Paysage de grande beauté, le Drâa fut aussi, pendant longtemps le berceau d'une culture savante. En témoignent ces milliers de manuscrits possédés par des particuliers ou rangés dans des bibliothèques soigneusement protégées par des marabouts qui font de leurs zaouias des centres d'épanouissement scientifique et spirituel. Si la zaouia de Tanmslat (Elkadirya) et celle de Taqounit (Essalhiya) ont perdu, au fil des années, beaucoup de leur richesse livresque, celle de Tamnougalte, près d'Agdez, contient encore quelques manuscrits rares traitant de l'étude du Coran, de la tradition du prophète et de la langue arabe. La zaouia naciria, la plus célèbre de toutes les zaouias du Sud a pu léguer aux générations successives un héritage manuscrit des plus prestigieux. Sa grande bibliothèque sise à Tamegrout fut inaugurée dès le début du XIéme siècle de l'hégire (début du XVIéme siècle chrétien) pour se développer et s'enrichir au cours des siècles. Elle conservait jusqu'à 1973, 4200 manuscrits, traitant de tous les genres du savoir. Son fondateur, Sidi Abou Abdellah Bennacer, dont le mausolée culmine honorablement entre le Zaouia et la bibliothèque, fut un grand exégète, le plus connu et le plus vénéré de ses contemporains. Il était un vrai soufi qui achetait des livres, les copiait ou les faisait copier. Défiant les hivers les plus rudes et les été les plus torrides et sans guère se soucier de l'insécurité ambiante, il a pu, au cours de ses deux pèlerinages à la Mecque, en 1060 puis en 1070 de l'hégire, enrichir sa bibliothèque naissante de milliers de manuscrits inestimables et rarissimes. Son désir insatiable de se procurer des livres lui a valu, au Machrek comme au Maghreb, le joli surnom de faucon des livres. A sa mort, sa bibliothèque complait plus de 60 000 manuscrits. Un tel sacrifice allait se poursuivre avec son fils Abou Alaabas Ibno Nacer qui achetait les manuscrits par certaines ou les faisait copier au prix fort. Emboîtant le pas de son père, chaque fois qu'il se rendait à la Mecque pour accomplir son pèlerinage, il patienter pour nouer contact avec les savants, ouléma, des contrées qu'il traversait. Il était toujours prêt à contacter d'énormes dettes pour s'approvisionner en livres. Ses amis et ses compagnons qui lui en faisaient le reproche ne savaient pas qu'il allait fonder et diriger, de son vivant, une medersa (école) qui compterait plus de 1400 talebs (élèves) dont 700 deviendraient de vrais ouléma. D'une main à l'autre, le flambeau continuait de briller de ses mille feux et l'œil protecteur des marabouts NACIRI veillait inlassablement sur ce trésor inestimable pour le protéger, encore une fois, au début du XXéme siècle, contre la convoitise du colonisateur français. Â peine informé de l'arrivée à Zagora du représentant du protectorat français, Sidi Abdessalam NACIRI, alors commandant de la zaouia, prit l'intelligente décision de vider la bibliothèque de son trésor pour l'enterrer, en catimini dans des souterrains. Se rendre à Tamegrout pour visiter la bibliothèque est plus d'un privilège. Par le plaisir qu'elle offre et l'engouement qu'elle suscite, cette bibliothèque constitue un haut lieu de savoir oû le temps et l'espace perdent leurs notions. En regardant de près les ouvrages précieux qu'elle renferme, on remonte le temps jusqu'aux premiers siècles de l'Islam comme on y trouve un peu de Fès, de Damas, de Baghdad et de Jérusalem et, bien sûr, beaucoup de la Mecque et de Médine . Ce grand patrimoine culturel de la province de Zagora vient s'jouter et fait incontestablement partie des énormes potentialités touristiques de la province et des sites à visiter impérativement une fois à Zagora.