Avec le rapprochement Upline-BCP, il n'y a guère plus que CFG Group pour garder son indépendance. Le modèle de banque d'affaires affiliée à une banque de détail semble prendre le dessus. La concurrence s'exacerbe dans le secteur, et l'argument de l'affiliation à un groupe fait de plus en plus mouche dans le contexte actuel. Est-ce la fin du modèle de banque d'affaires indépendante à l'américaine ? Une question qui a le mérite d'être posée, à l'heure de la chute du géant américain Lehman Brothers. Elle doit aussi être posée chez nous, à l'heure où une seule banque conserve son indépendance, CFG Group. En effet, Casablanca Finance Group fait office de «dernier des Mohicans» après le rapprochement de la Banque Populaire avec Upline Group. Une absorption qui renvoie à la nécessité de s'adosser à un groupe bancaire pour se donner les moyens d'assurer sa pérennité. La banque d'affaires a pour cœur de métier de mener des opérations financières pointues pour le compte de ses clients. Cela nécessite une maîtrise des techniques financières de haut vol. Une expertise qui, dans notre pays, a d'abord été introduite par des groupes indépendants qui ont prouvé leur savoir faire et aidé le secteur de la finance de pointe à sortir du néant. Ainsi, des entités comme CFG Group, Upline Group ou encore Magfin ont fait office de précurseurs. Ils ont réussi, grâce à la compétence de collaborateurs qui ont fait leur preuve dans des institutions de référence au niveau international, à introduire une foule de techniques financières qui permettent aux entreprises de mieux gérer leur développement et d'optimiser leur capital. Le métier a depuis pris de plus en plus d'ampleur et la demande n'a cessé de croître pendant cette décennie. BMCE Bank en précurseur Toutefois, la BMCE a introduit un modèle opposé au premier, qui présente bien des avantages. En lançant sa propre banque d'affaires, le groupe bancaire cher à Othman Benjelloun a crée un précédent et a bientôt été suivi par d'autres groupes de la place, notamment Attijari. Ce modèle ramène dans le giron des grands groupes bancaires le métier de base de la banque d'affaires. BMCE Capital, comme Attijari Finances, sont désormais des incontournables dans le secteur. «Le groupe nous laisse disposer d'une certaine indépendance opérationnelle, tout en gardant le contrôle», explique Khalid Nasr de BMCE Capital. La filiale de BMCE a donc toute la latence pour opérer et être aussi réactive sur le marché que ses concurrents indépendants, tout en ayant l'avantage d'être affiliée à un groupe solide. Le haut cadre de BMCE Capital argue : «Notre affiliation à BMCE est une assurance pour nos interlocuteurs». En temps de crise, cette affiliation peut même s'avérer vitale. Car au niveau international, l'expérience de la faillite de Lehman Brothers est sans équivoque. La banque d'affaires américaine qui, avec JP Morgan, représentait ce qui se fait de mieux dans les hautes sphères financières, n'a pas survécu au besoin ponctuel de liquidités. La chronique de la chute de Lehman Brothers est certes autrement plus complexe, mais si celle-ci avait pu bénéficier de l'appui d'une banque de détail, l'histoire aurait pu connaître un autre dénouement. La leçon est donc tirée, mais les enjeux au Maroc sont d'une autre nature. La concurrence dans le secteur est exacerbée et il est de bon ton d'appartenir à un grand groupe. Le lobbying est plus qu'essentiel à ce niveau. Il est de notoriété publique que les marchés se gagnent sur des critères aussi bien techniques que d'influence. Dans ce contexte, l'absorption d'Upline Group par la BCP vient, à point nommé, confirmer la tendance. Même si encore une fois, la perte de l'agrément de détention de titres et cash a beaucoup joué en faveur de l'opération. Toujours est-il que désormais, la banque du cheval dispose d'une machine de guerre impressionnante, avec une banque d'affaires constituée de pas moins de 14 filiales. La concurrence ne devrait qu'en être plus exacerbée. Et il ne reste plus guère que CFG Group pour rester indépendant. Une position qui se défend aisément, au vu de la maîtrise dont il dispose, aux dires de ses cadres. Mais cela sera-t-il toujours le cas dans les mois et les années à venir ? Rien n'est moins sûr, surtout lorsqu'on sait que les entreprises optent de plus en plus pour des offres globales, financement et expertise.