Le dinar qui se soutient, depuis des décennies, de la seule rente des hydrocarbures et qui décline ses prétentions en pétrodollars, ne cesse de connaître une dévaluation par rapport à l'euro et au dollar. Cela se passe sur le marché parallèle, marché auquel l'Etat algérien a choisi de donner un rôle référentiel en le laissant prévaloir sur les places où la monnaie nationale s'échange contre les deux devises internationales que sont l'euro et le dollar. C'est ce même marché « informellement officiel » qui définit, en fonction de l'offre et de la demande du moment, la valeur du dinar par rapport à ces monnaies. Les saisons de tension monétaire Habituellement, la demande en devises s'exprime de façon intense sur ce marché parallèle durant les périodes où les Algériens ont besoin de voyager à savoir : les saisons estivale et de pèlerinage. Passées ces deux saisons, la tension se profilant à la baisse, on renoue avec un dinar qui a retrouvé une valeur, certes reflet d'une réalité monétaire parallèle, mais tout de même plus ou moins proche de la valeur de la cotation que l'Etat algérien lui prête officiellement. Lire aussi | Sahara : les lignes bougent en Scandinavie, le Danemark sort de la zone grise Mais voilà que ce même dinar, vacillant durant des années, entre les niveaux les plus bas et les niveaux les plus hauts conventionnellement admis, semble s'emballer vers des niveaux de dévaluation inédits pouvant équivaloir, si cette tendance se poursuit, à 300 dinar pour 1 euro. Qu'arrive-t-il au dinar en cette période de rentrée sociale où tout semble normalement favoriser un regain de valeur sur le marché parallèle ? Des décisions politiques à l'origine de cette crise Il semble, à ce dernier titre, que la demande en devises sur ce marché parallèle s'intensifie, les Algériens exprimant un besoin inhabituel d'acquérir la monnaie européenne sur laquelle beaucoup entendent constituer leur épargne. La raison en est que les autorités algériennes ont pris, durant les derniers mois, des décisions qui affectent de façon structurelle la disponibilité de certains produits importés sur le marché local. Il en est ainsi du choix des Algériens d'acheter des véhicules d'occasion de l'étranger, dont les prix, y compris en les dédouanant, concurrencent, de loin, ceux des véhicules neufs de qualité qui se vendent à des prix inaccessibles pour la majorité des Algériens. La suspension récente de l'immatriculation des véhicules d'occasion, afin d'endiguer la demande en devises, ne fait que surseoir à une réalité de marché qui s'imposera dès que les autorités algériennes, sous la pression populaire, lèveront de nouveau cette suspension. Autre raison, l'interdiction de l'enseignement du programme français dans les écoles privées qui oblige les parents à financer les études secondaires de leurs enfants en Tunisie ou en France pour ceux qui ont plus de moyens. Des augmentations salariales illusoires Il faut rappeler, par ailleurs, que la dégringolade incessante du dinar amène ceux qui ont une certaine capacité d'épargne, à thésauriser leurs économies en monnaies étrangères, faisant de l'euro et du dollar, essentiellement de l'euro, une valeur refuge qui leur garantit, sur le moyen et le long terme, une préservation de leur épargne de l'inflation qui s'est emparée du dinar algérien et qui érode, de façon inéluctable, ce qui reste de leur pouvoir d'achat. Lire aussi | « Le dinar ne vaut plus rien! »: comment la monnaie algérienne s'est effondrée en seulement 10 ans Ce qui fait dire à certains experts que les augmentations consenties périodiquement par le pouvoir algérien et annoncées, à chaque fois, à grands renforts de communication, ne sont, en réalité, que des rattrapages destinés à renflouer, un tant soit peu, un pouvoir d'achat laminé par l'inflation ; une inflation, dit-on, qui est provoquée, en partie, en actionnant la planche à billets. Le reste, la sacrosainte loi de l'offre et de la demande s'en charge.