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Entretien avec Noureddine Ayouch, Président de la Fondation Zakoura : «Les banques commencent à accorder un intérêt particulier au micro-crédit»
Publié dans Finances news le 23 - 11 - 2006

* Avec l’initiative Tamwil, c’est la première fois que la société civile participe avec le gouvernement et les banques marocaines à apporter des solutions de financement aux artisans et commerçants.
q Les micro-crédits octroyés par les associations de micro-crédit pourront atteindre 50.000 DH par prêt à l’horizon 2009.
* Au-delà de 50.000 DH, les banques, décidées à jouer un rôle citoyen, prennent le relais avec une grande souplesse dans les garanties.
* L’expérience du micro-crédit au Maroc a été une réussite totale, même sur le plan international puisque le Maroc a obtenu le premier prix mondial du micro-crédit.
Finances News Hebdo : Lors de la journée d’Initiatives lancée au bénéfice des artisans et commerçants, deux conventions de financement ont été signées entre les banques et les associations de micro-crédit, d’un côté, et le gouvernement, de l’autre. Sachant qu’il existe déjà des produits de micro-financement destinés à cette cible, quelle est la valeur ajoutée de ces conventions ?
Noureddine Ayouch : C’est quelque chose de tout à fait nouveau : on fait appel aux associations de micro-crédit pour participer, d’abord à l’octroi de crédits aux artisans et aux commerçants et, aussi, assurer ces cibles à travers la sécurité maladie. Ceci est très important parce que c’est la première fois que la société civile participe avec le gouvernement pour essayer d’apporter des solutions aux problèmes que rencontrent certaines couches de la population.
F. N. H. : Quels sont les apports de ces conventions?
N. A. : Les crédits qui seront consentis cette année aux artisans et aux commerçants se chiffrent à 20.000 DH et à 30.000 DH pour l’année prochaine. Ils atteindront 50.000 DH en 2009. Les crédits inférieurs à 50.000 DH seront octroyés par les associations de micro-crédit qui touchent une large frange de la population qui ne prétend pas aux crédits bancaires parce qu’elle n’a pas les garanties nécessaires pour ce faire. Les crédits supérieurs à 50.000 DH vont être octroyés par les banques nationales signataires de la convention avec le gouvernement.
F. N. H. : Qu’est-ce qui justifie ce revirement de tendance de la part des banques, en général frileuses lorsqu’il s’agit de prêter aux personnes n’ayant pas de garanties suffisantes ?
N. A. : Les banques marocaines s’inscrivent parfaitement dans ce programme gouvernemental et approuvent la politique du gouvernement marocain qui veut aller vers les couches de la population qui n’avaient pas accès aux crédits bancaires, et qui aujourd’hui, grâce aux réformes qui ont été apportées par le Premier ministre et le gouvernement, vont avoir accès aux services bancaires et aux associations de micro-crédit. Donc, les banques, qui étaient frileuses à l’époque, ne le sont plus maintenant parce qu’elles veulent également jouer un rôle citoyen dans ce pays. Savez-vous que les banques commencent à donner des crédits très importants à taux corrects à toutes les associations de micro-crédit performantes ?
Les banques marocaines ont compris que pour lutter contre le chômage, la pauvreté, pour préparer de futurs clients solvables, il faut qu’elles favorisent le micro-crédit au Maroc. Parce que le micro-crédit accorde des crédits à des personnes n’ayant pas de garanties et qui ne peuvent pas accéder aux services bancaires. Nous les formons, nous leur donnons un crédit qui peut aller jusqu’à 50.000 DH. Par la suite, quand elles fondent leurs entreprises et deviennent plus solvables, alors là, elles font appel au crédit bancaire. C’est dans ce sens que le gouvernement marocain a pris cette initiative avec les banques marocaines.
F. N. H. : La réussite de l’expérience des associations de micro-crédit et la rigueur dont ont fait preuve les populations cibles en remboursant leurs prêts, n’y sont-elles pas pour quelque chose ?
