* Face à la précarité des emplois stables, le rôle des sociétés d'intérim au Maroc semble à nouveau évoluer. * Au-delà des questions de crédibilité, les abus touchant les droits élémentaires des intérimaires ont tendance à devenir des pratiques courantes. Depuis que le nouveau code du travail est entré en vigueur, les dispositions qu'il a consacrées au travail intérimaire ont souvent suscité le débat. Et plus exactement le mécontement des sociétés spécialisées dans le travail temporaire. Le ministre de l'Emploi et de la Formation Professionnelle, Mustapha Mansouri, dénombre «une soixantaine d'entreprises de travail temporaire marocaines ou étrangères» qui sont implantées au Maroc. Ce «surnombre» ne fait pas l'affaire des demandeurs d'emploi qui veulent se lancer dans l'intérim. Car, d'une part, la concurrence ardue entre les entreprises d'intérim n'offre pas automatiquement de meilleures conditions de travail pour l'intérimaire et, d'autre part, l'article 500 du code du travail, qui limite la durée de l'intérim à 6 mois au maximum, ne facilite pas une conversion du travail temporaire en contrat de travail. Devant les parlementaires marocains, Mustapha Mansouri a évoqué cette question. Il a précisé à ce sujet qui «il y a un projet de réforme de cette disposition qui nuit aux intérêts des sociétés d'intérim». Il faut retenir que d'autres mesures vont entrer en vigueur concernant cette fois-ci le contrôle de l'application du code du travail dans les contrats d'intérim. Mustapha Mansouri constate que «les atteintes aux droits des intérimaires se sont multipliées. Les contrats d'intérim n'existent pas partout. Il y a aussi des abus en matière de respect des horaires du travail», précise encore le ministre de l'Emploi et de la Formation professionnelle. C'est pour dire que le secteur du travail intérimaire n'a pas encore réussi à enraciner les «bonnes» habitudes de travail. C'est pourquoi probablement les 60 entreprises qui opèrent dans le secteur n'arrivent pas encore à atteindre un seuil convaincant du nombre d'intérimaires qu'elles font travailler. La moyenne est au-dessous de 40.000 par an. D'un autre point de vue, et vu que l'Anapec n'a plus «le monopole» de conclure des contrats d'Intérim, la floraison des sociétés d'intérim n'a été nullement profitable aux chercheurs d'emplois. Une nette régression a été constatée en matière de respect de leurs droits. Le ministre de l'Emploi et de la Formation professionnelle insiste sur le fait que «les sociétés qui recrutent des intérimaires sont tenues de respecter le SMIG, les droits sociaux et surtout les assurances contre les accidents du travail. Ce sont des obligations qu'il faut absolument respecter». Mustapha Mansouri précise aussi que «le ministère travaille sur un projet de décret qui va préciser davantage les droits et les devoirs des sociétés d'intérim». Ce passage à la réglementation, après la reconnaissance contenue dans le code du travail, est devenu nécessaire. Car le travail temporaire est devenu synonyme de grande précarité de l'emploi, au lieu d'être un outil pour une insertion plus facile sur le marché du travail. Le seuil des contrats d'intérim qui peuvent déboucher sur un poste permanent est encore très faible, ne dépassant pas les 20%. C'est pour dire que dans les conditions actuelles, les entreprises ne se considèrent aucunement obligées ou encouragées à recruter de manière stable ; vu que les avantages offerts par les contrats d'intérim, s'ils ont la chance d'exister, sont énormes et réduisent sérieusement les charges des salariés. C'est pour dire que les réformes juridiques attendues devraient d'abord minimiser la précarité de l'emploi ; mais aussi assurer une meilleure protection des intérimaires. Il semble de surcroît que les abus tendent à devenir de vraies coutumes de travail au sein d'un secteur où les demandeurs d'emploi ont en principe le plus de chances de faire respecter les droits du travail, pour au moins 3 mois !