* Le Maroc est lié à 18 pays par des conventions bilatérales de sécurité sociale et deux autres sont en cours de négociation avec la Norvège et la Grèce. * Ces conventions, qui ont pour finalité de sauvegarder les droits et les acquis des ressortissants marocains à létranger, favorisent également la mobilité internationale des travailleurs marocains. * Ces conventions facilitent le maintien au pays des familles de travailleurs puisquelles sont également couvertes et favorisent le retour des travailleurs à leur pays dorigine, le Maroc. Au sein des instruments internationaux de sécurité sociale, les conventions bilatérales peuvent sembler bien modestes, surtout au regard des instruments européens (règlement 1408/71 et du nouveau règlement 883/04 en particulier). Mais elles présentent un intérêt certain pour un pays comme le Maroc qui compte près de trois millions de ressortissants à létranger et aussi, parce que cest un pays exportateur de main-duvre et de cadres. Ces conventions leur facilitent une mobilité à linternational tout en préservant leurs acquis sociaux. Le Maroc est aujourdhui lié à 18 Etats par des conventions bilatérales de sécurité sociale, notamment la France, la Belgique, les Pays-Bas, lEspagne, la Suède, lAllemagne, le Danemark, la Roumanie, la Libye, la Tunisie, le Canada, le Portugal, le Luxembourg et lEgypte, dont les conventions sont déjà ratifiées. Les conventions avec lAlgérie, lUMA, lItalie et le Québec sont en cours de ratification. Tandis que des négociations sont entamées avec la Norvège et la Grèce. Les prestations prévues par ces conventions sont les pensions, les allocations familiales, les indemnités journalières de maladie ou de maternité, lallocation au décès et lassurance contre les accidents de travail et les maladies professionnelles. Certaines conventions garantissent également les soins médicaux. Ces conventions sont dautant utiles quelles ont pour objectif de coordonner les législations de sécurité sociale de deux (ou plusieurs) Etats au bénéfice des ressortissants de ces Etats qui se déplacent sur le territoire dun autre Etat. Mais chacun voit de son propre angle lintérêt de ces conventions. Du point de vue des intérêts financiers de la sécurité sociale marocaine, seule lexportation des pensions, parce quelle permet notamment de limiter le recours au minimum vieillesse, présente un intérêt, cet intérêt étant dautant plus marqué que le partenaire est un Etat développé. Pour les intéressés, une convention est en principe toujours intéressante, ne serait-ce que parce quelle comporte des dispositions de totalisation de périodes. Dun point de vue économique, cest la facilitation de linvestissement étranger, créateur demplois, qui va essentiellement intéresser. Il est également admis que ces conventions peuvent lever les obstacles au retour des émigrés dans leur pays dorigine et surtout limiter le déplacement de toute la famille. «La diffusion dans le monde du modèle marocain de sécurité sociale et des valeurs qui le sous-tendent, est une condition indispensable à sa pérennisation dans le contexte de mondialisation des échanges», complète Mohamed Affifi, Directeur des Etudes Stratégiques à la CNSS, cette liste de points positifs à lactif des conventions bilatérales. La nécessité dadaptation aux préoccupations actuelles La faiblesse des conventions actuelles sagissant de la mesure des flux de population et de leurs conséquences financières qui se double, en toute logique, dune quasi-absence de dispositions relatives aux échanges statistiques, a fortiori aux échanges dématérialisés, pose avec acuité la nécessité dadapter le contenu de ces conventions bilatérales à des préoccupations plus actuelles. En effet, les conventions de sécurité sont très fortement marquées par le contexte politique et économique qui prévalait lors de leur conception dorigine. Le contexte a tellement évolué depuis. Alors quel avenir pour ces conventions ? Et si la question était posée autrement ? Si ces conventions nexistaient pas ? Le Maroc aurait été obligé de sinsérer dans un contexte mondial globalisé et le flux des travailleurs dans les deux sens aurait été très difficile. De même quil ny aurait eu aucun développement de lattractivité du Maroc pour les investissements étrangers, puisque les droits sociaux des ressortissants étrangers au Maroc nauraient pas été garantis. De même que la mobilité professionnelle à linternational, du moins dans les pays signataires, aurait dissuadé plus dun. Pour ne citer que ces quelques exemples ! À lévidence, ces conventions ont un bel avenir devant elles puisquelles sont destinées à favoriser les relations du Maroc avec ses partenaires et à faciliter limmigration en Europe de la main-duvre requise. La convention néerlandaise, fini le casse-tête chinois ? La convention bilatérale signée par le Maroc et les Pays-Bas en février 1972 posait un réel problème jusquà un passé récent et constitue aujourdhui un exemple réussi de ce que peut être une réactualisation dune convention bilatérale. Cette convention prévoyait les soins de santé et le remboursement pour les travailleurs marocains aux Pays-Bas, malades au Maroc pendant un séjour temporaire, sur présentation du dossier par la CNSS à la caisse néerlandaise. Mais depuis les années 90, les travailleurs marocains aux Pays-Bas posaient le problème de couverture médicale des familles restées au Maroc et des pensionnés du régime néerlandais en cas de retour au bercail. La convention a été de ce fait révisée en 1996 avec date deffet le 1er novembre 2004, pour justement étendre les soins de santé aux familles et aux pensionnés, à linstar des conventions maroco-française et maroco-espagnole. Elle prévoyait ainsi une cotisation auprès du régime néerlandais, et un remboursement des prestations au Maroc, selon la tarification officielle marocaine. Mais voilà, deux problèmes majeurs se sont posés de ce fait. Dun côté, les cotisations assurance maladie prélevées sur les pensions aux Pays-Bas étaient très élevées par rapport aux tarifs de remboursement de soins (tarification santé publique), pour les retraités et leur familles. Dun autre, et cette fois concernant la CNSS, les frais que la Caisse engageait pour rembourser les assurés du régime néerlandais étaient plus élevés par rapport à la créance telle que calculée selon la méthode dassurance forfaitaire dite coût moyen ! Il sagissait dune logique dassurance qui transfert le risque sur la CNSS ! Pour remédier à cette situation qui narrangeait ni lassuré, ni la CNSS, des négociations entre les deux signataires de la convention ont été entamées. Ce qui a abouti à une réduction de 70 % des cotisations prélevées. Ells ont été en fait pondérées par le rapport des coûts moyens des soins de santé dans les deux pays. De même que la CNSS a réussi à imposer une méthode actuarielle avec effet rétroactif depuis 2004 et à sauvegarder ses intérêts en assurant la neutralité financière par rapport au risque géré pour le compte du régime néerlandais. «Autrement dit, nous passons dune logique dassurance à une logique de gestion pour compte, cest-à-dire, en contrepartie des frais de gestion arrêtés dun commun accord, la CNSS gère pour le compte des caisses des Pays-Bas lassurance maladie au profit des assurés du régime néerlandais», conclut Mohamed Affifi. Il y a du changement dans lair !