Agriculture/Retard des pluies. Les agriculteurs s'attendent à une campagne agricole très moyenne, dans le meilleur des cas. Le retard des pluies a engendré une situation qui ne peut être rattrapée selon eux. par Roland Amoussou Le retard des pluies constaté au mois de décembre, a plongé les agriculteurs dans une situation sans précédent. Selon plusieurs professionnels, la saison agricole est d'ores et déjà compromise au niveau de certaines filières. Même si les premières pluies ont commencé cette semaine, il faut dire que l'attente a été très longue au point où tous les espoirs ont été déçus. Le moral des agriculteurs n'est pas au beau fixe. « La campagne a mal démarré, car elle a été perturbée par ce retard de pluie qui est exceptionnel. Cela a bien sûr occasionné des répercussions négatives surtout au niveau des cultures d'automne, dont notamment les céréales, culture principale et indicatrice de la qualité d'une campagne », analyse Ahmed Ouayach, Président de la Confédération marocaine de l'agriculture et du développement rural(COMADER). Il y a à l'heure actuelle et ce, dans plusieurs régions du Royaume, beaucoup de champs de céréales qui sont dans un état de développement pas du tout satisfaisant. De même, il faut souligner la baisse des réserves des barrages, à cause d'une utilisation massive de l'eau pendant plus d'un mois, puisque le retard des pluies s'est étalé sur 45 jours, et il fallait bien que les agriculteurs continuent d'arroser et d'irriguer les plantes. Cela suppose donc des frais de culture supplémentaires, et aussi l'état des nappes phréatiques qui va certainement en prendre un coup. «Au vu de la situation qui prévaut sur le terrain, les pluies actuelles sont insuffisantes. Les agriculteurs sont dans une situation d'inquiétude. Mais, ils restent confiants et sont dans l'attente », avance Ahmed Ouayach. Aujourd'hui, tous les professionnels s'accordent à dire que la campagne agricole sera, dans le meilleur des cas, une campagne moyenne, très loin du record de production enregistré lors de la précédente campagne, avec une production céréalière ayant atteint 115 millions de quintaux, soit un niveau supérieur de près de 5% aux prévisions. Selon eux, le retard a malheureusement engendré une situation qu'on ne peut pas rattraper. Et surtout en ce qui concerne les céréales qui représentent 80% de la superficie, le rendement va être extrêmement moyen. 60 millions de quintaux, dans le meilleur des cas Ils tablent sur un volume aux alentours de 60 millions de quintaux. Toutefois, il y a certaines filières comme celles de l'olivier, le maraîchage et les agrumes etc. «Les répercussions d'une telle situation pour l'économie nationale se situent à plusieurs niveaux. Concernant les céréales, nous allons encore dépendre plus de l'étranger. De même, la trésorerie des agriculteurs va en prendre aussi un coup, à cause du manque à gagner. Mais, quand-même, espérons qu'il va y avoir beaucoup de pluie pour, ne serait-ce que reconstituer les réserves des barrages et améliorer les pâturages etc », soutient le Président de la Comader. Les agriculteurs espèrent vivement maintenant, qu'ils pourront bénéficier d'un soutien conséquent pour gérer cette crise. Et à ce niveau, le gouvernement, à travers le ministère de l'Agriculture, a pris la mesure de la situation. Ainsi, un plan de secours est d'ores et déjà envisagé pour amoindrir les dégâts. Il s'agit d'un plan anti-sécheresse et selon des sources proches du dossier, il est basé sur trois principaux axes, dont la sauvegarde du cheptel, la disponibilité de l'eau et la création de l'emploi dans le monde rural. En clair, il s'agit d'assurer l'aliment du bétail aux éleveurs, de veiller à la sécurité de l'eau par le biais des points d'approvisionnement, et de lancer certains chantiers (construction des pistes) pour générer de l'emploi. «Les agriculteurs attendent des mesures convaincantes. Les pouvoirs publics ont toujours su bien gérer ce genre de situation», souligne Ahmed Ouayach. De nombreux professionnels insistent notamment sur les mesures classiques, comme la sauvegarde du cheptel. Ils appellent également les autorités à prendre des mesures d'encouragement pour la mise en place des cultures de substitution, ou encore envisager le rééchelonnement des dettes. «Pourquoi ne pas exonérer certains petits agriculteurs ?», se demande le Président de la Comader, ajoutant qu'il y a très peu de petits agriculteurs qui ont accès aux banques. De même, il y a l'assurance agricole. Et sur ce point, les professionnels espèrent que des produits bien particuliers vont leur être présentés en ces temps de crise. «Sur ce plan, il faut reconnaître que l'assurance agricole a beaucoup évolué ces trois dernières années. Il y a eu une grande réforme qui couvre beaucoup d'aspects comme la sécheresse, l'inondation, la grêle etc. Et l'assurance ne se limite pas uniquement aux céréales puisqu'elle est étendue à d'autres cultures», explique le Président de la Comader. « Mais, je pense qu'on peut encore l'améliorer et la transformer en une véritable mutuelle qui sera là en période de problèmes. Cette réforme est encore à ses débuts, j'espère que le développement de l'assurance agricole va se poursuivre. J'exhorte les autorités à être aux côtés de l'agriculteur en ces temps de crise, car nous avons besoin de décisions exceptionnelles pour faire face à cette situation exceptionnelle», conclut Ahmed Ouayach. n