N. A. : Vous avez tout à fait raison. L’expérience du micro-crédit au Maroc est tellement réussie que même sur le plan international, le Maroc a obtenu le premier prix mondial de micro-crédit, et les banques ont compris que les associations de micro-crédits, du moins certaines d’entre elles, sont solvables et atteignent des résultats reconnus sur les plans national et international. Donc, elles ont commencé à travailler avec les associations de micro-crédit et, ensemble, nous travaillons sur beaucoup d’objectifs. De même que le gouvernement a entrepris d’importants projets tels que Moukawalati pour inciter les jeunes diplômés à créer leurs petites entreprises ou s’insérer dans le monde du travail. Le gouvernement va encore plus loin en s’adressant à des gens qui n’ont pas de diplômes et qui étaient des laissés-pour-compte, oubliés par le développement. Il veut maintenant les intégrer dans le processus de développement. Je crois qu’il faut saluer cette initiative qui est une première au niveau du Maroc, et peut-être même sur le plan international, car nous avons, le gouvernement marocain, les banques, les sociétés d’assurance et en même temps les associations, travaillé la main dans la main pour éradiquer la pauvreté, encourager les gens à acquérir des habitations correctes, via le Fogarim, et également aider cette population à s’assurer.
F. N. H. : Cela reviendra-t-il à dire que les associations de micro-crédit peuvent disposer auprès des banques d’autant d’argent qu’elles en auront besoin pour assurer le financement aux couches défavorisées ?
N. A. : Il est vrai que les besoins en financement sont énormes. Avant, on ne trouvait pas ces financements. Au Maroc, il y avait le Fonds Hassan II qui octroyait 100.000 DH de subventions, récemment 200.000 DH pour le développement du micro-crédit au Maroc dans le cadre de l’INDH. Et bien avant, il y avait surtout les banques étrangères et les organismes internationaux qui assuraient le financement; mais il faut reconnaître que depuis quatre ou cinq ans, les banques marocaines commencent à manifester une attention particulière au micro-crédit et accordent des crédits très importants à taux préférentiels aux associations sérieuses. Nous, à Zakoura, travaillons avec plusieurs banques qui nous accordent des montants très importants. Ce qui est nouveau, c’est que pour la première fois, des banques filiales de banques internationales s’intéressent beaucoup aux associations de micro-crédit et veulent nous encourager parce que nous sommes devenus des clients solvables audités et faisons l’objet de rating. Ceci prouve que le micro-crédit a acquis ses lettres de noblesse parce que SM le Roi et le gouvernement nous encouragent. De même que les banques marocaines, dont je tiens à saluer le courage et en même temps la générosité parce que certaines d’entre elles ont accordé des crédits à taux zéro quand nous nous sommes lancés à Zakoura (la Société Générale Marocaine de Banques, la BCM devenue Attijariwafa bank, la BMCE, la Banque Populaire, le Crédit du Maroc, le CIH). Toutes ces banques nous ont accordé des crédits importants à taux zéro.
F. N. H. : Comment se fera la distribution de ces produits pour s’assurer que leur cible pourra en profiter ?
N. A. : Les associations de micro-crédit touchent près d’un million de citoyens. Si ces personnes sont assurées, ce sont leurs familles aussi qui seront assurées, soit plusieurs millions de personnes. Ceci ne peut pas se faire du jour au lendemain, il faudrait peut-être cinq ans parce qu’il faut travailler à moyen terme, mais il faut s’y mettre tout de suite. Les personnes qui sont dans le milieu rural, dans des communes éloignées ou des régions reculées vont pouvoir avoir accès au crédit à travers les antennes des associations de micro-crédit, mais aussi via les réseaux de certaines banques comme la Banque Populaire, Attijariwafa bank et le Crédit Agricole.
F. N. H. : Lors de la présentation des résultats 2005 de la Fondation Zakoura, vous avez annoncé l’ambition d’octroyer 500.000 prêts solidaires en 2006. Où en êtes-vous de votre objectif ?
N. A. : Nous allons les atteindre cette année car nous avons fait une progression spectaculaire et nous ne sommes pas les seuls. Je salue également les performances d’Al Amana, de la Fondation Banques Populaires et de la Fondep. Ces quatre associations ont une clientèle très importante de pauvres et à elles seules atteignent plus de
90 % de la cible que nous visons en faisant un travail remarquable. Il y a également des associations moyennes et petites qui sont réparties sur le Maroc et font un excellent travail aussi. Au Maroc, il y a près de douze associations de micro-crédit et, ensemble, ces associations méritent, à mon sens, d’être soutenues. Toutes ces associations travaillent au sein de la Fédération.


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