Les programmes sectoriels ont permis une visibilité et une compétitivité certaines. Mais, aujourd'hui, il serait temps de faire le point sur tous leurs objectifs et les intégrer dans une seule stratégie globale. Compte tenu justement de la rareté des deniers, le budget procède à des arbitrages pour identifier les priorités qu'il faut financer. Organisée par l'Association des élèves ingénieurs de l'Ecole nationale de l'industrie minérale, la 13ème édition du Forum ENIM-Entreprises a choisi pour thème «Les plans sectoriels». Depuis les années 80, l'économie marocaine a connu des mutations sectorielles qui se sont soldées par une approche sectorielle de développement. Une politique qui s'est confirmée sous l'impulsion de SM le Roi Mohammed VI avec l'adoption de plusieurs programmes sectoriels en partenariat avec le secteur privé. L'Etat recentrant son rôle sur ses prérogatives de stratège et de régulateur. Ainsi, depuis un peu plus d'une décennie, on assiste à la naissance d'une panoplie de stratégies sectorielles opérationnelles et parfois territorialisées qui ont pour objectif d'assurer une forte croissance à notre économie en tablant sur l'acquis, (agriculture, textile, pêche, tourisme) mais également en identifiant de nouveaux métiers mondiaux du Maroc. Certaines se poursuivent, d'autres ont subi quelques ajustements tandis que d'autres peinent encore. Toujours avec comme toile de fond un effort certain en investissement de l'Etat. Mais, où en sommes-nous aujourd'hui ? Le constat général est qu'il est temps de faire un bilan d'étape de tous ces plans puis de les intégrer dans une vision stratégique globale. C'était aussi le même avis des intervenants de la première table ronde du 19 avril à l'ENIM. C'est ainsi que M'hammed Grine, qui est intervenu en sa qualité de militant politique et associatif, a appelé à l'intégration de tous ces plans dans une vision intégrale et de s'attaquer à toutes les problématiques transversales. Les résultats sont probants ne serait-ce qu'en terme de visibilité. Mais toujours est-il qu'en dehors de Assises du tourisme, de l'industrie ou de l'énergie… il est difficile de quantifier la valeur ajoutée de l'ensemble de ces programmes à l'économie nationale, à l'emploi et à la prospérité des Marocains. De l'avis de Khalid Sbia, ingénieur d'Etat de l'ENA et membre de la Chambre des représentants, après leur intégration dans le cadre d'une stratégie globale, «l'opérationnalisation de ces plans et leur déclinaison territoriale constituent également un maillon manquant. «Le défi à relever reste dans la mise en œuvre des réformes et des stratégies avec la nécessité d'adopter une approche qui permettra de créer des passerelles entre l'ensemble des plans et programmes sectoriels et d'assurer, sinon une véritable convergence, du moins un minimum de cohérence». Pour lui, «face à tous ces plans nécessitant forcément des instruments de gouvernance, de pilotage et d'évaluation, il n'est pas démontré si les moyens de financement pour accompagner toutes ces stratégies sectorielles ont été clairement identifiés et totalement bouclés… Il s'agit dans la majorité des cas de plans nécessitant des moyens budgétaires, dont la mobilisation dans la contexte actuel de rareté des ressources, risque de s'avérer difficile sinon hypothétique». De son côté, Abdessalam Benabbou, adjoint au Directeur du budget, a rappelé que le pilotage budgétaire qui est mis en place pour toutes ces stratégies a pour leitmotiv la reddition des comptes. Il a également souligné que compte tenu justement de la rareté des deniers, il est procédé à des arbitrages pour identifier les priorités. Tout ceci est devenu possible grâce à la programmation budgétaire pluriannuelle qui cadre le pilotage des finances publiques. «Depuis la réforme du budget en 2001-2002, qui a donné naissance au Cadre de Dépenses à Moyen Terme, le CDMT vise à assurer une meilleure déclinaison des stratégies sectorielles et des programmes d'action au niveau de la Loi de Finances et contribuer ainsi à renforcer l'efficacité de la dépense publique. Toujours est-il qu'il serait quand temps de faire une évaluation totale et globale de tous ces programmes et de leur apport au développement économique et à la croissance. Pour Abdessalam Benabbou, il y a au moins deux nouvelles données qu'il faut intégrer : la nouvelle Constitution et la régionalisation. Depuis que le Maroc a abandonné le plan de développement unique et global dans ce pays, et qu'il lui a substitué les «plans sectoriels, nous sommes dans une situation où il est très difficile de savoir si ces plans sont cohérents entre eux ou même s'il y a une adéquation entre les objectifs et les moyens de chaque plan. C'est un fait que personne ne voulait reconnaître jusqu'au jour où le Roi lui-même l'a reconnu dans son discours de juillet 2011. Dans ce discoure, le Souverain estime que «pour encourageants qu'ils soient, les résultats enregistrés dans la mise en œuvre des différents plans sectoriels ne devraient pas pour autant occulter le fait que ces plans resteront d'une efficacité limitée tant que ne seront pas levées trois entraves majeures, la première étant la faiblesse de la compétitivité. A cet égard, Nous insistons avec force sur la nécessité d'une mise en œuvre optimale de la stratégie logistique nationale». Le deuxième écueil soulevé par le Roi tient aux entraves qui caractérisent la gouvernance de ces plans, et qui doivent être impérativement éliminées. «D'où la nécessité de mettre en place les mécanismes nécessaires pour assurer une meilleure synergie entre ces plans, dans le cadre d'une vision stratégique intégrée, excluant toute approche sectorielle étriquée». «Enfin, le troisième obstacle -qui représente en fait, le plus grand défi- est celui qui pénalise la mise à niveau des ressources humaines. Ici le devoir de vérité s'impose avec franchise et sans nulle complaisance : la responsabilité est collective. Il incombe donc à tous de prendre des décisions courageuses pour assurer l'adéquation de la formation scientifique, professionnelle et technique, avec les exigences de l'économie moderne et de la promotion de la recherche scientifique et de l'innovation, ainsi qu'avec les impératifs de l'insertion dans l'économie de la société du savoir et de la communication». A bon entendeur, salut !