Des pressions haussières s'exercent sur le marché primaire des Bons du Trésor. Le recours massif du Trésor au marché domestique pourrait exacerber ces tensions d'ici fin 2020.
Par Y.S
Si le marché monétaire est resté stable depuis le début de l'année grâce aux multiples interventions de Bank Al-Maghrib, le marché obligataire, lui, connait ces dernières semaines des pressions de plus en plus marquées.
En effet, et comme anticipé, le Trésor augmente son recours au marché intérieur de la dette publique afin de satisfaire ses besoins importants de financement. Ces derniers s'établissent à plus de 15 Mds de DH pour le mois de novembre, soit plus que le double de ceux annoncés en octobre, et une hausse de près de 60,0% par rapport à la moyenne observée durant les 3 derniers mois.
Lors de la première séance d'adjudication du mois, le Trésor avait levé 4,5 Mds de DH principalement sur le court terme, face à une demande relativement faible n'excédant pas les 5 Mds de DH. Par conséquent, le taux de satisfaction de la séance ressort à 91%.
Au terme de cette deuxième séance d'adjudication, le montant cumulé des levées du Trésor ressort à 7,6 MMDH; et tenant compte des besoins annoncés du Trésor durant le mois de novembre, le reliquat à financer d'ici la fin du mois s'élève à plus de 7 MMDH. En face, la demande a atteint 9,2 Mds de dirhams sur l'ensemble des maturités proposées, du court au long terme.
Les résultats de l'adjudication montrent une hausse sensible des taux par rapport aux dernières levées ou aux taux sur le marché secondaire. Sur le 26 semaines, la hausse atteint jusqu'à 15 points de base (pbs) par rapport à la dernière levée, 9,6 pbs sur le 52 semaines, 8,4 pbs sur le 5 ans et 25 pbs sur le 15 ans qui a été adjugé à 2,85% pour un faible montant de 150 MDH. Une hausse des taux attendue Le marché ne semble pas surpris par cette accélération des taux sur le marché primaire, bien qu'elle risque de provoquer quelques secousses sur le marché obligataire bien orienté jusqu'à présent grâce aux taux bas. Deux facteurs explicatifs à ce comportement : une sortie internationale de 1 milliard de dollars qui n'a finalement servi qu'à faire face à une tombée de même montant début octobre. Et le retard pris par le Trésor sur son calendrier de levées. “Tenant compte des tombées importantes du Trésor pour le mois de novembre qui avoisinent les 11 MMDH et de ses besoins pour boucler l'exercice budgétaire 2020, nous anticipons la poursuite du recours massif à la dette intérieure durant les deux prochains mois. Une situation qui pourrait induire de légères tensions haussières sur les taux obligataires à court terme”, ont indiqué les analystes de AGR.
Quelle perspective pour la fin d'année et 2021 ?
Désormais, les regards sont tournés vers 2021 où le Trésor devra, en plus de faire face au déficit important, rembourser une multitude de levées réalisées sur des maturités inférieures à un an en 2020.
L'Etat a prévu de réaliser 10 Mds de dirhams de privatisations et financer une partie de ses investissements par des partenariats publics-privés en 2021. Mais cela ne semble pas écarter les anticipations de poursuite de la hausse des taux les mois à venir par les investisseurs. Ceci renforce leur sentiment de voir la Banque centrale décider d'atténuer ces tensions en actant une nouvelle baisse du taux directeur en décembre 2020 ou en mars 2021.
Marché monétaire : BAM toujours en soutien La Banque centrale continue ainsi de parfaitement réguler le marché monétaire à travers sa stratégie expansive visant à contenir l'évolution des taux interbancaires autour du taux directeur à 1,50%. Les analystes d'AGR relèvent que BAM satisfait 100% de la demande bancaire, à travers notamment ses avances à 7 jours, précisant que ces derniers s'établissent à 42 MMDH contre 43 MMDH une semaine auparavant, portant ainsi le montant total servi à travers les opérations principales de BAM à 105,7 MMDH. À l'approche de la fin d'année, les placements du Trésor à blanc et avec prise en pension poursuivent leur baisse en raison des pressions croissantes sur les finances publiques. L'encours moyen des placements s'établit ainsi à 1,6 MMDH contre plus de 7,5 MMDH observés lors de la semaine précédente.