Cinq des plus grandes banques d'Afrique, dont le groupe Attijariwafa bank, ont choisi les cloud IBM pour gérer le volume croissant des transactions, les défis réglementaires et la croissance de l'activité. Le point sur le rôle de cette technologie pour le secteur avec Hassan Bahej, Directeur général d'IBM Maroc.
Propos recueillis par A. Hlimi
Finances News Hebdo : Qu'apporte l'utilisation du cloud par rapport au stockage «classique» pour les banques ? Hassan Bahej : Au moment où les grandes banques continuent à s'engager dans des programmes de transformation à grande échelle dans le but d'améliorer l'expérience client, la transformation digitale, les nouvelles méthodes de travail et la réduction des coûts à l'échelle de l'entreprise, une approche de cloud hybride les conduit vers ce nouvel avenir dynamique. Une approche de cloud hybride permet aux banques de surmonter de nombreux obstacles, de répondre aux attentes et d'introduire de nouveaux services. Il s'agit d'une technologie qui améliore l'efficacité opérationnelle, favorise l'innovation, facilite le développement de nouveaux modèles commerciaux et soutient une expérience client plus satisfaisante. Les banques qui adoptent une approche hybride peuvent optimiser leur cloud sur site pour une disponibilité et stabilité opérationnelle, tout en utilisant un cloud hors site pour la rapidité et l'agilité indispensables à améliorer l'interaction avec le client. Un cloud hybride permet, en général, aux banques d'optimiser les données dont elles ont besoin en temps réel, ce qui évite les frais coûteux de maintien d'une grande quantité de capacité numérique inutilisée. Cela rend les banques plus efficaces, car elles peuvent désormais déplacer rapidement les ressources numériques là où elles sont nécessaires. Il accélère notamment l'innovation, puisqu'il n'est pas limité à un lieu géographique spécifique et offre en même temps des capacités améliorées de gestion des risques pour se protéger contre les cyber-attaques et atténuer les risques financiers.
F.N.H. : On évoque souvent des contraintes de souveraineté des données quand il s'agit d'utilisation du cloud. Avez-vous évoqué ces contraintes avec les autorités bancaires au Maroc ? H. B. : Planifier la sécurité et la conformité représente l'un des processus les plus longs et les plus difficiles qui existent pour les institutions de services financiers. Pour les grandes banques historiques, une telle planification demeure très compliquée, puisqu'elle renvoie à la nécessité de gérer une grande quantité de données historiques et de devoir se conformer à la réglementation multimarché, tout en respectant les exigences imposées par les organismes de réglementation. Dans les années à venir, cette planification est en passe de devenir un problème majeur pour les institutions financières, étant donné que les consommateurs exigent de plus en plus d'expériences numériques plus transparentes, tout en étant de plus en plus conscients quant à l'importance de la sécurité et de la nécessité de la confidentialité des données. L'objectif d'IBM est de s'assurer que les banques puissent disposer d'un cadre stratégique adapté, avec des contrôles intégrés pour toute une série d'exigences de conformité. Les banques sont ainsi en mesure de contrôler leur conformité à l'aide d'un tableau de bord à la fois centralisé et sécurisé, ce qui leur permet de se concentrer sur l'innovation en toute sécurité et sur le déploiement efficace d'offres et de services numériques. IBM croit que certaines industries réglementées, à l'instar du secteur des services financiers, ont besoin d'un cloud hybride plus spécialisé. A ce titre, nous avons créé une solution de cloud hybride entièrement dédiée aux fournisseurs de services financiers - IBM Cloud for Financial Services. Nous pensons que cela changera la donne pour les banques au Maroc. Grâce aux contrôles réglementaires et de conformité intégrée, les banques pourront se baser en toute confiance sur le cloud afin d'encourager l'innovation et d'offrir de nouvelles expériences qui sont encore plus personnalisées à leurs clients, tout en permettant à ces derniers d'agir dans le strict respect des réglementations du secteur, notamment en matière de gestion des données sensibles et des charges de travail critiques. L'objectif d'IBM est de s'assurer que les banques puissent déployer en toute confiance des solutions de 'cloud computing' destinées à favoriser l'innovation et à offrir de nouvelles expériences client plus personnalisées. A ce titre, les banques ont la possibilité d'avoir accès à la sécurité de pointe d'IBM et de pouvoir disposer de contrôles réglementaires et de conformité intégrée. Les institutions financières qui migrent leurs charges de travail vers IBM Cloud for Financial Services pourront profiter de capacités informatiques confidentielles d'IBM, qui permettent au locataire de disposer d'un environnement informatique capable de garantir des niveaux de confidentialité et une autorité totale sur sa charge de travail. Forts de plusieurs décennies d'expérience dans le domaine de la transformation du secteur des services financiers en Afrique, nous avons récemment annoncé que les principales banques africaines, notamment Attijariwafa bank, EcoBank, United Bank of Africa, Co-operative Bank of Kenya et Banco Mais, se lancent dans la prochaine phase de leur transformation numérique, favorisant ainsi l'inclusion financière et libérant l'innovation de manière à répondre plus efficacement aux besoins des consommateurs et des petits entrepreneurs africains qui ne cessent d'évoluer.
