Ils sont trisomiques et l'Association Malaika lutte pour les scolariser dans le système éducatif «classique». Les acteurs associatifs s'associent pour une cause, qui mobilise jusqu'à l'artiste Nouhaila Majidi. par Noréddine El Abbassi Ils sont jeunes et attendent leur premier enfant. Le début d'une nouvelle vie, celle de fonder une famille. Mais une surprise les attend: il y a un problème avec le bébé. Après l'accouchement, ils apprennent que l'enfant est atteint de trisomie 21. Un «mongolien», comme on dit dans l'argot marocain. Le mot sonne comme une sentence, sans appel, qui laisse place au désespoir. Un profond sentiment de froide désespérance. Mais les hommes aiment leurs enfants. Mehdi, cadre trentenaire est le frère d'un trisomique 21: «pour nous, mon frère est le symbole de notre famille. Même si je sais qu'un trisomique ne vivra que difficilement plus de 30 ans». Jeune cadre «bien dans sa peau», Mehdi représente une génération de jeunes marocains investis dans la «défense des handicapés», à la charge exclusive de leur famille, et à vie dans le Maroc d'aujourd'hui. Dans ce mouvement, l'Association Malaika a été fondée en 2012 pour scolariser ces enfants en situation de handicap, à Rabat et Salé. L'association a ouvert deux centres dans la Capitale, pour scolariser et prendre en charge 80 enfants trisomiques et 8 handicapés moteurs et cérébraux. Et pour ce faire, l'Association a vu les choses en grand, employant quelques 23 salariés, psychologues, orthophonistes et psychomotriciens. Un enfant parrainé nécessite quelques 1000 dirhams de charges, soit 10 000 par enfant et par an. Pour l'immense majorité des Marocains, c'est beaucoup, trop, ce qui explique que 68% des enfants en situation de handicap ne soient pas scolarisés. Mais des contre exemples existent, comme l'élève trisomique Yasmine Berraoui, qui explique être trisomique et non handicapée, et a décroché le bac avec mention. Dans la rue marocaine, le commentaire était: «elle a réussi le bac là où les élèves paresseux «valides» ne l'ont même pas eu au rattrapage après 3 essais». Une artiste engagée aux côtés de trisomiques Derrière l'Association Malaika, Nouhaila Majidi, une artiste peintre de 17 ans qui a déjà exposé à Paris et Madrid, et qui s'investit «corps et âme» dans cette cause. Sa conscience sociale, elle la manifeste par des ateliers créatifs, où elle initie les enfants trisomiques aux différentes techniques d'art appliqué. A chacun de ses ateliers, les petits «anges» des Centres Malaika, ont pu découvrir différentes techniques, allant de la peinture, le collage sur dessins, à l'utilisation d'outils étonnants, comme la paille, qui permet grâce au souffle, de faire des dessins aléatoires, mais néanmoins maitrisés. Un exercice qui semble anodin, mais qui demande une attention particulière, surtout pour des enfants qui ont a priori des difficultés de coordination spatio temporelle. En effet, en soufflant dans la paille, les jeunes trisomiques se sont appliqués et ont maitrisé le sens du dessin orienté, sous les consignes de l'artiste, qui a fait abstraction de leur handicap. La thématique évoquée est celle de l'environnement, thème d'actualité aujourd'hui, où les enjeux planétaires nous acculent à trouver des solutions pour réduire notre pollution et respecter notre planète, ses montagnes, ses forêts et ses ressources naturelles. S'il y a une mission que l'Association Malaika s'est donnée, c'est bien que les «petits anges» aient une réelle chance dans la vie, et que le cas de Yasmine Berraoui ne soit plus une exception, mais bien une règle. n