◆ Le gouvernement et le secteur bancaire sont décidés à remettre sur pied les TPME paralysées par la crise. ◆ Le programme Intelaka va, à ce titre, connaître une redynamisation.
Par Y. Seddik
Chiffres d'affaires amputés, trésoreries asséchées, activités à l'arrêt..., les TPME marocaines ont été durement impactées par la crise de la Covid-19. Selon le dernier comptage, pas moins de 134.000 entreprises du secteur formel ont été déclarées en arrêt temporaire de travail au titre du mois d'avril, soit 62% des affiliées à la CNSS. À présent, cette population d'entreprises est au cœur du dispositif de la relance économique initié par le gouvernement. Tous les efforts de l'Etat et du secteur privé y sont recentrés. Une panoplie de mesures a été mise en place, allant jusqu'aux crédits gratuits. «Damane Oxygène était une première réponse pour la TPME à la crise sanitaire. L'architecture et la conception de ce produit étaient taillées à la situation de confinement», a expliqué Hicham Zanati Serghini, Directeur général de la Caisse centrale de garantie, lors d'un wébinaire sur la relance de la PME. «Aujourd'hui, 27.000 entreprises ont bénéficié du financement, dont plus de 86% sont des TPE», a-t-il précisé. La période qui s'est écoulée a été marquée par l'adoption de mesures visant à réduire le fardeau financier sur les TPME. Maintenant, il est surtout question de relance. «Damane Relance est le produit qui prendra le relais en cette période de reprise, et ce jusqu'au 31 décembre 2020», ajoute Serghini. En substance, ce dispositif a pour objectif de relancer l'activité des entreprises à travers la garantie des crédits destinés à financer leurs besoins en fonds de roulement, remboursables sur une durée de 7 ans, avec 2 ans de différé. «Relance TPE, quant à lui, est un produit de garantie qui apporte un collatéral souverain au secteur bancaire qui va jusqu'à 95% du crédit», détaille Serghini. Ces nouveaux mécanismes ont été déployés lundi 15 juin dans les réseaux bancaires (voir encadré). Banques : Un engagement sans précédent Premières à subir les contrecoups de la crise et premières à soutenir le tissu économique national, les banques sont en ordre de marche pour accompagner les TPME dans leurs reprises. Attijariwafa bank, première banque des TPME, a alloué pour l'année 2020 une enveloppe de 30 milliards de DH, consacrée à de nouveaux financements dédiés au soutien et à la relance de 100.000 TPME. Un niveau de financement historique, selon la banque. «Nous avons mis un dispositif à deux têtes : un mécanisme financier assorti d'un dispositif de services non financiers axés sur la formation, le conseil et la mise en relation», commente Issam Maghnouj, directeur du marché des TPE et de l'entrepreneuriat. Pour lui, ce programme est une véritable aubaine pour les commerçants, les artisans..., puisqu'il leur permettra de «réenvisager l'avenir avec beaucoup plus de sérénité». Il a en outre noté que depuis le confinement, 100 TPE sont formées par jour via visioconférence. CIH Bank, Bank of Africa, Crédit Agricole du Maroc et BMCI ont également présenté leurs offres adossées au fonds de garantie de la CCG. Les deux banques proposent des taux bonifiés, tournant autour de 4% pour Bank of Africa. Le programme «Intelaka» réactivé Mais la relance ne se limite pas uniquement à ces produits de garantie. Alors que Damane Oxygène totalise 13,8 milliards de DH jusqu'à présent, l'Etat compte donner un nouveau départ au programme Intilaka lancé en début d'année et suspendu (partiellement) à cause de la pandémie. «Le programme Intelaka, dédié aux jeunes et au financement des projets d'auto-emploi, connaîtra une nouvelle dynamique», avait annoncé le chef du gouvernement devant les parlementaires. «Pour redynamiser ce programme, nous devons penser aux projets qui, après cette période de crise, vont nécessiter des reconversions, notamment pour les TPE», considère Serghini, qui relève qu'en l'espace de deux mois après le démarrage, 50% des objectifs du programme ont été réalisés. Pour mémoire, Intelaka comporte 3 produits appelés à révolutionner la relation entre le secteur bancaire et les porteurs de projet, tout en équilibrant le risque entre les deux parties. Le fonds de garantie, doté de 8 milliards de DH, est piloté par la CCG. Les banques participatives apportent leur touche La latitude des banques participatives à financer les entreprises a été limitée pour des raisons de risques et également pour manque de produits adaptés. L'opérationnalisation de la fenêtre participative de la CCG, «Sanad Tamwil», leur permettra ainsi d'exploiter leur plein potentiel de financement. «Toutes les banques ont signé une convention avec la fenêtre de la CCG ‘Sanad Al Tamwil', et c'est justement pour appuyer la relance post-Covid-19 que cela a été mis en place», indique Youssef Baghdadi, président du Directoire de Bank Assafa. Rappelons que cette fenêtre a pour mission de faciliter l'accès aux financements accordés par les banques et fenêtres participatives, aussi bien en faveur des entreprises que des particuliers, et ce à travers la mise en place de mécanismes de garantie dédiés. «Nous avons déjà commencé à traiter des dossiers de clients (TPE/PME) qui, pour des raisons de risque, n'étaient pas acceptés auparavant», note également Youssef Baghdadi. Marchés publics & PME : L'appel d'air de Finéa Pour les PME opérant dans les marchés publics, la filiale du groupe CDG a apporté une série de mesures visant à faciliter le déblocage des lignes de financement de leur cycle d'exploitation. Selon Khalid El Kaoumi, DGA de Finéa, «ces mesures représentent une véritable bouffée d'oxygène pour cette catégorie». Il s'agit notamment d'octroi de délais supplémentaires sur les différentes modalités de financement, pouvant aller jusqu'à 6 mois par rapport aux conditions contractuelles. Aussi, il est question d'un relèvement de 500 bps des quotités de financement au titre des différentes modalités de crédit «avances sur marchés nantis». Enfin, il a été décidé de relever de 500 bps les taux des dépassements tolérés dans le cadre des traitements dérogatoires, ainsi que la généralisation des procédures accélérées pour les déblocages des financements.
Zoom sur le dispositif de relance de la CCG «Relance TPE» est conçu en faveur des très petites entreprises (TPE), y compris les commerçants, artisans, coopératives et professions libérales. Il est destiné à garantir à hauteur de 95% les prêts des entreprises réalisant un chiffre d'affaires ne dépassant pas 10 millions de DH. Sans sûretés exigées, cette ligne de financement est plafonnée à 10% du chiffre d'affaires, avec un minimum de 10.000 DH. Pour sa part, le produit «Damane Relance» sera déployé en faveur des petites, moyennes et grandes entreprises réalisant un chiffre d'affaires supérieur à 10 millions de DH. Le montant du crédit garanti est fixé à 1,5 mois de chiffre d'affaires pour les entreprises du secteur industriel, et à 1 mois de chiffre d'affaires pour les entreprises relevant des autres secteurs.