a fourni des pièces d'instruments et un capteur de guidage pour maintenir Webb bien orienté sur ses cibles célestes. Conçu à l'origine dans les années 1990 avec un budget de 500 millions de dollars, le télescope Webb, qui a résisté aux menaces d'abandon aux moments où la complexité de la mission ajoutait des années et des milliards à la comptabilité, demeure une audacieuse aventure aux promesses scientifiques énormes. A l'instar du rover Persévérance qui s'est posé sur Mars en début d'année, le télescope Webb fait appel à l'ingéniosité de la communauté scientifique pour aller audacieusement là où les humains ne peuvent pas survivre. Ces machines étonnantes prolongent ainsi les sens et surtout les cerveaux au-delà des orbites terrestres basses où les astronautes sont bloqués depuis l'aube de l'exploration spatiale et risquent de le rester dans un avenir proche, voire pour toujours.