* Le Maroc importe plus qu'il n'exporte avec les pays signataires de l'Accord d'Agadir. * Certains secteurs peuvent largement bénéficier de l'accord, d'autres doivent subir. Le Maroc réalise à peine 2% de ses échanges extérieurs avec les trois pays avec qui il est lié par l'Accord d'Agadir. Le volume des échanges ne dépasse pas les 3,3 milliards de DH (2,57 MMDH pour les importations et 717,83 MDH pour les exportations en 2005). Le taux de couverture est largement déficitaire dans l'ensemble avec seulement près de 28%. Cette tendance est observée dans les échanges avec l'Egypte et la Tunisie où le solde est quasiment négatif. Si les importations du Maroc n'ont cessé d'augmenter, les exportations ont évolué en dents de scie. Avec la Jordanie, le Maroc a réalisé en 2005 un volume d'échanges de 180 MDH (41,5 MDH pour les importations et 113,9 MDH pour les exportations). Le solde est à l'avantage du Maroc avec un taux de couverture de 336%. Le Maroc, la Jordanie, l'Egypte et la Tunisie ont signé l'Accord d'Agadir, persuadés de la nécessité d'instaurer un espace économique fort pour parvenir à un développement global pour faire face aux défis et exigences de la mondialisation, et en perspective de l'échéance 2010 liée à l'instauration d'une zone euro-méditerranéenne de libre-échange. « Cet accord représente ainsi le premier pas vers une intégration Sud-Sud vivement soutenue par l'Union européenne. Le marché commun des 4 pays signataires compte plus de 120 millions de consommateurs et réalise un PIB cumulé de près de 150 milliards d'euros », indique-t-on auprès du ministère du Commerce extérieur. Il est à souligner que le Maroc a opté, ces dernières années, pour une stratégie du commerce extérieur axée notamment sur la diversification de l'offre exportable et l'accélération du processus d'ouverture du pays aux systèmes d'échanges internationaux qui a été entamé par l'intégration dans le système commercial multilatéral (OMC). Ce processus s'est accéléré particulièrement ces trois dernières années par l'engagement du Maroc dans une série d'accords bilatéraux et régionaux. «A travers ces accords, le Maroc souhaite émerger en plate-forme régionale de production, d'investissements et d'échanges, ouverte sur les espaces européen, arabo-méditerranéen, atlantique et africain», selon une source proche du dossier. C'est selon cet état d'esprit que l'Accord d'Agadir devrait booster les exportations marocaines mises à mal ces dernières années par une rude concurrence. « Ainsi, les dispositions de l'accord permettront d'exporter librement vers les marchés des pays signataires de l'Accord, et surtout vers le marché européen, tout en utilisant des intrants des pays de la zone ou de la communauté européenne », souligne la même source. Le Royaume a procédé récemment à la conclusion de certains ALE avec des partenaires privilégiés dans la perspective de la diversification de l'offre exportable et l'accélération du processus d'ouverture du pays au système commercial multilatéral. Mais cet accord ne serait-il pas défavorable aux accords conclus avec les Etats-Unis, l'Union européenne ou la Turquie ? Au département du Commerce extérieur, on tient à préciser que «l'accord d'Agadir n'a pu que conforter la position du Maroc en terme de politique commerciale puisque la stratégie du Maroc, basée sur la diversification et la non-dépendance de marchés limités, lui a permis de contrôler, en quelque sorte, les concessions octroyées à la partie américaine ». Pour le gouvernement marocain, «nul ne peut dire que l'Accord d'Agadir est défavorable à l'accord signé avec la Turquie pour la seule raison que ces deux accords ont été signés en concertation avec l'Union européenne et interviennent dans le cadre de l'intégration paneuro-méditerranéenne ». Ceci dit, les avantages d'un accord ne peuvent être fructueux que par l'existence de l'autre. En effet, la conclusion de cette panoplie d'accords (Accord d'Agadir, Accord avec la Turquie et Accord d'association avec l'UE) constitue la condition inévitable de la réussite du principe du cumul diagonal ; «le but final étant l'intégration économique des pays du pourtour méditerranéen », précise-t-on auprès du département du Commerce extérieur. Mais depuis l'annonce de l'Accord d'Agadir, certains secteurs comme les cimenteries ou l'agroalimentaire redoutent que l'accord ne menace leur activité. D'ailleurs, c'est ce qui explique le retard enregistré pour son entrée en vigueur, prévue début 2006 puis ajournée à septembre prochain. Ces secteurs ont appelé le gouvernement à préserver leurs intérêts. Dans l'état actuel, certains secteurs marocains pourraient subir des répercussions, notamment l'industrie du ciment. Les statistiques révèlent que le ciment tunisien coûte deux fois moins cher que son homologue marocain. L'Egypte aussi est un grand producteur de ciment, à des prix plus intéressants que les nôtres. Il est à souligner que ce secteur a déjà entamé une procédure de mise à niveau afin de contrecarrer la compétitivité des entreprises étrangères concurrentes. Le gouvernement a tenu à préciser que : «le contrôle des importations de ce produit s'effectuera à travers l'application rigoureuse des règles d'origine spécifiques, de la normalisation et du contrôle de qualité, ainsi que des mesures de sauvegarde prévues par l'accord d'Agadir et qui sont en conformité avec les accords pertinents de l'OMC ». Par ailleurs, «les mêmes mesures sont applicables au secteur agricole marocain». Toutefois, notre industrie agroalimentaire pourrait bénéficier de la réduction des coûts des intrants par l'abolition des droits de douane, ce qui permettra à certaines branches du secteur d'être plus compétitives.