La découverte des fonctionnalités du système Gestion Intégrée de la Dépense (GID), telles qu'elles sont expliquées par la TGR sur les plateaux de TV attise notre curiosité sur le rôle que joue la dématérialisation de la commande publique dans un contexte d'état d'urgence sanitaire. Noureddine Bensouda, Trésorier Général du Royaume revient sur les points saillants du GID dont la construction s'est basée sur une démarche progressive et depuis 2010 pour l'Etat et 2014 pour les collectivités territoriales. Ecoactu.ma : Depuis plusieurs années, la TGR a entrepris nombre d'actions, y compris le système GID, ayant pour objectifs la transparence, la sincérité, la conformité de la dépense. Pouvez-vous expliquer à notre lectorat le fonctionnement du système GID ? Noureddine Bensouda : Le Système GID est un système d'information budgétaire et comptable qui offre des fonctionnalités de pilotage et d'exécution de la dépense publique. Il a pour objectifs de simplifier les circuits et procédures d'exécution de la dépense, d'en réduire les coûts et les délais de traitement des actes, de permettre la restitution en temps réel des informations nécessaires à la maîtrise du rythme d'exécution de la Loi de Finances et d'améliorer les délais de paiement et la qualité de l'élaboration des comptabilités, des comptes administratifs, du compte général du Royaume et de la loi de règlement. Le Système GID couvre toutes les procédures qui prennent en charge l'exécution de la dépense publique depuis la mise place des crédits jusqu'à l'élaboration des comptes administratifs et de la loi de règlement, en passant par les phases d'engagement, de liquidation, d'ordonnancement et de règlement.
Il porte sur toutes les composantes du budget de l'Etat, notamment le budget général, les comptes spéciaux du trésor (CST) et les budgets des services de l'Etat gérés de manière autonome (SEGMA). C'est principalement un système unifié et commun à l'ensemble des acteurs institutionnels de la dépense publique, notamment : * Les services ordonnateurs des départements ministériels et leurs structures déconcentrées, des collectivités territoriales, des organismes et institutions dont le budget figure dans la loi des finances ; * Les comptables publics relevant du réseau de la Trésorerie Générale du Royaume ; * La Direction du budget ; La construction du système GID s'est basée sur une démarche progressive et incrémentale depuis 2010 pour l'Etat et 2014 pour les collectivités territoriales. Dans un contexte empreint d'incertitudes marqué par l'état d'urgence sanitaire où la prise de décision joue un rôle déterminant en matière de dépense publique, comment le système GID régule-t-il l'engagement de la dépense faisant intervenir plusieurs opérateurs à la fois ? C'est là où réside l'apport du système GID comme étant un système unifié et commun faisant intervenir plusieurs opérateurs. En effet, les principes directeurs ayant prévalu à la construction du système GID consistait d'abord à y embarquer systématiquement tous les contrôles et règles de gestion réglementaires comme la disponibilité des crédits, la liquidation des actes et la génération automatique des intérêts moratoires. Ces principes visaient ensuite à asseoir le mécanisme de saisie unique de l'information en amont par l'ordonnateur et à terme par le fournisseur, en assurant ainsi la cohérence et la qualité des données. Le système GID constitue ainsi, un outil de gestion apprenant de par sa convivialité et la facilité de son utilisation et surtout, un outil de contrôle interne à travers une gestion fine des habilitations et des rôles impartis aux intervenants. Le système GID est plus qu'un simple outil informatique de gestion de la dépense, c'est un socle de mise en œuvre des réformes budgétaires et comptables, assurant la convergence vers un service de qualité au profit de tous les acteurs de la dépense publique. C'est également un système de production en temps réel de l'information pour l'aide à la décision. Le système met à la disposition de tous les décideurs et à tous les niveaux l'ensemble des informations et données comptables et financières pour d'une part, piloter efficacement leurs activités à travers des situations transactionnelles enrichies par des modules de recherches avec plusieurs critères et d'autre part, les doter d'un outil d'aide à la décision à travers le système de reporting qui lui est adossé, permettant d'effectuer des analyses selon plusieurs axes basés sur des données historiques. Comme vous l'aviez annoncé la soumission électronique sera obligatoire à partir de janvier 2021, comment le système GID peut-il y contribuer ? En matière de gestion des marchés publics, comme vous le savez, le système GID intervient dans la phase d'exécution du marché préalablement attribué à une entreprise, après une première phase de publication de