Les entreprises immobilières cotées ont été parmi les principales artisanes de la baisse de la masse bénéficiaire du MASI. A fin juin 2015, les bénéfices des sociétés immobilières cotées ont reculé de 67,3%. Cette régression recèle néanmoins des évolutions disparates selon les entreprises. Alliances est très mal en point, Addoha, elle, est en convalescence, tandis que Résidences Dar Saada déçoit. La masse bénéficiaire de la Bourse des valeurs de Casablanca (BVC) s'est considérablement amoindrie lors de ce premier semestre. Elle perd 32,1% à 9,77 milliards de dirhams en comparaison avec le premier semestre 2014. Le secteur immobilier coté figure en bonne place parmi ceux qui ont tiré vers le bas la masse bénéficiaire. A fin juin 2015, les bénéfices des sociétés immobilières cotées ont fondu, enregistrant un recul de 67,3% à 289 millions de DH (hors CGI et en y intégrant Balima). Selon une analyse de Crédit du Maroc Capital (CDMC), le secteur a été «essentiellement, plombé par la perte subie par Alliances (-384,3 milliards de DH) ainsi que les contre-performances de Résidences Dar Saada (-6%) et Balima (-27,6%)». Seule éclaircie dans ce ciel sombre, selon la société de Bourse, «la distinction particulière du groupe Addoha qui affiche des résultats en ligne avec les prévisions de son Plan génération cash (PGC)». Alliances : Résultats catastrophiques Un chiffre d'affaires consolidé de 373 millions de dirhams, en baisse de 81% en comparaison avec juin 2014, et un résultat net part du groupe (RNPG) déficitaire de 384,2 millions de dirhams contre un bénéfice de 200 millions de dirhams, il y a un an : le groupe immobilier a connu le pire semestre de son histoire en termes d'activité et de profitabilité. Pouvait-il en être autrement lorsque l'on connaît les graves difficultés financières rencontrées par le groupe dirigé par Alami Lazraq, et notamment son pôle construction ? Plus que la baisse des résultats, c'est l'ampleur de la contraction qui s'avère déconcertante. Dans le détail, tous les pôles d'activités marquent le pas : le chiffre d'affaires consolidé du pôle construction perd 466 millions de DH, celui du pôle social est en recul de 914 millions de DH, tandis que celui du pôle résidentiel et golfique enregistre une diminution de 237 millions de DH. Dans ces conditions, le résultat d'exploitation consolidé s'établit à -170 millions de DH, contre 651 millions à fin juin 2014. L'endettement s'élève à 8,6 milliards de DH, en stabilité par rapport à fin 2014. «L'endettement du Groupe à fin 2015 devrait diminuer de manière substantielle compte tenu des cessions d'actifs prévues dans le plan de restructuration», fait savoir le groupe dans un communiqué. Plus inquiétant, les fonds propres sont en baisse de 10% par rapport à fin 2014, à 4,4 milliards de DH (soit près de la moitié de la dette). Toutefois, l'avenir s'annonce moins sombre pour le groupe immobilier, qui table sur les retombées positives de son plan de restructuration, et ce dès le deuxième semestre. Selon des sources autorisées, le projet de médiation mené par Abderrahim Lahjouji a été approuvé par le tribunal, et le groupe a présenté le plan de restructuration de sa dette auprès de ses principaux créanciers (banques, OPCVM) lors d'une réunion tenue le mercredi 7 octobre. En outre, il a entamé la cession de 1,8 milliard de DH d'actifs immobiliers auprès de créanciers. Alliances se montre optimiste quant au succès de ce plan de restructuration. Le groupe immobilier prévoit un retour à l'équilibre des bénéfices, dès 2016. Sur le plan de l'endettement, il doit se délester de 3 milliards de DH à l'horizon 2017. Le besoin en fonds de roulement devra, pour sa part, être réduit de 3,7 milliards de DH à la même échéance, et les charges de structures, notamment la masse salariale, seront allégées de 300 millions de DH. C'est le prix à payer pour repartir d'une feuille blanche et récupérer la confiance du marché. Celui-ci a néanmoins sévèrement sanctionné le titre Alliances après la publication des résultats semestriels. Aujourd'hui, l'action se traite à son plus bas historique, autour de 34 DH. Addoha sur la bonne voie Les dirigeants du premier groupe immobilier national le répètent à qui veut l'entendre: ils ne veulent plus être associés aux difficultés rencontrées par le secteur, encore moins à celles du groupe Alliances. Pour que ce souhait devienne réalité, rien de mieux que la présentation de résultats rassurants, en ligne avec les promesses tenues lors de la présentation du Plan génération cash (PGC). Rappelons que ce plan stratégique s'est donné pour objectif d'améliorer, sur une période de 3 ans, sa structure financière, en ramenant le gearing (dettes/fonds propres) à 33%, au lieu de 83%, en réduisant le BFR de 4,5 milliards de dirhams et en dégageant suffisamment de cash pour rémunérer les actionnaires. Il s'agit alors de faire face à une double contrainte pour Addoha : un endettement important et une demande en baisse. Force est de constater que, 6 mois après l'opérationnalisation du PGC, le groupe dirigé par Anas Sefrioui, est sur la bonne voie, puisqu'à fin juin 