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Fiscalité : L’élargissement de l’assiette compensera-t-il la baisse des taux ?
Publié dans Finances news le 24 - 07 - 2009

* La baisse des recettes fiscales est aussi bien liée à la baisse du taux qu’à la morosité de l’activité économique.
* Les réalisations record de 2008 sont exceptionnelles et les recettes retournent à leur niveau normal.
* Il faut trouver des mécanismes de contrôle ou d’incitation fiscales pour séduire l’informel.
Les recettes fiscales ont connu une baisse durant les cinq premiers mois de l’année. Pour certains observateurs, c’est un indicateur de la crise dont les effets sont bien là et touchent différents secteurs, y compris les finances publiques. Pour d’autres, les réalisations record de 2008 sont exceptionnelles, les recettes retournent à leur niveau normal et il faut les comparer à la moyenne des cinq dernières années. Enfin, certains estiment que l’effet de la baisse du taux est automatique et qu’il faut attendre des années pour voir l’assiette réagir.
Les statistiques publiées révèlent qu’il y a bien baisse de l’IS et de l’IGR, alors que la TVA a légèrement augmenté ; ce qui veut dire que la demande interne est toujours soutenue.
Mais la question qu’il faut poser pour l’IS est : la baisse est-elle liée à la baisse du taux ou à la baisse de l’activité économique ?
«Logiquement, les deux en même temps. Mais il faut connaître la part de chaque baisse pour pouvoir comparer. Si on avait laissé le taux inchangé est-ce que les recettes de l’IS maintiendraient la même évolution ?», s’est interrogé Youssef Oubouali, professeur de droit fiscal. «Il n’y a pas concrètement une baisse de taux. Certes, le taux nominal est passé de 35 à 30%, mais il y a un problème dans l’assiette, celui des provisions. Les provisions réglementées ont été éliminées. Le taux de l’IS n’a donc pas baissé réellement, car il doit s’appliquer à une base plus élevée», explique-t-il.
Ainsi, les entreprises minières n’ont pas le droit de faire des provisions de reconstitution de gisement : leur résultat va donc augmenter.
La nature aussi des recettes est à élucider d’autant plus qu’on ne connaît pas la part des recettes ordinaires par rapport aux recettes exceptionnelles qui englobent les recettes de contrôle.
La théorie de Lafaire stipule que durant les périodes de rendement croissant, plus le taux baisse plus les recettes augmentent.
Le rendement de l’élargissement de l’assiette est plus grand que le rendement de la baisse du taux.
L’impôt est une charge que les investisseurs intègrent dans leur calcul de business plan.
La question qui se pose alors est : à quel point la diminution du taux n’a pas compensé l’élargissement de l’assiette ? Ceci est lié au comportement de l’informel. Dans le même cadre, une autre question se pose : est-ce qu’un taux de 30% de l’IS peut encourager l’informel ?
Outre les provisions réglementées, l’assiette a été aussi impactée par l’élimination du taux préférentiel de la plus-value. Progressivement, les exonérations sont éliminées. Elles existent uniquement dans les dividendes pour éviter la double imposition.
Pour l’IR qui concerne en grande partie les salariés, la formule retenue à la source réduit considérablement les fraudes et l’évasion fiscale. Le jugement sur l’IR est plus clair.
La masse salariale n’a pas beaucoup bougé. Comme le taux a baissé, le rendement de l’IR devrait obligatoirement baisser.
L’IR est présent dans les revenus salariaux. Les revenus professionnels, eux, sont plus tournés vers l’informel. C’est pour cette raison que la Direction des impôts veut mener une campagne de contrôle auprès des professions libérales. Le rendement de cette catégorie (médecin, avocat, architecte…) est largement en deçà de ses potentialités. Même si on baisse le taux, le rendement reste le même.
Les droits d’enregistrement sont plus liés à la création d’entreprises et à l’immobilier.
Les indicateurs de ces deux créneaux sont à la baisse.
Au Maroc, on s’est habitué ces dernières années à une croissance à deux chiffres des recettes fiscales. «Il faut comprendre qu’un jour ou l’autre, ces recettes auront un plafond, surtout si l’assiette fiscale ne répond pas.
Car, à terme, s’il n’y a pas d’informel, et si le contrôle est rigoureux, les recettes vont stagner», a expliqué Oubouali
Le gouvernement régulait toujours une augmentation des dépenses par une augmentation des recettes.
Le contrôle peut-il compenser les pertes de rendement ?
«Le problème de contrôle n’a pas uniquement pour objectif le rendement, mais aussi l’équité. La charge fiscale doit être bien répartie équitablement sur les contribuables», a souligné Oubouali.
Ce sont toujours les mêmes qui payent l’impôt : une centaine d’entreprises assurent plus de 70% des recettes de l’IS.
Le même constat est confirmé par Oubouali. «Ceux qui ont toujours payé l’impôt ne peuvent plus le faire et ceux qui n’ont jamais payé l’impôt ne veulent pas le faire», a-t-il affirmé.
En effet, les salariés sont saturés et un taux de 40% marginal est encore élevé.
Seules les sociétés structurées payent l’impôt et les salariés qui payent l’IR s’activent dans les sociétés structurées.
Le plus grand problème fiscal au Maroc est un problème de fraude.
«Il faut trouver un nouveau système pour que les professions libérales payent l’impôt.
Au niveau de l’IS, il faut trouver des incitations fiscales pour séduire ceux opérant dans le secteur informel. Il faut reconnaître que l’Administration a fait un grand effort dans la simplification et l’harmonisation de l’impôt», a indiqué Oubouali.


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