Le Royaume a souvent été sollicité par des pays africains pour revenir au sein l'Union Africaine, dont il est membre fondateur. Et au moment où personne ne s'y attendait, le Maroc y fait un come-back retentissant, doublé d'une motion de suspension de la RASD signée par 28 des 54 membres de l'UA. Le Royaume a choisi le 27ème sommet des Chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union africaine (UA), tenu les 17 et 18 juillet à Kigali (Rwanda), pour dévoiler son intention de réintégrer l'UA... 32 ans après s'en être retiré. En effet, sur hautes instructions de SM le Roi Mohammed VI, le président de la Chambre des représentants, Rachid Talbi Alami, a été reçu ce dimanche à Kigali par SE Idriss Deby Itno, Président de la République du Tchad et Président en exercice de l'Union africaine. A cette occasion, Talbi Alami a remis au Président tchadien un message adressé par SM le Roi à cette messe africaine tenue dans la capitale rwandaise. Il s'agit d'un discours historique où le Roi a souligné à qui veut l'entendre que «tous ceux qui dénigrent le Maroc font du tort en fait aux Africains eux-mêmes. La popularité du Royaume et sa dimension en Afrique n'est plus à démontrer, ni à prouver». Le pays s'engage depuis plusieurs années en faveur du développement et du partenariat Sud-Sud, à travers la présence d'acteurs marocains dans tout le continent, qu'il s'agisse du secteur économique, bancaire, financier et même social. Dans ce sens, «Le temps est venu d'écarter les manipulations, le financement des séparatismes, de cesser d'entretenir en Afrique des conflits d'un autre âge, pour ne privilégier qu'un choix, celui du développement humain et durable, de la lutte contre la pauvreté et la malnutrition, de la promotion de la santé de nos peuples, de l'éducation de nos enfants, et de l'élévation du niveau de vie de tous», lit-on dans le discours du Roi. Le Souverain n'a pas manqué de rappeler les conditions de retrait de cette institution en 1984, tout en soulignant le retour à la raison de certains pays ayant jadis reconnu la RASD. «L'Union africaine n'est-elle pas en contradiction évidente avec la légalité internationale ? Puisque ce prétendu Etat n'est membre ni de l'Organisation des Nations unies, ni de l'Organisation de la coopération islamique, ni de la Ligue des Etats arabes, ni d'aucune autre institution sous régionale, régionale ou internationale ?». La situation de 1984 ne prévaut pas actuellement, ce qui a motivé la décision du Royaume de reprendre sa place dans le concert des nations africaines. «Mais ce qui M'intéresse plus particulièrement, c'est la position de notre continent. L'UA, resterait-elle en déphasage avec la position nationale de ses propres Etats membres, puisqu'au moins 34 pays ne reconnaissent pas ou plus cette entité ? Même parmi les 26 pays qui s'étaient placés dans le camp de la division en 1984, seule une stricte minorité d'une dizaine de pays subsiste. Cette évolution positive est, d'ailleurs, conforme à la tendance observée au niveau mondial. Depuis l'année 2000, 36 pays ont retiré leur reconnaissance à l'Etat fantôme», lit-on dans le discours. I. Bouhrara Motion de la suspension de la RASD : La belle revanche du Maroc Le 18 juillet, ce 27ème Sommet a été marqué par le dépôt d'une motion de suspension de la RASD. En effet, le président du Gabon, Ali Bongo Ondima, au nom de 28 Etats membres (sur un total de 54 pays membres de l'institution) signataires, a adressé au président de l'UA une motion en vue de la suspension de la RASD des activités de l'Union et de tous ses organes. Les pays signataires de cette motion invoquent «les idéaux authentiques de la construction africaine» et se disent «fidèles aux principes et objectifs de l'Union africaine, notamment la réalisation d'une plus grande unité et solidarité entre les Etats africains, la défense de leur souveraineté et de leur intégrité territoriale, la promotion de la paix, la sécurité et la stabilité sur le continent, la promotion de la coopération internationale, tenant dûment compte de la Charte des nations et la création des conditions appropriées permettant au continent de jouer le rôle qui est le sien dans l'économie mondiale». Regrettant «l'absence du Royaume du Maroc des instances de l'Union africaine» et se disant «conscients des circonstances particulières dans lesquelles la République arabe sahraouie démocratique a été admise à l'Organisation de l'unité africaine», ces 28 Chefs d'Etat membres de l'UA ont accueilli «très favorablement la teneur du message historique adressé par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, Roi du Maroc, au Président en exercice du 27ème Sommet de l'UA pour distribution auprès des Chefs d'Etat et de gouvernement y participant». Ils ont salué «la décision du Royaume du Maroc, membre fondateur de l'OUA et dont la contribution active à la stabilité et au développement du continent est largement reconnue, d'intégrer l'Union africaine et entendent oeuvrer pour que ce retour légitime soit effectif dans les meilleurs délais». En conséquence de quoi, ces chefs d'Etat ont décidé «d'agir en vue de la suspension prochaine de la République arabe sahraouie démocratique des activités de l'Union africaine, et de tous ses organes, afin de permettre à l'UA de jouer un rôle constructif et de contribuer positivement aux efforts de l'ONU, pour un dénouement définitif au différend régional sur le Sahara». A noter que les 28 Etats signataires de cette motion de suspension de la RASD sont : Bénin, Burkina Faso, Burundi, Cap Vert, Comores, Congo, Côte d'Ivoire, Djibouti, Erythrée, Gabon, Gambie, Ghana, Guinée, Guinée-Bissau, Guinée-Equatoriale, Libéria, Libye, République centrafricaine, République démocratique du Congo, Sao Tomé, Sénégal, Seychelles, Sierra Leone, Somalie, Soudan, Swaziland, Togo, Zambie. Notons la regrettable abstention de pays comme la Tunisie et l'Egypte. La politique de la chaise vide opérée depuis 32 ans par le Maroc au sein de l'Union africaine n'a finalement servi en rien la cause nationale, bien que le Royaume ait opté pour une stratégie Sud-Sud qui a bien porté ses fruits sur le plan économique, mais également politique, mais à un niveau, disons-le, bilatéral. Après la chaise vide, le Maroc opte pour le verrouillage de toutes les voies de présence de la RASD dans les instances internationales à travers une présence forte et un lobbying à même de barrer la route à la bande de Rabouni.