60 à 80% des coûts dans les banques représentent des coûts des processus support, commerciaux, de ventes, de distribution. Il faut faire évoluer les organisations en place pour accroître l'efficacité à ressources constantes. L'approche Lean Six Sigma expliquée par Antoine Day, associé au cabinet Kurt Salmon, membre du Management Consulting Group (MMC – Bourse de Londres). -Finances News Hebdo : Présentez-nous l'approche Lean Six Sigma; en quoi consiste cette méthode ? -Antoine Day : Lean Six Sigma est le fruit du rapprochement de la méthode Lean (développée par Toyota) et de la méthode Six Sigma (marque déposée par Motorola). L'alliance de ces deux méthodes permet de créer de nouvelles formes de synergie. Les expérimentations poursuivies actuellement dans les banques françaises en la matière sont couronnées de succès, la démarche étant devenue un standard pour l'optimisation des processus. Lean traque les gaspillages dans le but de travailler plus vite et à moindre coût. Quant à Six Sigma, elle se distingue des autres démarches par l'accent qu'elle met sur la «voix du client». Le client dicte le marché. -F.N.H. : Quel est l'apport de cette méthode pour l'industrie des services financiers ? -A. D. : Conformément à l'étude de Kurt Salmon, la méthodologie Lean Six Sigma, issue du monde industriel, est bien adaptée aux problématiques d'un secteur fortement industrialisé comme la banque commerciale. Pourquoi ? Parce qu'elle combine adaptation aux attentes du client et accroissement de la productivité. Sa force réside également dans l'implication des équipes opérationnelles tout au long du projet. Le business model sur lequel se développe généralement la banque commerciale répond généralement aux contraintes de volumes et de coûts de cette filière : pour assurer sa rentabilité, la banque commerciale doit effectuer des traitements de masse (opérations liées aux moyens de paiement ou crédit à la consommation, par exemple) à moindre coût, compte tenu du faible montant moyen des opérations. -F.N.H. : Comment cette méthode peut-elle améliorer l'efficacité opérationnelle des banques et accroître leur rentabilité? -A. D. : L'approche Lean Six Sigma permet de moderniser en profondeur les banques. En effet, elle vise à mettre le client au cœur des préoccupations de tous et pas seulement des commerciaux. Les premiers résultats obtenus attestent qu'un processus «lean» génère une satisfaction des clients qui devient source de motivation du personnel de la banque, confirmant ainsi l'adage de cette méthodologie : travailler plus vite améliore la qualité et la qualité améliore la vitesse. Ainsi, grâce à cette méthode, il serait possible de réduire les effets majeurs de multiples petits dysfonctionnements et améliorer ainsi la qualité. Dans le secteur bancaire, un léger incident peut avoir des répercussions coûteuses et difficiles à anticiper. Comment éviter, alors, de payer plusieurs millions d'euros d'intérêts de retard pour ne pas avoir vu un e-mail faisant état d'une opération sur titre ? Vous savez, il est fréquent de constater que 60 à 80% des coûts engagés ne sont pas des coûts du processus de production, mais des coûts des processus support, commerciaux, de ventes, de distribution. Le secteur bancaire se caractérise par des opportunités, des améliorations encore beaucoup plus considérables. L'enjeu est important puisque source de compétitivité et de gains. -F.N.H. : Comment les banques marocaines peuvent-elles tirer profit de cette méthode? -A. D. : Au Maroc, et dans toute la région du Maghreb, les banques ont pour mission de développer la bancarisation et favoriser l'émergence d'un entrepreneuriat au travers du micro-crédit et du financement des PME. Cela donne une raison supplémentaire de bâtir une nouvelle culture d'entreprise plus soucieuse des attentes des clients et la capacité de ses collaborateurs à y répondre. Et dans le contexte concurrentiel actuel (agressivité de la concurrence sur les taux des crédits, concurrence tarifaire de la banque en ligne…), la recherche d'optimisation de la marge ne tolère aucune faiblesse quant à la qualité du service offert aux clients et la maîtrise des délais des opérations avec ces clients. Ceci impose de faire évoluer les organisations en place pour accroître l'efficacité à ressources constantes. Toutes les banques ont donc lancé un vaste plan de développement de leur réseau d'agences; cela mobilise une formidable énergie pour relever des défis de logistiques et de formation du personnel. -F.N.H. : Croyez-vous que l'approche Lean Six Sigma trouvera écho auprès des banques marocaines? -A. D. : Oui, bien sûr. Aujourd'hui, Kurt Salmon a choisi d'accompagner les clients en s'appuyant sur la méthodologie Lean Six Sigma, avec pour objectif majeur de faire évoluer progressivement les organisations en place. En étudiant les processus avec le regard du client, des gisements insoupçonnés de productivité apparaissent, permettant d'améliorer la satisfaction client, de renforcer l'implication des collaborateurs et d'améliorer de manière significative la rentabilité.