Le projet de loi 13-21 portant usage légal du cannabis ouvre la voie vers l'exploitation industrielle et pharmaceutique de cette plante et de ses dérivés, mais aussi vers son usage dans le champ médical. Les explications du Pr Jaafar Haïkal. Sur ce volet, il y a d'abord lieu de dissiper toute incompréhension qui puisse entourer le sujet : Il ne s'agit nullement d'autoriser l'usage récréatif de cannabis, tient à préciser Pr. Jaafar Haïkal, professeur en médecine et expert en management sanitaire, mais de la consommation d'un produit dérivé du cannabis (médicament) à usage thérapeutique et sur prescription médicale. En effet, la plante de cannabis contient deux substances actives : Le cannabidiol (CBD) et le tétrahydrocannabinol (THC). "C'est l'utilisation à un certain dosage de ces composantes qui vont nous servir sur le plan médical et thérapeutique", explique Pr. Haïkal à 2M.ma.
"Il ne s'agit nullement d'autoriser l'usage récréatif de cannabis, mais de la consommation d'un produit dérivé à usage thérapeutique et sur prescription médicale". (Pr. Jaafar Haïkal)
Les usages de médicaments à base de ces substances extraites de la plante de cannabis sont multiples. Ils peuvent être prescrits pour soulager des "douleurs importantes" dont souffrent les patients atteint de cancers ou de maladies chroniques, et aussi dans le cas de "maladies neurologiques pour lesquelles l'efficacité des dérivés du cannabis est aujourd'hui clairement avérée à l'exemple de la sclérose en plaque, l'épilepsie et autres", développe le médecin. Aussi, les scientifiques continue d'explorer les possibilités d'usages du cannabis dans le champs médical. "Beaucoup de recherches sont en cours" et les potentialités sont "prometteuses" selon Pr. Haïkal. Aussi, l'existence de médicaments comportant ces substances étoffe assurément l'éventail de choix qui s'offrent aux médecins, mais ceci ne signifie pas de les "prescrire à tort et à travers". "Comme pour tous les médicaments, des dossiers AMM (d'autorisation de mise sur le marché, ndlr) doivent être élaborés, et l'autorisation ministérielle sera délivrée à chaque médicament pour des indications strictement définies", rassure le professeur, en estimant que l'apport en sera "positif pour les patients et les professionnels de santé".
Les médicaments à base des substances extraites de la plante de cannabis sont multiples et peuvent être prescrits pour soulager des "douleurs importantes" et dans la prise en charge de certaines maladies neurologiques pour lesquelles l'efficacité des dérivés du cannabis est aujourd'hui clairement avérée ". (Pr. Jaafar Haïkal )
Et à l'expert de rappeler que "la médecine n'est pas une science exacte", mais que les médecins apprennent et s'adaptent au fur et à mesure qu'ils traitent les maladies. Il en donne un exemple révélateur : "Il y a un an, nous ne connaissions pas la Covid-19, mais nous avons appris à connaitre cette maladie et la traiter, et nous avons réussi au Maroc à atteindre un taux de guérison de 97% avec nos moyens et les connaissances scientifiques disponibles". Ainsi, une phase d'adaptation des médecins avec ces nouveaux produits est prévue. Pr. Haïkal attire cependant l'attention sur un aspect "crucial et fondamental" relevant de la réglementation, à savoir le contrôle des niveaux de THC et de CBD présents dans le produit thérapeutique ou médicamenteux (mission qui incombe à l'Agence nationale de réglementation des activités relatives au chanvre indien). "Ces deux composantes sont liées et il est très difficile de les séparer, c'est pour cela qu'il faudra développer une industrie et des compétences particulières dans ce sens", souligne-t-il, indiquant que le Maroc est capable de développer un savoir-faire propre en la matière "dans un cadre réglementé et bien précis".
"Le Royaume pourrait jouer un rôle pionnier dans la recherche scientifique et médicale autour de cette plante, profiter de ses vertus médicamenteuses et thérapeutiques, et enclencher une dynamique de développement socioéconomique qui bénéficie aux provinces du Nord". (Pr Jaafar Haïkal)
En somme, l'usage légal du cannabis à des fins médicales et industrielles au Maroc ouvre la voie à une multitudes d'opportunités. Le Royaume pourrait jouer un rôle pionnier dans la recherche scientifique et médicale autour de cette plante, profiter de ses vertus médicamenteuses et thérapeutiques, mais aussi enclencher une dynamique de développement socioéconomique qui bénéficie aux provinces du Nord. "Les patients vont y gagner, les agriculteurs vont y gagner, l'Etat va y gagner", conclut le médecin.
* Culture, production, transformation et exportation du cannabis... Ce que prévoit le projet de loi 13-21