F.N.H. : Quelles sont les caractéristiques du cloud IBM par rapport à la concurrence ? H. B. : Permettez-moi de vous expliquer le parcours et la vision d'IBM pour le cloud. Depuis trois ans, nous avons découvert que le cloud hybride est la force dominante de notre industrie. Dès lors, nous avons bâti un marché avec de nombreux projets clients, introduit de nouvelles technologies, et en 2019, nous avons racheté Red Hat dans le cadre d'un accord historique d'une valeur de 34 milliards de dollars. Les technologies Red Hat Open, combinées à nos CloudPaks récemment lancés, nous ont donné l'énergie pour booster notre plateforme de cloud hybride ouverte et sécurisée qui couvre tous les endroits où nos clients utilisent l'informatique : environnements de cloud public sur site, privés et publics. IBM a fait des paris très courageux pour capitaliser sur l'énorme opportunité que représente le cloud hybride -1,2 trillion de dollars selon les analystes financiers (IDC)-. Pour saisir cette occasion, nous avons en effet considérablement renforcé les capacités de cloud hybride d'IBM. Nous avons également renforcé notre portefeuille avec le lancement d'IBM cloud pour les télécommunications et IBM cloud pour les services financiers, d'IBM cloud satellite, d'IBM cloud paks et d'IBM cloud integration platform. Nous sommes convaincus que les années à venir verront la spécialisation et une concentration sur l'industrie et nous y sommes prêts. Pour IBM, le blocage des fournisseurs va, en effet, à l'encontre de l'esprit du vrai cloud hybride, qui doit être ouvert et fournir également la sécurité et le contrôle dont les entreprises ont besoin, notamment celles des secteurs réglementés tels que les services financiers, les assurances et les télécommunications. C'est pour cette raison que nous avons créé un cloud sécurisé au cœur de chaque couche, flexible et interopérable et spécialisé pour répondre aux besoins spécifiques des fournisseurs de services financiers. Il s'agit d'IBM Cloud for Financial Services que j'ai mentionné ci-dessus.
F.N.H. : A votre avis, quelles sont les prochaines étapes pour la digitalisation des banques au Maroc et en Afrique ? H. B. : De nombreux changements passionnants se profilent à l'horizon. Nous assistons de plus en plus à l'arrivée de nouveaux entrants dans le continent, qui se caractérisent par leur grande agilité et qui apportent une proposition de valeur différenciée, ainsi que des modèles d'entreprise davantage axés sur le client et revigorés par l'innovation. Ces banques numériques exploitent la puissance de la technologie moderne afin d'offrir à leurs clients tous les services financiers qu'ils souhaitent, n'importe où et n'importe quand. Cette évolution s'accompagne d'une ouverture des services bancaires : elle permet de renforcer davantage l'accès et le contrôle des comptes bancaires et financiers des consommateurs par le biais d'applications tierces, généralement des start-up technologiques et des fournisseurs de services financiers en ligne. C'est très intéressant de constater à quel point les grandes banques africaines commencent aujourd'hui à penser comme de véritables entreprises plateformes, avec des modèles d'entreprise qui relient les personnes et les processus aux actifs, mais aussi une infrastructure technologique qui gère les interactions des utilisateurs internes et externes.