2015, il présente des résultats en ligne avec les prévisions. La dette a été réduite de 1 milliard de DH à 8,3 milliards de DH, ce qui constitue une baisse de 11%. C'est presque 2 fois mieux que l'objectif prévisionnel. Le gearing à fin juin 2015 s'est amélioré à 69,5%, contre 75,1% un semestre plus tôt. Le cash collecté est également en avance sur le businessplan prévisionnel. A fin juin 2015, le cash flow d'exploitation a augmenté de 202% à 1,7 milliard de dirhams, grâce à la réduction de la production et au déstockage des produits finis. Conséquence : le besoin en fond de roulement s'allège de près d'un milliard de dirhams. Ces réalisations ne se sont pas faites au détriment du chiffre d'affaires consolidé. Celui-ci s'établit à fin juin 2015 à 3,38 milliards de DH, en très légère hausse de 0,5% comparativement avec juin 2014. Le segment économique représente les deux tiers de ce chiffre d'affaires, et celui du haut standing le tiers restant. Ce chiffre d'affaires représente 47% de l'objectif du PGC pour l'année 2015. Le résultat d'exploitation est également en amélioration. Il passe de 672 millions de dirhams à fin juin 2014 à 697 millions de DH à fin juin 2015, soit une progression de 3,7%. Quant au résultat net consolidé, il connaît également une très légère hausse de 1% à 614 millions de DH à l'issue de ce semestre. Bref, la réduction de la voilure et le tournant stratégique opéré en début d'année semblent porter leurs fruits. Et si le PGC continue à être scrupuleusement respecté de la sorte, la confiance dans le titre Addoha, qui a perdu plus de 30% de son prix depuis le début de l'année, pourrait revenir. De quoi redorer le blason bien terni du groupe immobilier. Résidences Dar Saada (RDS) : baisse des indicateurs La dernière société immobilière à avoir rejoint la cote casablancaise publie des résultats semestriels en demi-teinte. Le chiffre d'affaires consolidé semestriel du groupe se situe à 678,5 milliards de dirhams, en contraction de 12,8%, en comparaison avec le premier semestre 2014. Selon le management de RDS, cette performance est conforme au cadencement des livraisons des unités pour l'année 2015, les livraisons devant s'accélérer au deuxième semestre. Pour rappel, le businessplan présenté à l'occasion de l'introduction en Bourse de la société prévoit un chiffre d'affaires de 2,08 milliards de dirhams pour 2015. RDS devra donc, lors de ce deuxième semestre, tripler son chiffre d'affaires du premier semestre pour coller à sa prévision. Au niveau du chiffre d'affaires sécurisé, 2.170 unités ont été livrées et 2.596 autres ont été commercialisées, soit un chiffre d'affaires sécurisé de 720 millions de DH en croissance de 7% par rapport à fin juin 2014. Les unités prévendues totalisent 14.533 logements pour un chiffre d'affaires sécurisé de 4,3 milliards de DH. Le résultat d'exploitation s'inscrit également en baisse de 9% à 183,7 millions de DH par rapport au premier trimestre 2014. Au final, le résultat net des entreprises intégrées recule de 5,5% à 155 millions de DH. Là encore, ce résultat net devra être multiplié par trois pour atteindre l'objectif prévisionnel 2015, fixé à 450 millions de DH. Mais le management se montre une fois de plus confiant, indiquant que généralement, le premier semestre représente entre 20 et 40% du résultat net de l'année. Précisons toutefois que le bénéfice semestriel a été impacté positivement par le passage du taux d'imposition effectif de 15,5% l'an dernier à 7% cette année, bénéficiant de l'avantage fiscal accordé lors de son introduction en Bourse, en novembre 2014, rappelle le CDMC. Sur le plan des équilibres bilanciels, RDS affiche une bonne santé, avec un ratio d'endettement de 38%. Notons enfin que la société a acquis un terrain de 4,1 hectares au centre de Casablanca, lequel devrait abriter plus de 1.000 unités moyen standing, avec un CA potentiel de 1,2 milliard de DH. L'action Dar Saada a perdu près de 40% de sa valeur depuis le début de l'année. Elle se négocie actuellement autour de 120 DH, quand son prix d'introduction était de 215 DH (fin 2014). CGI sort par la petite porte La Compagnie générale immobilière (CGI) quitte la corbeille casablancaise sur des résultats financiers en très nette détérioration. Près d'un an après le déclenchement de l'affaire Badès qui a précipité la décision de retirer la filiale immobilière de CDG développement de la Bourse, CGI affiche à l'issue du premier semestre un chiffre d'affaires de 417 millions de DH, en baisse par rapport au premier semestre de 2015 où il dépassait le milliard et demi de dirhams. Le résultat d'exploitation est négatif de 54 milions de DH, contre un solde positif de 207 millions de DH au premier semestre 2014. Enfin, le résultat net est déficitaire de 69 millions de DH contre un solde positif, l'an dernier à la même période, de 190 millions DH. Après sa radiation de la Bourse de Casablanca, le management du groupe, avec à sa tête le nouveau Directeur général Khadir Lamrani, repart d'une feuille quasi-blanche. Il aura la lourde charge de redresser la barre de l'un des fleurons de l'immobilier au Maroc.