La loi 10-98 ne permet que la titrisation des créances hypothécaires consenties à des particuliers pour lacquisition et la construction de logements individuels. Lidéal serait sans doute lélargissement du champ de la titrisation à toutes les autres formes de créances. Les conséquences immédiates sont la possibilité de transférer les risques et la libération des fonds propres. Les éclaircissements de Hicham Karzazi, Directeur général de Maghreb Titrisation. Finances News Hebdo: Quel bilan faites-vous des opérations de titrisation depuis quelles ont été lancées au Maroc ? Hicham Karzazi : Le bilan est excellent. Les deux fonds de titrisation qui ont été lancés par le CIH (le premier est de 500 millions de DH et le second est dun milliard de DH) se portent parfaitement bien. Les clients et les investisseurs sont satisfaits. Je dirai même quil y a dautres secteurs qui sintéressent de plus en plus à la titrisation, et cest pour cette raison que le texte de loi doit être élargi pour leur permettre den profiter en tant quoutil de financement. Mais, en général, il y a toutes les raisons de croire que la titrisation fait son chemin, et que doucement et sûrement elle prendra de plus en plus dampleur dans les années à venir. F. H. N. : Croyez-vous que la titrisation peut être un excellent outil de gestion des risques, et donc garante dune exécution optimale des dispositions de Bâle II ? H.K. : Parmi les avantages que procure la titrisation, figure celui qui permet à létablissement cédant de créances, de transférer partiellement ou entièrement le risque inhérent à ses créances. En théorie, le risque peut être transféré entièrement, mais dans la pratique, une partie du risque est souscrite par le cédant lui-même parce que les investisseurs ne sont pas les premiers exposés aux différents aléas liés aux créances. Pour ce qui est de Bâle II, la titrisation permet effectivement de libérer les fonds propres suite à la cession des créances, et cest un grand avantage pour les banques. Seulement, le contexte actuel est caractérisé par la surliquidité et par un texte de loi qui est très contraignant en termes de possibilités de titrisation. De ce fait, quand on parle de la titrisation, il ne faut pas sattendre à des choses extraordinaires dès lors que les banques financent aujourdhui toutes sortes dactivités et ont donc des portefeuilles de créances très diversifiés. Et, malheureusement, la titrisation ne leur permettra pas de gérer activement tous ces risques. Pourquoi ? Eh bien, la loi 10-98 ne permet la titrisation que des créances hypothécaires consenties à des particuliers pour lacquisition et la construction de logement individuel. De ce fait, les créances à la consommation, les crédits à léquipement et les crédits libres ne sont pas régis par cette loi. Il y a aussi le problème de liquidité. Même si la loi rend possible la titrisation de ce type de créances, peut-on juger opportune laugmentation de la liquidité bancaire juste pour libérer les fonds propres ? Cette décision peut ne pas aller dans le sens de la titrisation, puisque les excédents de liquidité se situent aujourdhui à des niveaux considérables. Ce qui serait idéal, cest que les fonds de titrisation puissent acheter des risques uniquement, et ce sur tous les types de créances bancaires. Cela permettra aux banques de ne pas être obligées à céder les portefeuilles et donc ne pas augmenter leurs liquidités, et se contenter de vendre le risque en payant au fonds un prêt de couverture; et cest de cette manière que lon peut voir la titrisation comme un outil idéal de gestion du risque. Malheureusement, il ne sagit que dun schéma idéal. Toutefois, il y a dans ce sens des initiatives relatives à lamendement du cadre juridique relatif à la titrisation. Il sagit là de mesures prévues et attendues avec beaucoup dimpatience. F. N. H. : Au cas où la loi rendrait possible lélargissement du champ de la titrisation, quel sera, à votre avis, le rendement moyen quune banque doit proposer à une autre ou à une compagnie dassurance, sur chaque portefeuille «créances», et qui vous semble opportun pour faciliter un transfert transectoriel du risque ? H. K. : Quand on parle du rendement à proposer pour faciliter ce transfert, on parlera forcément de larbitrage qui existera entre les différentes institutions. Concernant les risques sur les portefeuilles, larbitrage consiste à décider entre un rendement précis et une notation. La question est donc : est-ce que la société acceptera un portefeuille avec une certaine notation étant donné son niveau de fonds propres? Il faut savoir quaux Etats-Unis, les portefeuilles titrisés sont soumis à des notations; ce qui revient à dire que la compagnie dassurance ou la banque, avant daccepter de souscrire à un portefeuille, prend en considération un certain nombre de variables, notamment ses règles prudentielles, la notation et aussi le rendement. Bref, ce sont les résultats tirés de lanalyse de ces variables qui pousseront cette banque ou cette compagnie dassurance à accepter ou ne pas accepter le transfert dun risque : il sagit dun véritable marché, et tout marché se caractérise par une loi de loffre et de la demande.