L'Instance nationale de la probité, de la prévention et de la lutte contre la corruption (INPPLC) planchait depuis des mois sur ses axes d'intervention. L'adoption du projet de loi n°46-19 par le Conseil de gouvernement assortie de quelques remarques, constitue une nouvelle étape franchie. La corruption est une gangrène qui n'épargne aucun domaine, et à laquelle citoyens et entreprises sont confrontés sans distinction, en violation du doit à l'équité, l'égalité des chances et une concurrence loyale. Elle vaut au royaume l'un des classements les plus médiocres à l'échelle mondiale : 41 points en 2019 le plaçant au 80ème rang sur 180 pays et un score de 41 points sur 100 selon l'Indice de perception de corruption. La corruption est d'autant plus dangereuse qu'elle sape les efforts de réforme dans le pays, particulièrement en termes de climat des affaires. En effet, une majorité des gros investisseurs mondiaux sont sensibles à cet indice. Alors depuis sa nomination par le Roi, en décembre 2018, à la tête de l'Instance nationale de la probité, de la prévention et de la lutte contre la corruption, Bachir Rachdi a la lourde tâche de rendre effectif le rôle de l'instance en tant qu'institution constitutionnelle en revoyant ses fondements et ses axes d'intervention. Un début de réponse sur ce chantier en cours est apporté aujourd'hui par l'adoption en conseil de gouvernement, assortie de remarques lors du conseil, du projet de loi n°46-19 relatif à l'INPPLC, tel que présenté par le ministre de l'Economie, des Finance et d la Réforme de l'administration. Lors du Conseil, le Chef du Gouvernement a souligné l'importance de ce projet de loi qui renforce et élargit les prérogatives de cette instance et a insisté sur l'importance accordée à ce chantier partant des orientations royales. Saad Eddine El Otmani a appelé à la coopération de toutes les parties pour adopter le projet de loi au Parlement, à même de faire de l'INPPLC un outil plus efficace et plus fort dans la lutte contre la corruption. En attendant que le projet de loi ne soit déposé sur le site du Secrétariat général du gouvernement, pour prendre connaissant de tous ses articles, on sait déjà que le projet de loi vise à répondre à quatre objectifs majeurs. Quatre objectifs majeurs D'abord établir une définition de la corruption de sorte à distinguer entre les faits délictuels que l'INPPLC transfère au ministère public et les effractions administratives et financières. Le deuxième objectif de ce projet de loi tend à élargir les prérogatives de l'instance et son champ d'intervention notamment en proposant les orientations stratégiques de la politique de l'Etat dans la lutte contre la corruption, les mécanises et procédures de mises en œuvre de ces orientations mais également en s'investissant dans la moralisation de la vie publique à travers la sensibilisation et la formation. Egalement, l'INPPLC voit ses prérogatives élargies au même titre que l'élargissement de la notion de corruption. Le troisième objectif de ce projet de loi et qui revêt une grande importance, concerne les compétences et prérogatives des commissaires de l'instance en matière d'investigation et d'enquête. Le projet de loi définit le statut du commissaire, tenu de prêter serment devant la Cour d'appel de Rabat, pour remplir sa mission d'investigation sous l'autorité du Président de l'INPPLC, sanctionnée d'un PV à valeur juridique jusqu'à preuve du contraire. Aussi, le projet de loi prévoit-il des sanctions disciplinaires et pénales à l'encontre des personnes qui entraveraient le travail de l'instance, en s'abstenant de répondre à ses requêtes sans justification légale. Enfin, le projet de loi n°46-19 revoit les compétences des organes de l'Instance par la création d'une commission permanente auprès du Conseil de l'INPPLC composée du président et de trois vice-présidents nommés par le conseil. La commission sera chargée d'étudier les dossiers de cas de corruption et de prendre des décisions au nom du conseil. Elle défère ses conclusions et recommandations aux autorités compétences pour enclencher des poursuites administratives ou pénales de suivi. Le président de l'INPPLC informe le Conseil de toutes les données relatives aux dossiers présentés à l'Instance ou renvoyés devant la commission permanente. Aussi, le projet de loi donne-t-il au président de l'INPPLC la pleine prérogative à élaborer tous les mécanismes nécessaires pour permettre à l'instance d'exercer ses pouvoirs, l'élaboration des projets de décisions à présenter au conseil de l'INPPLC, le règlement interne, le régime spécial des appels d'offre, le rapport annuel... et d'autres textes, soumis à l'approbation du Conseil de l'INPPLC. Le projet de loi n'est encore qu'au tout début du circuit de validation et reste également tributaire de la volonté et courage politique pour donner un véritable coup de pied dans la fourmilière.