l'appel d'offre correspondant sur le portail marocain des marchés publics, géré par la TGR et une deuxième phase de soumission des offres par les entreprises intéressées, qui peuvent le faire de manière électronique. L'obligation de la soumission électronique à partir de janvier 2021 n'est qu'un des aspects d'un vaste projet de dématérialisation de toute la chaine comptable et financière de la dépense. Le système GID se trouve au cœur même du processus de dématérialisation de la dépense de cet important chantier puisqu'il est utilisé par tous les opérateurs classiques de la dépense publique et intègre également les fournisseurs à travers le projet de dépôt électronique des factures depuis 2019. Il intègrera à terme, les banques et la caisse de dépôts et de gestion dans le cadre de la dématérialisation des garanties pécuniaires exigés en matière de marchés publics, notamment le cautionnement provisoire qui démarrera en janvier 2021. Ainsi, outre ce qu'il apporte en termes de transparence, d'égalité des chances et de bonne gouvernance, le processus de soumission électronique, prendra toute son importance lorsque l'entreprise bénéficiera d'une dématérialisation de bout en bout de sa relation avec l'Administration. Autre point important est celui des délais de paiement qui pèse sur l'économie. Dans quelle mesure le système GID peut-il remédier à cette problématique et comment ? Le système GID a constitué le socle technique de déploiement de la réforme relative aux délais de paiement et aux intérêts moratoires mise en oeuvre en 2016. Il constitue à ce titre le meilleur exemple de la digitalisation au service de l'efficacité et de la performance dans l'exécution des dépenses publiques. En effet, le système de gestion intégrée de la dépense a permis d'assurer la traçabilité des actes liés à la commande publique et au paiement des dépenses publiques y afférentes, en termes de dates de dépôt de la facture, des dates des d'échanges entre le fournisseur et le maitre d'ouvrage, de certification du service fait, d'ordonnancement, de règlement, .... Ledit système a également permis la liquidation et le calcul automatique des intérêts moratoires. Il a favorisé en outre, la notification d'alertes pour les ordonnateurs et les comptables publics, quant au risque de dépassement des délais de paiement. Ce système a enfin offert la possibilité pour l'entreprise, de suivre et de vérifier par elle-même, à travers le système GID-fournisseurs, les informations relatives à la constatation du service fait, à l'ordonnancement et au paiement de ses créances. Dès la fin de la première année de sa mise en œuvre, force est de constater que la réforme sur les délais de paiement et son adossement sur le système GID ont permis une réduction drastique du délai moyen de paiement, le ramenant pour les marchés publics de l'Etat et des collectivités territoriales de 144 jours en 2016 à 58 jours en 2017. Par ailleurs, et dans le cadre des Hautes Orientations de Sa Majesté Le Roi, contenues dans le Discours Royal du 20 août 2018, il a été procédé à la mise en place progressive du système de dépôt électronique des factures. Entré en vigueur depuis le 2 mai 2019, le système de dépôt électronique des factures permet aux entreprises et autres prestataires de service de procéder au dépôt électronique des factures et autres documents nécessaires à l'attestation du service fait. Depuis la mise en place de ce système d'information intégré, est-ce que nous pouvons déduire une meilleure mobilisation des ressources financières de l'Etat et des Collectivités territoriales se traduisant par « Le dépenser mieux » ? Ou tout simplement quelle évaluation en faites-vous ? Le système GID a permis d'atteindre un ensemble d'objectifs stratégiques notamment : * La réalisation d'une forte économie pour le budget de l'Etat, dès lors qu'il évite aux administrations l'acquisition d'une multitude de systèmes d'information propres, étant donné que c'est un système partagé entre tous les acteurs ; * La contribution à l'harmonisation et à la simplification des procédures de la dépense publique ; * La sécurisation des traitements à travers un bon niveau de traçabilité des processus ; * La réduction des coûts et des délais de traitement des actes ; * La réduction des délais de paiement des dépenses publiques. * La restitution, en temps réel, des informations relatives au rythme d'exécution de la Loi de finances dans le cadre d'une vision consolidée Etat/collectivités territoriales. L'extension de GID aux collectivités territoriales a permis d'en faire un puissant levier de modernisation et de bonne gouvernance des finances locales, et ce dans le cadre d'une vision globale d'accompagnement du processus de régionalisation avancée et de décentralisation. Lire également : TGR : la soumission électronique obligatoire à partir du 1er janvier 2021