* Le gouvernement attaque les secteurs dont la contribution aux recettes de lEtat est en deçà de leur potentiel. * Limmobilier est en ligne de mire car le secteur bénéficie de 10% des dérogations pour un manque à gagner de 4 Mds de DH. Plusieurs indicateurs laissent présager que le gouvernement veut réduire les niches fiscales, ou du moins en limiter les effets. Ces dispositions coûtent à lEtat une perte de plus de 28 Mds de DH, selon les prévisions de la Loi de Finances 2010, soit une moyenne annuelle de 4% du PIB. En contrepartie, les effets escomptés ne sont pas toujours au rendez-vous. A cet égard, le ministère des Finances, sur recommandation de la Direction des impôts (DGI), devrait sattaquer à ces niches. La démarche se fera secteur par secteur. La DGI dispose dune base de données sur les activités qui sont passibles de fraude ou qui bénéficient abusivement de dérogations. Dans la ligne de mire, se trouvent les branches à fort taux de croissance, dégageant des marges conséquentes mais dont les recettes fiscales sont en deçà de leur potentiel. Depuis quelques années, le nombre des dérogations fiscales na cessé de baisser ou du moins de stagner. Elles étaient au nombre de 392 pour la Loi de Finances 2009, contre 393 pour le projet de 2010. «Il ne faut pas oublier que le rôle de limpôt nest pas uniquement dordre budgétaire ou quil vise à renflouer les caisses de lEtat, il est aussi dordre économique et social», a affirmé Youssef Oubouali, professeur de droit fiscal à la Faculté de droit de Settat. Il explique que «pour des raisons déquité fiscale, le ministère des Finances et la DGI ont la responsabilité dinstaurer une certaine justice fiscale. Il est hors de question quun secteur ou une activité se base uniquement sur le paramètre fiscal pour assurer son survie ou fructifier son chiffre daffaires. Alors quil est contribuable par excellence». Parmi les secteurs les plus traqués par les agents du Fisc, figurent limmobilier et les professions libérales. A cet égard, le ministère des Finances a ordonné des enquêtes sur ces activités. Pourquoi limmobilier ? Parce que le secteur bénéficie de 10% des dérogations octroyées, causant un manque à gagner pour les recettes fiscales de près de 4 Mds de DH. Le timing de la recommandation de létude de Mc Kinsey et sa publication nest pas fortuite. Salahedine Mezouar, ministre des Finances, veut contrer les lobbying à la Chambre des conseillers, puisque le texte a passé le stade de la Chambre des représentants pour décrocher des dérogations fiscales destinées au logement social. Pour le secteur de limmobilier, les conclusions de létude de Mckinsey font ressortir que le secteur peut dégager des marges bénéficiaires pouvant varier entre 15 à 20% pour le logement social, 30 à 50% pour le moyen standing et entre 50 et 100% pour le haut standing. Les professionnels du secteur sont montés au créneau pour dénoncer les résultats de létude. La Fédération nationale des promoteurs immobiliers (FNPI) a estimé que «la campagne menée actuellement par la presse est une volonté délibérée de dénigrer le secteur». La fédération regette lapproche adoptée, «centrée essentiellement sur les marges des promoteurs, en cette conjoncture relativement difficile pour le secteur et à un moment où un processus de concertation entre les opérateurs et les partenaires publics est lancé pour sortir de cette situation de crise». Le gouvernement étudie la possibilité dautres alternatives aux incitations fiscales pour doper le logement social comme laide directe aux personnes éligibles. Pour la question des marges, la FNPI estime que le haut standing ne représente que 5% du marché et quil connaît beaucoup de difficultés en matière de commercialisation. Sagissant de lhabitat social, la FNPI réitère qu «aucune marge ne peut être dégagée dans les conditions actuelles du marché, sachant que le prix du foncier a atteint, principalement dans les grandes agglomérations, des niveaux de prix incompatibles avec la concrétisation dune rentabilité acceptable, eu égard aux exigences de qualité et de sécurité prônées par la profession ». Outre le secteur de limmobilier, les professions libérales sont également sous les projecteurs du Fisc. Les découpages des agents de la DGI ont conclu que lévasion fiscale est très élevée, surtout chez les médecins, notamment en ce qui concerne les déclarations de revenus. Les mouvements dans les comptes bancaires ou les déclarations chez les compagnies dassurance donnent quelques indications sur le chiffre daffaires réalisé. Face à la baisse des recettes fiscales et lincapacité de lélargissement de lassiette de produire des effets dans limmédiat, le gouvernement a recours au contrôle, au recouvrement et à la traque des niches fiscales.